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15 novembre 2010 1 15 /11 /novembre /2010 08:57

 

LE DEBAT SUR L'ACCUEIL EDUCATIF SE POURSUIT

 

Voici une lettre de la FCPE

 

L’accueil éducatif des tout petits.

 

À ce jour, l’accueil des enfants de moins de 3 ans n’est pratiquement plus assuré en Seine et marne.

En effet, nous sommes passé de 2363 enfants de -2 ans scolarisé en 1999 à 737 enfants de –2 ans scolarisés en 2010. Soit une baisse de 320%

La volonté officiée est claire ! faire disparaître la scolarisation des enfants de -2 ans avant de supprimer la maternelle définitivement.

Aujourd’hui, l’école est gratuite et garante d’un bon apprentissage du savoir vivre ensemble ainsi que de l’éveil aux connaissances.

Ce que l’on nous propose pour demain : payer une structure « jardin d’éveil » . structure qui n’apportera rien de plus aux enfants ! bien au contraire.

De plus cette solution sera payante pour les familles ce qui défavorisera une fois de plus les familles les plus démunies.

Ce n’est pas ce que les parents d’élèves FCPE désirent.

Venez nombreux pour participer à ce temps d’échange avec les instances représentatives de cette disparition programmée de la maternelle.

 

Patrick Ratouchniak
Président départemental de la FCPE

 

Un cadre de référence pour les centres de loisirs maternels

lu dans JPA en ligne

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En 2003, la commission CORALA1 rédigeait un cadre de référence pour l’accueil en

  

 centres de loisirs maternels. Gabriel Pellerin, chargé de mission auprès du comité Jeunesse au plein air du Val-de-Marne, revient sur ses recommandations.

  

« La commission CORALA pensait à l’époque que les centres de loisirs allaient accueillir des enfants dès l’âge de 2 ans (vu que l'école maternelle prenait déjà les enfants de cet âge dans certaines communes), car il y avait un manque de place dans les crèches et les garderies. Il était pressant que les centres de loisirs mettent en place un accueil adapté. L’objectif de ce cadre de référence était de permettre à des villes qui souhaitaient mettre en place un projet éducatif local de construire des réponses adaptées aux besoins et attentes des familles dans le cadre de l'accueil des tout- petits en s’appuyant sur un document de référence, afin de s’engager dans un contrat petite enfance de la CAF2.

 

 

Aujourd’hui le Bafa3 suffit pour animer un centre de loisirs pour les moins de six ans mais

  

ce n’est pas forcément adapté. Des organismes de formation proposent un stage de perfectionnement Bafa petite enfance. Dans le cadre de référence, nous estimions qu'il fallait qu’un animateur au minimum ait suivi cette formation. Nous recommandions aussi la possibilité d'engager une animatrice avec BEP Sanitaire et social ou Petite enfance. La réglementation imposait un animateur pour huit enfants, nous proposions un animateur pour six afin d’accueillir de façon satisfaisante les 2-4 ans. Il était également utile que les équipes éducatives soient stables et qu’elles aient des projets spécifiques. Nous recommandions également de créer un poste de coordinateur (avec peut-être un diplôme E.J.E) afin qu'il soit leur conseiller technique.

 

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Nos recommandations à l'époque étaient d'une grande exigence. Elles n’ont pas été suivies d’effets car ce type d'encadrement exigeait un énorme engagement financier pour la ville.

À l’époque, les communes avaient les subventions nécessaires pour mettre en place des projets de centres de loisirs maternels de qualité. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Les CAF soutiennent surtout les projets sur les ados, comme les nouvelles DDJSCS4 qui

 

s’intéressent tout particulièrement à la jeunesse. Pour autant, la qualité est toujours là car ces structures sont sous le regard des DDJSCS, des CAF et des P.M.I5 du conseil général. »

 

Evelyne Coggiola-Tamzali

 

 

1 A l’époque, cette Commission recherche action loisirs adolescent (CORALA) est propre au Val-de-Marne. Elle est composée de mouvements de jeunesse et d’éducation populaire (dont le comité Jeunesse au plein air du Val-de-     Marne), de la PMI du conseil général, de la CAF et de la DDJS du Val-de-Marne.

2  Caisse d’allocations familiales.

3  Brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur. 

4 Direction départementale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale.  

5 Protection maternelle infantile.

 

 

L'ACCUEIL EDUCATIF DES TOUT PETITS CE SONT AUSSI LES ACCUEILS DE LOIIRS  (ANCIENNEMENT CLSH)

 

Dans le département du Val de Marne, un collectif regroupant toutes les associations d'éducation populaire, la CAF et la

DDJS ont réfléchi et élaboré un cadre de référence pour les centres de loisirs maternels.

Ce document conçu en 2003  n'a pas pris une seule ride.

 

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CADRE DE REFERENCE POUR LES ACCUEILS

EN CENTRE DE LOISIRS MATERNEL

 

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  LE CENTRE DE LOISIRS MATERNEL

 

Ce cadre de référence vise à améliorer la qualité dans tous les centres de loisirs accueillant des enfants jusqu’à 6 ans, qu’ils soient spécifiquement maternels ou non.

Afin de remplir totalement son rôle au service des tout-petits et de leurs familles, le centre de loisirs qui accueille des enfants d’âge maternel doit pouvoir s’appuyer sur un document de référence, tout en garantissant la mise en place de la réglementation en vigueur et du code de l’Action Sociale et des Familles.

Pour cela, la commission "CORALA1

"

 vous propose ce document précisant les conditions et recommandations spécifiques à un accueil de qualité afin de répondre au mieux aux besoins et aux possibilités des tout-petits.

 

CONDITIONS ET RECOMMANDATIONS

 

- Emergence d’une réelle politique "petite enfance", c’est-à-dire :

 

  • un projet éducatif local énonçant les orientations éducatives et les principes d’actions contribuant à apporter une réponse adaptée aux besoins des enfants (2/4 ans, 4/6 ans) et des familles ;

  • un diagnostic s’appuyant sur la réalité sociale, la situation des publics, les problématiques, les ressources locales, lié à la petite enfance sur le territoire de la commune ;

  • un projet pédagogique, concrétisant les axes éducatifs et faisant apparaître les objectifs pédagogiques, les modalités d’accueil et d’évaluation du centre de loisirs maternel.

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- Prise en considération de l’importance des effets de la transition de l’espace familial ou du mode de garde vers le centre de loisirs, par :

 

  • la mise en place d’une passerelle entre le centre de loisirs et la crèche ou la garderie ;

  • la mise en place d’une réelle concertation entre les différents acteurs socio-éducatifs (directeurs, animateurs, parents, collectivités locales, associations, Education Nationale, CAF, PMI, DDJS) ;

  • la mise en place d’une relation étroite avec l’Education Nationale (complémentarité éducative) ;

  • la mise en place de modalités de prise en charge des enfants et d’accueil des parents et la définition des moyens mis en œuvre pour favoriser leur information et leur implication.

 

- Aménagement d’une structure spécifique, d’un cadre adapté avec des locaux sécurisés et sécurisants permettant le respect du rythme et des besoins de chaque enfant, par :

 

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  • l’organisation  d’un ou de plusieurs espaces calmes et de repos, isolés phoniquement et visuellement des espaces ludiques bruyants ;

  • l’organisation  d’un ou de plusieurs espaces d’expression motrice permettant à l’enfant une prise de risque maitrisée et la découverte de son corps ;

  l’organisation  d’un espace de repas au mobilier adapté à la taille des enfants et propice à la découverte ludique du goût et des aliments ;

  • l’aménagement de toilettes et de sanitaires spécialement conçus pour ces âges ;  

  • la mise en place de repères adaptés aux jeunes enfants (signalétique, couleurs, rituelsillus-3

 

  • l’acquisition de mobiliers, matériels et jeux adaptés à leur motricité et à leur psychologie.

 

- Une équipe d’encadrement compétente, qualifiée et en nombre adapté :

 

Avec un taux d’encadrement suffisant :

 

  • La norme impose un minimum d’un animateur pour 8 enfants selon la réglementation relevant du ministère de la Jeunesse et des Sports.

  • Recommandations de la commission CORALA :

* Un animateur pour 6 enfants favorisant ainsi un accueil et une animation de qualité personnalisés chez les 2/4 ans.

 

* Afin que le centre de loisirs accueillant des plus petits puisse mettre en œuvre des projets spécifiques, il est absolument nécessaire d’obtenir une stabilité des équipes éducatives afin que chaque enfant puisse identifier son animateur référent (équipe fixe minimum sur l’année).

 

* Créer un poste de coordinateur "petite enfance" qui serait le conseiller technique (profil, rôle et missions à définir) ou relais envers la PMI, DDJS et différents acteurs socio-éducatifs de la ville, poste qui pourrait être financé par la C.A.F dans le cadre du Contrat Enfance.

 

Un encadrement spécifique "petite enfance" est recommandé :

  • Avec au minimum un BAFA "petite enfance"2 ;

  • B.E.P sanitaire et sociale ou C.A.P petite enfance ;  

  • B.E.A.T.E.P "petite enfance" ( aujourd'hui BPJEPS) ;

  • E.J.E Educateur de jeunes enfants

1

2 Prise en charge par la C.A.F de la formation B.A.F.A "petite enfance"et des formations spécifiques dans le cadre du Contrat Enfance.

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12 novembre 2010 5 12 /11 /novembre /2010 20:56

Dernière ligne droite avant le colloque

 

1- INFORMATION
 
LES FINANCEMENTS CAF 
  
Vous trouverez en cliquant sur le lien suivant
la présentation par la CAF des financements petite enfance disponibles
C'est un document à faire connaître
 
2- LE COLLOQUE

Vous trouverez le programme détaillé et un bulletin d'inscription téléchargeable sur le site départemental du CDAFAL 77

là :

http://www.re3.freesurf.fr/20novi.pdf

 

A la suite de ce rappel, vous avez plusieurs contributions écrites, toutes de qualité  : dont celle d'Alain Bentolila

Pour les autres, celles de Catherine Nonnet-Huby, de  Frédéric Jésu, de Laurent Ott, d'Hubert Montagner et de Jean Paul Brighelli, il suffit de les chercher sur le blog, à la suite d'autres articles sur le film "le secret de Chanda" et le festival de l'engagement. 

 

 

A4 AFFICHE COLLOQUE 20 NOV

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11 novembre 2010 4 11 /11 /novembre /2010 13:43

Alain BENTOLILA vient de nous adresser un texte qu'il soumet à notre réflexion, c'est avec plaisir que nous portons à votre connaissance cette contribution.

Merci pour cet apport

 

Alain BENTOLILA

L’échec scolaire se noue très tôt

 

Il fut un temps ou la sélection était telle que l’on garantissait aux enseignants de leur « livrer » des classes, sinon homogènes, du moins raisonnablement hétérogènes : les « milieux de classe » étaient majoritaires et donnaient à l’ensemble une stabilité qui permettait d’avancer sans trop de chaos. Cette « hétérogénéité contrôlée » n’était pas simplement d’ordre social ; elle tenait au fait qu’une majorité d’élèves partageaient une certaine idée de l’école et étaient convaincus de la nécessité d’y venir. L’école était considérée comme un lieu particulier ; on s’y comportait de façon particulière. On en acceptait les règles, on se soumettait à ses rituels par crainte plus que par plaisir, mais sans exaspération. En bref, les élèves entraient en petit nombre en sixième en possédant les rudiments de leurs métiers d’élèves. Ajoutons que la régularité des contrôles et l’exigence des examens imposaient aux programmes clarté et pérennité. On y acquérait une culture et des savoirs communs, certes assez stéréotypés et rigides, mais qui constituaient des repères partagés et des signes de reconnaissance endogènes. « Paris vaut bien une messe », « Roland de Roncevaux », « le vase de Soisson » ne constituaient pas un paradigme de savoirs d’une exceptionnelle qualité mais, tous, nous partagions ces clichés et surtout nous savions où nous les avions appris et qui nous les avait appris.

Lorsque s’est levée la barrière d’une sélection qui, reconnaissons-le, était injuste et cruelle, un nombre considérable d’enfants, auparavant écartés, se sont trouvés précipités dans un système qui n’était pas conçu pour eux. Le filtre culturel et social ayant été retiré, l’école s’est trouvée mise au défi d’instruire des enfants de moins en moins éduqués : de l’école, on leur avait donné des représentations confuses et parfois négatives ; du langage, ils n’avaient acquis qu’une maîtrise très approximative ; en guise de repères culturels, très vite, ils n’ont eu que l’éclairage glauque d’une télévision de plus en plus débile ; quant à la médiation familiale, ils n’en connaissaient souvent que le silence, l’indifférence et, parfois, la violence. Ces « nouveaux écoliers » ont posé, année après année, à un système scolaire figé, un problème dont la gravité n’a fait que croître jusqu’à menacer aujourd’hui son intégrité.

Lorsqu’il fut décidé d’ouvrir largement les portes de l’école à tous les enfants de ce pays, nous avons collectivement pris l’engagement de les y recevoir tous tels qu’ils étaient : ceux issus de catégories sociales peu favorisées , mais aussi ceux de plus en plus nombreux « venus d’ailleurs », en équilibre culturel et religieux instable. Cet engagement ne pouvait être tenu au sein d’une école qui était construite pour accueillir des privilégiés préalablement triés. Il eût fallu que cette école se transformât en profondeur dans ses contenus, sa pédagogie, la formation de ses maîtres et ses finalités professionnelles. Elle est en fait restée quasiment identique à elle-même. Même si elle a donné le change en multipliant des filières qui n’étaient en fait que des voies de garage, elle a navigué entre complaisance et cruauté, maquillant l’échec en abaissant régulièrement ses ambitions et ses exigences. Si elle a réussi la massification de ses effectifs, elle a complètement raté sa démocratisation.

Aujourd’hui, à l'entrée au collège, 10 % des enfants se trouvent en situation de grande difficulté de lecture et encore bien plus d’écriture. Brutalement livrés à eux-mêmes dans la structure morcelée d’un collège « inique », ces élèves vont s'enfoncer, année après année, dans le long couloir de l'illettrisme. Ils vont vivoter pendant quatre ou cinq ans sans tirer le moindre parti de leurs études, et l'institution les passera par pertes et profits. L'école primaire les a maintenus en survie sans vraiment parvenir à les remettre à niveau ; le collège les achève. Il y a là comme une espèce de scandale. Ils ont toujours été en retard sur les compétences affichées. Ils ont souffert d'un déficit et d'une rigidité de langage à cinq ans ; ils ont acquis quelques aptitudes au décodage des mots à huit ans alors qu'il convenait de comprendre des textes simples ; ils sont difficilement parvenus à repérer quelques informations ponctuelles à douze ans quand on attendait qu'ils soient des lecteurs autonomes et polyvalents. Ils ont très tôt endossé le costume de l'échec et ne l'ont plus quitté..

Mais ne pensez pas que seuls les 10 à 15 % de futurs illettrés sont en divorce scolaire ; le nombre des désenchantés augmente régulièrement, lassés par une scolarisation qui ne leur semble plus « à leur goût ». Un immense malentendu s’est en fait noué au fil des années entre une école qui ne sait plus quoi inventer pour tenter de séduire, de rassembler et de fidéliser sa clientèle et un groupe de plus en plus important de « non-convaincus » qui ne comprennent pas bien ce qu’ils font là et qui, pour beaucoup, préféreraient être ailleurs. Quand on en vient à soudoyer les élèves pour qu’ils daignent faire preuve d’un peu d’assiduité, c’est que l’on a renoncé à croire à la naturelle nécessité de l’éducation. L’absence de repères linguistiques et culturels fièrement affichés, le renoncement à montrer que le beau et le vrai ne se négocient pas, l’affichage complaisant d’un « plaisir d’apprendre » effaçant l’idée même de l’effort et du dépassement, l’abandon enfin de toute évaluation rigoureuse et honnête ont peu à peu affaibli pour certains parents et pour bien des élèves la légitimité de l’école. Ils sont passés de « nous ne sommes pas fait pour les études » à « ces études ne sont pas faites pour nous ». De la mise en cause de leurs propres capacités, ils en sont venus au refus de s’approprier les connaissances et les valeurs que l’école publique propose. Ce nouveau slogan réunit alors non plus seulement ceux qui ont de la difficulté à apprendre, mais ceux qui s’engagent dans un divorce collectif prononcé aux seuls torts de l’école. L’appel tribal à la « désaffection scolaire » est ainsi entendu bien au-delà des 10 à 15 % d’élèves qui errent pendant une douzaine d’années dans le long couloir de l’illettrisme. Cet appel est reçu et souvent reconnu par une partie non négligeable de la classe moyenne de nos élèves, c’est-à-dire ceux dont l’origine sociale et culturelle ne devrait pas, en principe, rendre la scolarité difficile. Notre école voit ainsi la faille culturelle qui la traverse s’agrandir ; elle perd peu à peu l’adhésion de sa « clientèle naturelle », celle qui assure son équilibre didactique. Tout se passe comme si un certain nombre d’enfants – socialement bien lotis – éprouvaient ensemble le sentiment d’une immense lassitude scolaire : la conviction que la langue, les savoirs et les savoir-faire proposés sont en total décalage avec leur vie ; la certitude que les contraintes et les obligations imposées n’équilibrent pas les bénéfices qu’on peut attendre d’une école dégradée comme est dégradée l’image de ses professeurs bien maltraités par le système. C’est alors que la tentation de « laisser tomber » les fait rejoindre les rangs de ceux dont l’appartenance sociale a malheureusement programmé l’échec. Une étude très récente sur l’absentéisme des collégiens montre de façon très nette que le taux d’absentéisme non motivé n’est corrélé ni avec la catégorie socioprofessionnelle des familles ni avec les résultats scolaires. En d’autres termes, ce ne sont pas seulement des élèves en situation de précarité et d’échec qui « sèchent » les cours ; le manque d’envie est très largement partagé par tous ceux qui constituent la classe moyenne désenchantée des scolarisés. Ce sont tous ces élèves, qui sortiront du système éducatif, une fois leur « temps scolaire » accompli, sans le moindre diplôme et pour la moitié d’entre eux illettrés. Ils constituent, rappelons le 20% d’une classe d’âge.

 

Les difficultés linguistiques se nouent très tôt, et induiront de graves inégalités de lecture et d’écriture. Un enfant n’apprend pas à parler plusieurs fois. Dés l’enfance, dans la famille et à l’école maternelle, il doit être amené à découvrir les enjeux de la communication humaine. Il va avoir besoin qu’on lui fasse comprendre ce que parler veut dire : Le droit de laisser une trace de lui-même sur l’intelligence d’un autre mais aussi le devoir de précision et d’organisation afin d’être compris au plus juste de ses intentions. C’est très tôt que lui sera donné le goût de l’Autre. Le goût d’élire l’Autre -parce que différent- comme celui avec lequel il aura à passer des conventions qui porteront vers lui sa pensée singulière avec une chance qu’il ne la trahisse point. Dés l’instant où un bébé vient au monde, dés ses premiers regards, dés ses premiers gestes, il s’engage sur la voie de la « signification pour l’Autre ». Gestes ritualisés, qui gagnent en constance et en conventionnalisation, sont les premières tentatives de faire de l’autre son partenaire de sens. Des signaux aux signes, des signes aux mots, des mots aux phrases, se dessine la voie de la communication humaine à laquelle la langue donnera toute sa puissance et toute sa liberté. Pour que le pouvoir linguistique soit au bout du chemin, un enfant devra pouvoir s’appuyer sur des médiateurs qui l’aideront à sortir du pré carré de la familiarité et de la connivence pour s’adresser à ceux qu’il connaît moins pour leur dire des choses qui ne leur sont pas familières; car tel est le vrai défi de l’apprentissage de la langue. Pour le relever il aura besoin qu’on l’aide à analyser ses échecs et à les transformer en conquêtes nouvelles ; parents et enseignants devrons lui rappeler sans cesse qu’au jeu du langage, c’est l’étranger qui est son partenaire privilégié et l’étrange son sujet d’élection. Plus il affirmera sa volonté de repousser jour après jour les limites du connu et plus il mettra courage et envie dans l’apprentissage d’une langue forte et précise. C’est en effet parce qu’on lui aura donner le désir d’élargir le cercle de ceux à qui il s’adresse et celui des sujets qu’il ose aborder qu’un jeune enfant consentira des efforts pour acquérir un vocabulaire plus riche, des structures plus complexes.

Ces enjeux, un petit enfant ne les découvre pas tout seul ; c’est à l’occasion des premiers échanges que sa mère puis sa maitresse pourront lui montrer que si la conquête du verbe mérite d’être tentée, c’est parce qu’il peut en tirer un bénéfice personnel. Lorsqu’un enfant leur raconte quelque chose qu’elles ne comprennent pas ou qu’elle comprennent mal, il faut qu’elles le lui disent. La crainte de le bloquer ou de lui faire perdre confiance ne doit surtout pas les amener à lui mentir. Rien n’est pire que de faire croire à un enfant qu’on l’a compris lorsque cela n’est pas vrai. Ce serait le tromper et l’empêcher d’avancer. Ce serait lui dire qu’en fait, sa parole ne compte pas pour sa maman, que comprendre ce qu’il dit l’indiffère. En matière d’apprentissage, l’échec révélé et analysé est un formidable moteur - à condition, bien sûr, d’accueillir les tentatives maladroites avec autant de douceur que de fermeté.

Les enfants qui n’ont pas eu la chance qu’on leur dise un jour : « Je ne t’ai pas compris, mais je veux t’aider à te faire mieux comprendre…» sont privés de l’impulsion nécessaire à la maîtrise progressive du langage. Car, il faut le comprendre, un enfant de trois ou quatre ans croit dur comme fer que l’on peut « voir » ce qui est dans sa propre tête. Mieux, il est persuadé que son intelligence et celles de sa mère ne font qu’une. Si sa mère lui dit qu’elle ne l’a pas compris, c’est certainement, pense-t-il, parce qu’elle refuse de le comprendre ou qu’elle y met beaucoup de mauvaise volonté. Autrement dit, si elle ne le comprend pas, c’est qu’elle ne l’aime pas à la hauteur de ses attentes. Pour cet enfant, fusion affective et fusion intellectuelle vont de pair. Toute tentative de distanciation intellectuelle est ressentie comme un déchirement affectif. L’enjeu est donc d’affirmer en même temps et avec une égale fermeté l’altérité intellectuelle de son enfant et l’affection qui les lient : « Je t’aime, MAIS je ne t’ai pas compris. Je te dis que je ne t’ai pas compris, PARCE QUE je t’aime. »

La mère qui indique à un enfant qu’elle ne l’a pas compris doit donc lui dire aussi que, par-dessus tout, il lui importe de le comprendre. En lui disant « je n’ai pas compris », la mère lui fait comprendre une chose essentielle : lui qui n’a que trois ans ou quatre sait des choses que sa mère ne sait pas encore, et la langue est justement faite pour dire à quelqu’un d’autre ce qu’il ignore encore. Cette distance intellectuelle que la mère puis la maitresse imposent à l’enfant n’altère en rien l’immense affection qu’elles lui portent car cette séparation intellectuelle nécessaire est douloureuse pour l’enfant ; elle doit se faire dans la tendresse et la bienveillance et signifier clairement : « je veux te comprendre ». On devra amener l’enfant à expliciter certains des éléments de ses messages afin que s’ouvrent, l’une après l’autre, les fenêtres qui en éclaireront le sens pour elle, sa mère, mais surtout pour les autres. L’enfant aura ainsi l’infinie satisfaction d’avoir acquis le pouvoir d’inscrire dans l’intelligence des autres une trace qui n’appartient qu’à lui, d’enrichir leurs mémoires d’une histoire, d’un sentiment qui n’y étaient pas auparavant. Il aura ainsi la preuve tangible d’une influence accrue sur les autres qui légitime tous ses efforts de mise en mots justes et précis et l’encourage au surpassement.

Certains enfants ont la chance qu’on leur donne le goût de l’exigence, l’appétit de la précision ; d’autres se réfugient dans le flou et le banal pour ne pas s’exposer, pour ne pas se dévoiler à un monde qu’ils pensent indifférent ou hostile. Cantonnés à une communication de stricte connivence, ils se sont repliés sur un vocabulaire flou et réduit. Car plus on connaît quelqu’un, plus on a de choses en commun avec lui et moins on aura besoin des mots précis pour communiquer ensemble. En bref, si un enfant ne s’adresse qu’au petit cercle de ceux qui lui ressemblent, qui ont les mêmes références culturelles, qui appartiennent au même milieu social, cela « ira sans dire ». Il n’aura pas besoin de mettre en mots précis et soigneusement organisés sa pensée. Il partage avec ses alter ego tellement de choses, il subit une telle proximité, il limite tellement les contenus de ses échanges que l’imprécision devient la règle d’un jeu linguistique rétrécis dont les enjeux et les ambitions ne lui ont pas été clairement transmis. Personne n’a dit à cet enfant sans repère que la langue est faite pour le hisser au sommet de ces montagnes où se raréfie l’oxygène du « déjà vu »  et du « déjà su »; là où il ne rencontrera que quelques rares silhouettes indistinctes avec qui l’idée même de l’échange est un défi ; là où les mots peinent à porter une charge si lourde qu’ils ont sans cesse la tentation d’abandonner la partie, pour laisser place à l’indifférence et à la violence. Personne ne l’a équipé pour cette douloureuse et merveilleuse escalade.

C’est la qualité de l’accompagnement familial puis scolaire qui conditionne la réussite de l’apprentissage linguistique d’un enfant. On ne s’en exonère pas en lui achetant un jeu ou un logiciel, ou en le collant devant une émission de télévision fut-elle éducative. Un des droits fondamentaux du petit enfant est qu’on porte une attention constante à ce qu’il dit. Il a besoin qu’on lui donne régulièrement des mots nouveaux ; il veut voir dans les yeux de l’adulte que l’on accueille avec vigilance ses tentatives parfois maladroites mais toujours signifiantes. Il demande que l’on s’engage à ses côtés, avec autant de bienveillance, d’exigence que de constance… C’est cette présence attentive, cette écoute affectueuse et lucide, cette parole qui alterne connivence et distance dont sont privés bon nombre d’enfants quelque soit leur appartenance sociale. Une des mutations les plus importantes de notre société tient au fait que les familles sont amenées à confier beaucoup plus tôt qu’auparavant leurs enfants à d’autres. Il ne s’agit pas de le déplorer ; il est vain de regretter avec nostalgie l’heureux temps où tous les petits enfants bénéficiaient plus longtemps de la chaleur du foyer familial. La seule question qui mérite d’être posée est la suivante : comment assurer, à un moment crucial du développement d’un enfant, une qualité d’accueil et d’accompagnement qui lui donne les meilleures chances d’épanouissement ?

Parlons clair ! La conquête par les femmes des postes de responsabilités au plan professionnel, associatif et politique est sans aucun doute la meilleure chose qui pouvait arriver à notre société toute entière. Encore faut-il que cette émancipation soit accompagnée de mesures sociales telles qu’une mère ne soit pas déchirée entre des obligations professionnelles exigeantes et sa volonté de donner à son enfant le temps d’affection, d’écoute et de compréhension qu’elle sait indispensable à son épanouissement. Nous, pères, maris ou compagnons, n’avons pas voulu ou su compenser la juste prise de responsabilités de nos compagnes ; dans la plupart des cas, nous n’avons rien ou très peu changé à nos ambitions professionnelles et à nos habitudes de vie. Il m’apparaît injuste et scandaleux qu’une femme ne puisse pas conjuguer avec sérénité son travail et son rôle de mère-médiatrice. Au lieu d’avoir octroyé à tous les Français des loisirs supplémentaires à travers la loi limitant le temps de travail à 35 heures, j’aurais préféré que l’on fasse un effort significatif pour permettre aux mères (ou aux pères d’ailleurs) de jeunes enfants de partager leur temps entre leur profession et l’éducation de leurs petits, et ce, avec l’assurance totale que ce partage ne nuirait en rien à l’avancement de leur carrière. On ne peut pas condamner un tout petit enfant à ne voir sa mère qu’une heure à peine par jour pendant la semaine ; on ne peut pas condamner une mère à laisser toute la journée son enfant à des gens qui ne pourrons pas jouer un rôle de médiateur dévoué et attentif. Il est bien beau de parler de parité, mais si cette juste cause n’est pas portée par des mesures qui garantissent aux femmes un équilibre serein entre l’accompagnement de son petite enfant et sa responsabilité professionnelle, elle restera un simple mot d’ordre et cachera mal une très profonde injustice.

Et, pour couronner le tout, les grands-parents, en bien meilleure forme qu’auparavant et beaucoup plus sollicités, sont moins disponibles, et ne peuvent apporter à leurs petits-enfants cette présence rassurante et apaisante de la « génération d’avant ». L’accélération de plus en plus importante de l’obsolescence des mots est due en grande partie au fait que les grands parents ont moins qu’auparavant, l’occasion de passer leurs mots plus anciens à leurs petits-enfants. En bref, la transmission du vocabulaire se fait de moins en moins bien, entraînant un appauvrissement de génération en génération.

Nous vivons donc une époque où la médiation familiale, pour les meilleures raisons du monde, s’affaiblit et vient à manquer au moment où justement l’enfant en a le plus besoin dans son développement. La question qui se pose alors est : Qui prend le relais ? Ou, en d’autres termes, que fait-on des petits enfants de notre pays ?

L’école n’apporte pas actuellement une réponse satisfaisante et honorable à ces enfants de deux ans qui sont à un moment crucial de leur développement linguistique. Comment peut-on en effet imaginer que 30 enfants réunis dans une salle de 50 à 60m2, confiés aux bons soins d’une institutrice qui n’a pas été formée pour cela, puissent trouver des conditions favorables à leur développement psychologique, linguistique et social ? L’école fournit aujourd’hui une très mauvaise réponse à une vraie question posée par de profondes mutations culturelles et d’importantes transformations dans l’organisation familiale. Disons le clairement, ce n’est pas sa véritable mission.

L’indifférence et le cynisme avec lesquels les politiques ont traité la question de l’accueil des petits enfants de ce pays, sont responsables de l’insécurité linguistique dans laquelle se trouvent certains d’entre eux plus tard. Notamment, bien sûr, ceux qui ne trouvent pas à la maison l’accompagnement attentif d’un adulte qui saura, lorsqu’il le faut, lui dire qu’il ne l’a pas compris mais qu’il existe des moyens linguistiques de se faire comprendre. Car la garde n’est pas la même pour tous : qu’y a-t-il de commun entre un petit enfant que sa mère dépose la mort dans l’âme à sept heures et demie le matin pour le récupérer à dix-huit heures et celui qui ne passe à l’école ou chez une nounou qu’une demi-journée de temps en temps ? C’est pour le premier que l’incurie et l’absence d’imagination de l’état, des collectivités et des entreprises met en danger son développement linguistique et intellectuel.

Si tout ne se joue pas de zéro à quatre ans, force est de constater que c’est à cette période de l’enfance que se construit la signification de l’acte de parole et de compréhension. C’est la que se prennent les bonnes et les mauvaises habitudes de communication. C’est là que se forge le courage et la volonté d’être compris et de comprendre l’Autre aussi différent, aussi éloigné soit il. Je tiens les insuffisances de médiation familiale et scolaire que subissent certains enfants dans les premières années de leur vie pour être en partie responsables des insupportables inégalités linguistiques qui mettent en danger leur parcours scolaire et leur intégration sociale.

 

Il faut aussi fortifier l’école maternelle car elle constitue la seule réponse à un problème aujourd'hui posé par bien des élèves de trois à cinq ans : bien des enfants de langue maternelle française, de parents francophones, arrivent en effet à l'école avec une langue orale très éloignée de la langue qu'ils vont rencontrer en apprenant à lire et à écrire. Ne craignons pas de le dire, ils parlent une langue étrangère à celle sur laquelle va reposer leur apprentissage de la lecture et de l'écriture. Le langage dont disposent certains élèves à la veille d'entrer au cours préparatoire est ainsi incompatible dans ses structures même avec une entrée sans rupture dans le monde de l'écrit. Ces inégalités sont d’autant plus préoccupantes que nous savons aujourd’hui qu’un déficit grave de vocabulaire risque de perturber gravement l’apprentissage de la lecture. À six ans, quand il arrive au cours préparatoire, un enfant est censé avoir construit dans sa tête un répertoire de quelque de 1 500 mots oraux. Cela lui permet, lorsqu’on lui parle, de reconnaître le « bruit d’un mot » et d’en comprendre le sens en interrogeant ce petit dictionnaire mental oral. Dès le début de l’apprentissage de la lecture, on va lui apprendre à traduire en sons ce qu’il découvre en lettres. Il va donc pouvoir faire appel à son dictionnaire de mots oraux pour avoir le sens d’un mot écrit qu’il a appris à déchiffrer. C’est pourquoi la maîtrise des relations entre lettres et sons est une composante indispensable de la démarche d’apprentissage de la lecture. Il faut savoir que, dans tout texte français écrit, un lecteur peut établir, sans risque de se tromper, les relations de 85 % des lettres avec les sons qui leur correspondent respectivement, pour peu que l’on ait pris la peine de lui apprendre à maîtriser ces correspondances. Prenons un exemple.

Vers la fin du premier trimestre du cours préparatoire, Un enfant « tombe » sur le mot « carrelage » qu’il n’a encore jamais rencontré à l’écrit. Par contre, sa maîtresse lui a appris que chacune des lettres ou chaque groupe de lettres composant un mot correspond respectivement à un son de la langue, et ce dans un ordre et une combinaison particulière. Il va donc, pas à pas, construire le signifiant phonique du mot « carrelage » non pas pour « faire le bon bruit » correspondant à la combinaison graphique, mais parce ce que ce bruit reconstitué représente pour lui la clé d’accès au sens. Il sait que la lettre C (lorsqu’elle est suivi de A) se prononce /K /; que la lettre A se prononce /A / ; Que RR renvoie au son /R/ ; E à /E/ ; L à /L/ ; A à /A/ et G à /J/( si suivi de E). En découvrant sous les neuf lettres de « carrelage » les sept sons /KARELAJ/ dans leur arrangement syllabique, il va pouvoir interroger son « dictionnaire mental » afin d’obtenir le sens qui correspond à cette combinaison phonique. En d’autres termes, le « bruit du mot » ainsi reconstitué va lui permettre de s’adresser à ce dictionnaire mental, qui est celui qui lui permet de comprendre les discours oraux, en lui demandant : « Y a-t-il un abonné au numéro que je demande ? », et ce dictionnaire lui livrera le sens du mot écrit qu’il vient de découvrir, sans qu’aucun adulte n’intervienne. Le déchiffrage est conçu pour être la clé d’un accès autonome au sens.

On comprend alors l’importance décisive de la quantité et de la qualité du vocabulaire qu’un enfant possède avant qu’il apprenne à lire. Si l’enfant ne possède qu’un nombre très restreint de mots souvent peu précis, alors son dictionnaire mental lui répondra le plus souvent : « Il n’y a pas d’abonné au numéro que tu as demandé. » Et à force de ne pas recevoir de réponse à sa question, l’enfant risque d’en déduire « qu’il n’y a jamais d’abonné », c’est-à-dire qu’il n’y a aucun sens derrière le bruit qu’il a construit. Ce n’est donc pas le fait de déchiffrer qui est responsable d’une lecture dépourvue d’accès au sens, c’est le déficit du vocabulaire oral qui empêche l’enfant d’accéder au sens des mots écrits. La traduction en sons des lettres ou groupes de lettres n’a d’autre but que d’interroger le dictionnaire mental qu’il a constitué pour comprendre ce qu’on lui dit. La pénurie de vocabulaire oral ne permet pas à l’apprenti lecteur d’accéder au sens des mots écrits justement parce qu’ils ne figurent pas dans son stock langagier. Faute d’un vocabulaire suffisant, la maîtrise du code écrit le conduit alors à produire uniquement du bruit et non du sens, ce qui, on en conviendra, n’est le but de la lecture. Ne l'oublions pas, apprendre à lire n'est pas apprendre une langue nouvelle, c'est apprendre à coder différemment une langue que l'on connaît déjà à l’oral. Si un enfant se trouve enfermé dans un usage restreint du vocabulaire et de la syntaxe il se trouve d'emblée coupé de la langue écrite. La famille et l’école doivent à tous les enfants une sécurité et une richesse de vocabulaire qui leur permettent, une fois élucidés les mécanismes du code écrit, d’interroger leur dictionnaire mental pour accéder au sens de mots qu’ils ont appris à déchiffrer. Si l’on n’y prend garde, un enfant qui souffre d’un déficit sérieux de vocabulaire à l’entrée au cours préparatoire aura beaucoup de difficulté à apprendre à lire, et ce quelle que soit la méthode de lecture qui sera utilisée.

Porter un élève vers une bonne maîtrise du langage oral en enrichissant son vocabulaire, en l’aidant à ciseler ses phrases, c’est certainement le meilleur moyen de le préparer à apprendre à lire ; c’est aussi la meilleure façon de le lier aux siens et aux autres.

 

 



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10 novembre 2010 3 10 /11 /novembre /2010 16:46

 

LE FILM "LE SECRET DE CHANDA"

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http://www.familles-laiques-de-vaux-le-penil.fr/article-cinema-le-secret-de-chanda-56803742.html

 

L’avant-première aura lieu le mardi 23 novembre à 20h au Max Linder (24, boulevard Poissonnière – 75009 Paris )

 : Grands Boulevards

Parking : Rex Atrium – 7 rue du faubourg Poissonnière

Nous pouvons disposer de places avant-première, si vous désirez pouvoir disposer de places, contactez le siège de l'association

 

FICHE PEDAGOGIQUE

 

Le Secret de Chanda” est un film qui permet une véritable exploitation pédagogique en classe, et plus particulièrement en direction des élèves des deux premiers cycles du collège (11 à 14 ans). Ce long-métrage donne plusieurs clés de compréhension pour mieux appréhender l’Afrique du Sud contemporaine et prendre conscience des ravages du SIDA sur le continent africain. Ce film est ainsi vecteur de connaissances à la fois géographiques et culturelles, et favorise aussi le dialogue sur la prévention du SIDA. Il devrait permettre de s’interroger sur les préjugés et les tabous qui entourent la maladie dans nos sociétés. Enfin, le personnage de Chanda, auquel les élèves pourront s’identifier, peut servir de modèle par son courage, son dévouement sans faille et sa lutte personnelle pour rétablir la vérité.

Les connaissances préalables au visionnage du film :

 

* Situer l’Afrique du Sud sur un planisphère ou une carte, expliquer ce qu’est un township.

* Faire des recherches sur le virus du SIDA, les différents facteurs de transmission et les moyens de prévention, évoquer les médicaments qui permettent aujourd’hui de lutter contre le VIH.

* Éventuellement faire lire le roman ou des extraits du roman à la classe pour que les élèves s’interrogent sur son adaptation à l’écran.

En aval, un questionnement permettra de compléter ces notions et d’en faire émerger de nouvelles, tout en laissant les élèves trouver les réponses et construire eux-mêmes leur savoir à partir des éléments du film.

Exemples de questions : “Pourquoi Chanda est-elle mise à l’écart par les habitants du village ? Pourquoi le mot SIDA n’est-il jamais employé ?” “Comment comprenez-vous les difficultés de l’amitié entre Chanda et Iris ?” “Jusqu’où seriez-vous prêt à aller pour rétablir la vérité ?”

Les notions à faire émerger :

* L’absolue nécessité de parler des dangers du SIDA et de lutter contre sa propagation en Afrique du Sud et dans le reste du monde.

* Les risques de l’obscurantisme et des traditions comme sources de repli sur soi et de négation d’une réalité sociale.

* La cellule familiale face au reste de la société.

* L’avenir des enfants du tiers-monde et en particulier des orphelins.

Le pari de ce film consiste à évoquer de manière à la fois émouvante et réaliste le destin d’une adolescente qui se bat pour que la réputation de sa mère ne soit pas bafouée. Si le SIDA est au coeur de l’histoire, ce n’est pas un film sur les victimes du virus. C’est un film sur le passage à l’âge adulte, et c’est ce qui le rend universel.

 

DU LIVRE AU FILM : L’ADAPTATION CINÉMATOGRAPHIQUE

 

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Adapter un livre au cinéma est toujours un défi. En effet, le pouvoir des mots sur l’imagination du lecteur est extraordinaire, car absolument unique. C’est une immersion individuelle. Chaque lecteur projette des images spécifiques, qui n’appartiennent qu’à lui, à partir d’un même texte. En résumé, la façon de “vivre” un livre est éminemment subjective.

Le travail d’adaptation consiste à essayer de retranscrire de manière la plus fidèle possible ce qui fait l’essence du livre, en utilisant les techniques de narration propres au cinéma. Le réalisateur explique sa démarche : “Le roman est écrit à la première personne.

Mais, j’ai préféré privilégier la force des images et le jeu de l’actrice à une voix-off qui aurait commenté l’action pour donner accès à la pensée de Chanda. Pour la cohérence du film, il a aussi fallu changer son âge. Si dans le livre elle a seize ans, en réalité, à cet âge là, les jeunes sud-africains ont déjà perdu leur caractère d'enfant.”

 

LE SILENCE QUI TUE DANS LES COLLINES” PAR JEAN-PHILIPPE RÉMY

 

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Extraits d'un article du journal , paru le samedi 19 juin 2010

Joyce Mshali parle de ses enfants. De la peur qu'elle a de les voir emportés

par la maladie qui fauche les collines du Kwazulu-Natal. […] Joyce Mshali a

déjà perdu un fils. Son aîné. Veuve, elle voudrait protéger ses trois autres enfants.

Mais, pour cela, il faudrait commencer par en discuter. Et cela, on n'y

parvient pas dans la famille. Joyce a bien essayé de discuter avec son fils :

Il rit et il parle d'autre chose”, se désole-t-elle. “Les jeunes ne veulent pas

parler de ça, parce qu'ils seraient obligés de reconnaître qu'ils ont plusieurs

partenaires.”

[…] Avec son second fils comme avec sa fille aînée, qui a déjà un bébé, la loi

du silence n'est pas imposée par la mère, mais par les enfants, qui avancent

que la “honte” les empêche d'aborder le sujet. Ce silence est le tourment de

Joyce Mshali : “Quand mon fils est tombé malade, je ne savais pas ce qu'il

avait, j'étais ignorante. Quand j'ai compris, c'était trop tard, et il est mort. Je

ne veux pas que cela arrive avec les trois autres.”

[…] Pour Tenjiwe, sa fille cadette de 18 ans, Joyce a repris d'autorité une

vieille tradition tombée en désuétude, celle des tests de virginité, pratiqués

désormais dans la région afin de lutter contre le sida. […] C'est le jour où

passe une représentante d'une organisation, Humana, spécialisée dans la

prévention du sida dans ces collines où le chômage frappe durement. Organisés

comme une armée, avec uniforme rouge vif, casquette et grades allant

jusqu'au “commandant de division”, les membres de l'organisation tentent

de faire du porte-à-porte pour livrer une guerre qui semble perdue chaque

jour. […]

Une des membres, Florence, tente de lire à voix haute un petit livret sur la

prévention. Ses paroles flottent dans l'air, tandis que chacun dans la pièce

semble regarder ailleurs. Une fois sortie, la jeune femme avoue : “Dans la

plupart des maisons, dès qu'on aperçoit nos casquettes rouges, les portes

se ferment, on nous crie de nous en aller. Quand on entre quelque part, les

voisins déduisent qu'il y a une personne infectée dans la maison.”

Après les années de déni, la question du sida est à présent prise à bras-lecorps

en Afrique du Sud. Les traitements sont disponibles, une campagne

nationale engage à se tester. [...] Dans les collines du Kwazulu-Natal, on se

prend à espérer malgré le poids des silences.

 

LE ROMAN

 

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La première parution du roman “Le Secret de Chanda” aux Etats-Unis date de 2004. Le livre remporte   de nombreux prix et devient un best-seller dans onze pays. En France, il paraît aux éditions Bayard

en 2006.

Dans le livre, Chanda, seize ans, découvre non seulement l'omniprésence de la mort dans certaines régions

du sud de l'Afrique, mais aussi le fait que personne dans son entourage n'ose parler ouvertement de l'origine

de ces décès : le SIDA. “Le Secret de Chanda” raconte l'histoire d'enfants que la vie force à devenir responsable

beaucoup trop tôt, et qui ne connaîtront jamais une enfance normale.

 

LE FILM

 

Le réalisateur du film est né en Afrique du Sud. Il a connu l’époque de l’Apartheid (qui signifie “séparation” en afrikaans et s’est concrétisé jusqu’en 1991 par la ségrégation raciale entre noirs et blancs) puis celles de la transition et de la “réconciliation”, avant de s’installer en Allemagne. Il explique qu’en Occident, les gens

ont tendance à faire des généralisations hâtives quand ils parlent de l'Afrique. Avec Le Secret de Chanda”, il a voulu être très réaliste pour que les spectateurs aient un aperçu plus juste de son pays. Par exemple, le film a été tourné dans un village et à l’intérieur de maisons qui existent vraiment. Les acteurs auraient aussi pu

jouer en anglais, mais ils parlent en Pedi, un dialecte local.

 

LES VÉRITABLES VECTEURS DE PROPAGATION DU SIDA :

NON-DITS & TABOUS

 

Je me rappelle que maman me conseillait de garder ma colère pour combattre l'injustice.

Désormais, je sais ce qui est injuste : le silence qui règne autour du sida.”

Cet extrait du roman résume la souffrance de Chanda. Personne n’ose admettre que Lillian, sa mère, est séropositive. Sa maladie est tellement honteuse qu’on ne peut même pas prononcer son véritable nom : le SIDA. Pour Madame Tafa, leur voisine, sa mère subit un “châtiment divin”. Ce déni est accentué par l’ostracisme

dont Lillian est victime. Sa soudaine et mystérieuse disparition, sous prétexte que la maison a été envoûtée” est en réalité un bannissement de la communauté. Petit à petit les préjugés, la superstition et l’obscurantisme infestent le village, le transformant en un lieu où règnent l’intolérance et la haine. Enfin, même le recours à la

science s’avère être un long combat, car des médecins charlatans profitent du désarroi et de l’ignorance de la population pour manipuler leurs patients.

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9 novembre 2010 2 09 /11 /novembre /2010 06:58

Ca y est, c'est parti !

 

Le Service Culturel de la Ville de Vaux le Pénil, à partir de la pièce de théâtre " Sacco et Vanzetti" programmée le vendredi 26 novembre prochain à "La Grange" de la Ferme des Jeux, a eu l'idée de créer une manifestation autour de l'engagement..

Amnesty International, la Ligue des Droits de l'Homme et le Rochetons, sollicités, ont acceptés de participer. Notre Association et celle de "La Ferme des Jeux", ont décidé d'apporter leur soutien à cette manifestation.

C'est ainsi que sur ce thème " (Sans) Avec engagements de votre part", 3 séances cinéma sont programmées, ainsi qu'une soirée Café Philo, et en clôture la pièce citée plus haut entre le 8 et le 26 novembre vont avoir lieu.

 

Ce festival a donc débuté hier soir avec la projection du film "La Révélation" présenté par Amnesty International.

Un film riche d'enseignement sur le focntionnement et les procédures du Tribunal International, mais aussi sur les différentes tractations, négociations pour concilier à la fois, la justice vis à vis des crimes commis et celle à rendre aux victimes, et les intérêts politiques et économiques des pays, principalement, comme le traitait si bien ce film, au sein de la communauté européenne.

Les échanges qui ont suvi la projection du film ont été intéressants.

 

Nul doute que les programmations suivantes seront aussi intéressantes. Aussi ne manquez pas les prochains rendez-vous

  • Mardi 16 novembre à 20h30 : "Solutions locales pour un désordre local" fim de oline SERRAULT, soirée pilotée par Attac 77 Sud
  • Lundi 22 novembre à 20h30 : "Les arrivants", film documentaire de Claudine BORIES et Patrice CHAGNARD, présenté par le Rocheton et le Ligue des Droits de l'Homme
  • Jeudi 25 novembre à 20h30 : "D'où vient notre besoin de justice ?", débat animé par Anne-Marie CLAIRE, professeure de philosophie
  • Vendredi 26 novembre  à 20h45 : "Sacco et Vanzetti"

N'hésitez pas à aller sur les sites de la ville de Vaux le Pénil, de la Ferme des jeux, pour avoir plus de renseignement.

 

Patrice THEVENY

Président de Familles Laïques de Vaux le Pénil

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8 novembre 2010 1 08 /11 /novembre /2010 17:08

 

Pourquoi, pour mes petits enfants, préférerai-je toujours l’École Maternelle aux Jardins d’éveil

 

 

Suite aux « accords de Lisbonne » visant à harmoniser les systèmes éducatifs européens, l’École Maternelle française s’est vue récemment « chamboulée » dans ses fondements puisque la France est, avec la Pologne, l’un des seuls pays d’Europe à accueillir les enfants de deux à onze ans dans les Écoles et à confier leur éducation à des Professeurs des Écoles dont la durée de formation est de cinq ans après la fin des études secondaires.

 

La « bousculade » de cette vénérable Institution française (qui aura 130 ans en 2012) fut complétée  par la « directive Services pour le marché intérieur » qui autorisait la mise en concurrence des services. Le gouvernement français ayant inclus à ces services dorénavant soumis à la concurrence ceux concernant la Petite Enfance1, une « école maternelle d’état », gratuite, faussait d’emblée cette concurrence et garantissait l’échec de tous ceux qui auraient cherché à « investir dans un secteur porteur »…

 

Enfin, la diminution programmée du nombre de fonctionnaires d’Etat devrait finir par atteindre ses limites dans l’Éducation Nationale, surtout si la France continue à caracoler en tête des statistiques sur les taux de natalité. Il allait peut-être falloir commencer à songer à s’attaquer aux « forces vives » puisque les « fonds cachés » (remplacements, éducation spécialisée, options rares) arriveraient nécessairement à épuisement. Bien présenté, à grands renforts d’avis de « spécialistes », en y adjoignant quelques hochets chatoyants, le recul de l’âge d’accueil en maternelle pouvait même passer pour une œuvre de salut public.

 

Les Jardins d’éveil étaient nés ! Pensez donc, une structure « passerelle », au personnel « spécialisé », facilement implantée à l’initiative de quiconque « s’intéresse » aux tout-petits, aux objectifs « adaptés » à l’environnement local, quel avantage par rapport à un vieux mammouth poussif et poussiéreux de bientôt cent trente ans d’âge !

 

Un premier bouchon fut lancé, on instaura des partenariats avec certains départements ou communes volontaires, une secrétaire d’État vanta le projet, vint se promener au milieu de petits enfants joyeux devant des caméras de télévision.

 

On s’écharpa aussi ! Sinon, ce ne serait pas drôle. On laissa s’exprimer les passéistes, ceux qui refusent d’admettre que le débat académique sur la construction européenne et sur l’influence des règles du néolibéralisme sur la vie de tous les jours est dépassé. On rit beaucoup, on promit que si l’expérimentation n’était pas concluante, on l’abandonnerait et, discrètement, on n’en parla plus. Plus du tout. Même à la rentrée des classes, lorsque tous les journaux télévisés font leur une sur les bambins passant pour la première fois le seuil de la Petite École, celle que nous avons toujours connue, laïque et gratuite, si ce n’est obligatoire, comme sa grande sœur.

 

Il faut être  « de la boutique » pour apprendre par hasard, même les syndicats enseignants n’en parlent pas, au détour d’une conversation entre collègues, que, dans telle commune, non seulement on n’accepte plus « les deux ans » à l’École Maternelle (ça, c’est devenu tellement banal qu’on n’en parle même plus) mais que même « les trois ans » qui n’atteindront cet âge fatidique qu’après la rentrée des classes ne sont plus inscrits ; que, dans telle autre, les jardins d’éveil sont opérationnels et que l’accueil de tous les moins de trois ans est donc devenu payant pour les familles.

 

Moi, la grand-mère de deux jeunes petits-enfants (quelques jours et trois ans), ancienne élève de l’école maternelle, ancienne institutrice, ancienne mère d’enfants scolarisés dès l’âge de deux ans dans cette même structure, j’ai donc trouvé intéressant de comparer la vieille et poussiéreuse École Maternelle et les jeunes et dynamiques Jardins d’Éveil.

Cette comparaison ne sera peut-être pas complètement objective : il est difficile de renier ce que l’on a toujours connu, surtout quand on a pu constater, tout au long de sa carrière, combien les objectifs des pères (et des mères) fondateurs de cette Institution étaient « nobles » ; il est encore plus difficile d’accueillir favorablement un projet parrainé par un système que l’on n’arrive pas à comprendre et encore moins à admettre.

 

  • Petit comparatif2 pour commencer :

 

 

École maternelle publique ou privée sous contrat

Jardins d’éveil

Porteur du projet

  • État et Commune(s) sous l’autorité de l’État

  • Organisme privé sous contrat avec l’État

  • Commune ou groupements de communes

  • Administration

  • Établissement public (centre d’action sociale, établissement hospitalier, …)

  • Association à but non lucratif

  • Organisme mutualiste

  • Entreprise

Le dossier est soumis à convention entre le président du Conseil Général, la commune du lieu d’implantation, la CAF, la CMSA, le porteur du projet.

 

Formation des personnels

Sur l’ensemble du territoire :

  • professeurs des écoles recrutés sur concours (CRPE) au niveau Master 2

  • ATSEM recrutés sur concours au niveau CAP Petite Enfance

Peuvent être recrutés pour une structure de ce type :

  • Un Auxiliaire de puériculture recruté sur concours au niveau CAP Petite enfance

  • Un titulaire du CAP Petite Enfance

 

Formation de l’encadrement administratif

  • Directeur d’école (Professeur des écoles) qui assure l’animation pédagogique de l’équipe enseignante pendant tout le temps scolaire

  • Inspecteur de l’Éducation Nationale qui vérifie la conformité des contenus et des projets

  • Mairie + Directeur d’école (pour les ATSEM)

  • Un directeur qui peut être entre autres qualifications un personnel administratif communal, à raison d’au moins un quart temps par tranches de 24 places (soit en moyenne 8,5 heures par semaine).

N. B. : La brochure précise en outre qu’une mutualisation entre différentes structures communales est possible.

 

Taux d’encadrement

  • Un professeur des écoles par classe (jusqu’à 35 élèves environ)

  • Un ATSEM pour deux classes

Page 6, il est mentionné :

  • Deux « professionnels » (sic) pour 12 enfants

  • Trois « professionnels » pour 24 enfants

mais page 5, on peut lire :

  • « Le taux d’encadrement des enfants devra se situer dans une fourchette de 8 à 12 enfants pour un adulte selon les moments de la journée et les coopérations possibles avec d’autres structures d’accueil de jeunes enfants ».

 

Programmes

  • Programmes nationaux 3 dans tous les domaines prévus par la Loi d’orientation de l’École Primaire

  • Pas de programmes, il est juste mentionné que chaque jardin d’éveil devra présenter un projet « éducatif » pour « l’accueil, le soin, le développement, l’éveil et le bien être des enfants »

 

Coût pour les familles

  • Dans la plupart des cas, néant.

  • Certaines communes (dont Marseille et de nombreuses communes d’outre-mer) font fournir par les parents le matériel pédagogique « consommable » (papier, crayons, cahiers, etc.)

  • En fonction des revenus de la famille

Simulation proposée dans la brochure (coût mensuel pour un enfant) :

- 1 SMIC : 42,50 euros (après déduction du crédit d’impôts4)

- 3 SMIC : 127 euros

- Plafond : 178 euros

 

 

  • Suis-je obtuse ou la différence saute-t-elle aux yeux ?

 

Sauf dans le domaine du taux d’encadrement, pour moi, il n’y a aucun doute : la différence saute aux yeux !

 

En premier lieu, on ne peut pas comparer la validité des programmes, puisque l’une des deux structures n’est même pas soumise au fait d’en créer un qu’elle se chargera ensuite de faire appliquer par son personnel.

Quant aux autres points, sauf un, tout est en défaveur de l’une par rapport à l’autre : personnel recruté à un niveau d’étude beaucoup moins exigeant, encadrement de ce personnel qui peut même ne pas avoir reçu de formation dans le domaine de la Petite Enfance, coût mensuel pour les familles égal ou supérieur à ce que demandent les plus exigeantes des communes comme coût annuel dans l’autre structure.

 

Le seul point en défaveur de l’École Maternelle se situe donc au niveau du taux d’encadrement, nettement plus élevé que celui exigé dans les Jardins d’Éveil. C’est en effet un problème important qu’on ne peut négliger et qui pourrait être déterminant dans le choix de certaines familles, qui se soucient du bien-être de leur tout-petit et veulent lui éviter un surplus de bruit, d’excitation et des risques de moindre prise en compte de ses besoins particuliers à tout moment de la journée.

 

Pour avoir eu en charge une classe maternelle de plus de trente enfants de deux à quatre ans à plusieurs reprises au cours de ma carrière, pour avoir vu fonctionner celles de mes collègues au sein des Écoles Maternelles ou Primaires dans lesquelles j’ai eu l’occasion de travailler et pour avoir reçu des témoignages de parents ou de stagiaires au sujet de haltes-garderies, centres d’accueil ou crèches, où le taux d’encadrement est encore plus strict que celui des jardins d’éveil, j’ai pu à de nombreuses reprises constater que, même s’il facilite grandement la vie du personnel en charge de l’encadrement, l’effectif réduit du groupe peut malheureusement ne rien avoir à voir avec le calme, le silence et la prise en compte des besoins de chacun.

 

Pour cette garantie, je ferais bien plus confiance au niveau de formation du personnel, à celui de ses cadres et aux programmes éducatifs auxquels la structure est soumise. L’École Maternelle se retrouve donc, encore une fois, gagnante dans ce domaine-là.


Elle le serait encore plus si elle adoptait petit à petit, sans à-coups brutaux, car son personnel n’en peut plus des changements de cap incessants, des querelles de chapelles et autres crêpages de chignons, des programmes plus réalistes
5 qui cherchent réellement à partir du petit enfant de deux ans, encore trop jeune pour l’Instruction6 au sens strict, et son corollaire l’Évaluation7, pour l’amener doucement, en lui faisant confiance, par le jeu, le récit, le dessin, l’observation des objets, des plantes, des animaux de son quotidien, la vie en collectivité, les échanges qu’elle provoque et la régulation qu’elle rend nécessaire, à devenir un petit élève prêt à entrer à l’École Élémentaire en pleine possession de ses moyens physiques, intellectuels et relationnels.

 

Et ces programmes seraient mieux appliqués si la formation des maîtres était plus ouverte aux différents courants de l’éducation du tout-petit, ceux qui prônent l’égalité de traitement que l’on ait deux ou douze ans et préfèrent leur apprendre à nager d’emblée en haute mer sans bouée ni brassards, comme ceux qui considèrent qu’il vaut mieux bâtir pierre à pierre la conscience de l’enfant et passent tout doucement de la cuvette d’eau à la pataugeoire, de la pataugeoire au petit bain et réservent grand bain et haute mer à des âges plus matures.

 

Toutes ces restrictions n’empêchent en aucune manière que, pour obtenir cette garantie de façon plus sûre, quel que soit le lieu où résident ces enfants, je préfère à l’accueil « Petite Enfance », remanié façon « directive Bolkestein », le bon vieux mammouth, certes parfois un peu lent à la détente, pas toujours très rapide à se remettre en question, très malmené ces derniers temps, dégraissé de toutes parts, sauf de celles dans lesquelles il aurait été tellement utile de tailler dans le vif.

Et ce, tout simplement, …

 

  • parce que l’Éducation est et doit rester un service public forcément national… 

 

… qui est le seul à pouvoir garantir une égalité de traitement en quelque lieu du territoire, un accueil gratuit et réellement laïque garantissant l’accueil de tous, sans risques de discrimination sociale, financière ou religieuse et une formation des maîtres qui doit redevenir identique pour assurer à toutes les familles qu’elles pourront sans crainte circuler d’une région à l’autre et retrouver pour leurs enfants le même accueil, les mêmes programmes et le même encadrement.

 

 

Catherine Bonnet-Huby

2 La partie « Jardins d’Eveil » du tableau ci-dessous a été complétée à l’aide de la brochure « Méthodologie des jardins d’éveil », éditée par le Secrétariat d’État Chargé de la Famille

(http://www.travail-solidarite.gouv.fr/IMG/pdf/Lc_2009-76_-_jardins_d_eveil_-_annexe_5_guide_methodologique_en_direction_des_maires.pdf )

3 Voir Bulletin Officiel de l’Éducation National hors-série n° 3 du 19 juin 2008 http://www.education.gouv.fr/bo/2008/hs3/default.htm

 

4 Je ne savais pas qu’une famille « smicarde » avec enfants payait des impôts… Celles que je connais ne sont pas imposables.

6 Cette Instruction, qui s’est tant diluée dans les programmes de l’École Élémentaire, du Collège et du Lycée, a, contrairement à ce que l’on pourrait croire, fait son apparition de façon très « insidieuse » dans les programmes des petites classes de maternelle (enfants de deux à cinq ans) suite aux travaux de certains « chercheurs en Sciences de l’Éducation » qui firent disparaître des programmes de ces classes les jeux d’imitation, les jeux sensoriels et moteurs, la progression au jour le jour, au rythme de l’enfant, pour les remplacer par des travaux de recherche et de production écrites, des grands projets mensuels, trimestriels ou même annuels, des exercices de comptage et de repérage sur le calendrier, l’observation et la copie d’œuvres d’art, l’histoire, la géographie, toutes choses qu’aucun programme d’école préélémentaire n’avait jamais osé imposer aux moins de cinq ans révolus, de peur de perdre irrémédiablement les plus fragiles de ces élèves.

 

7 Car on « évalue » énormément dans l’École Maternelle d’aujourd’hui, on ne fait même quasiment que ça, dans tous les domaines et les enfants, même les plus petits, ramènent régulièrement à la maison des « livrets d’évaluation » que les parents (et certains professeurs des écoles) considèrent comme des bulletins de notes au sujet desquels ils se rengorgent, s’étonnent ou même s’affolent carrément en comptant les « feux verts » et les « feux rouges » ou les  et les .

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6 novembre 2010 6 06 /11 /novembre /2010 07:55

Le transport solidaire pénivauxois mis à l'honneur.

La revue professionnelle de Travailleurs Sociaux  à diffusion nationale "le journal de l'action sociale" consacre deux pages de son numéro d'octobre à l'initiative mise en place à Vaux le Pénil conjointement par la ville et un collectif associatif.

Certes, c'est Familles Laïques qui coordonne cette action solidaire, mais rien n'aurait été possible sans les nombreux bénévoles qui s'investissent : qu'ils soient une fois de plus remerciés et félicités.

Prenez connaissance de cet article où témoignent des responsables, des bénévoles, une utilisatrice du service.

Merci à eux d'avoir bien voulu collaborer et répondre à Marie JANICOT, la journaliste qui avait pris contact avec nous.

Patrice THEVENY

 

-oOo-    

 

 

Quand le taxi bénévole avance, l'isolement recule

Pas toujours évident de se déplacer pour les personnes dont la mobilité est réduite et qui vivent en territoire rural. Pour éviter d'aggraver leur isolement, une idée a émergé à Vaux-le-Pénil (Seine-et-Marne) : celle d'un taxi solidaire animé par une trentaine de bénévoles. Un double avantage pour les Pénivauxois : un service issu de la solidarité et destiné à la ren­forcer dans un territoire étendu et vallonné.

 

     Par MARIEJANICOT

« Tiens, la voilà!", s'ex­clame Marcelle depuis sa fenêtre. Saisissant sa liste de courses, elle rejoint Suzanne qui l'attend en bas. Le moteur démarre et les deux amies discutent joyeusement. ... Comme beaucoup de personnes âgées de Vaux­le-pénil, Madame Lardon habite la résidence du Château. Ce n'est pas tout près du centre-ville. "En prin­cipe, c'est Suzanne qui vient me cher­cher mais parfois c'est Jean-François ou Alexandrine", raconte Marcelle.                    

Tous sont bénévoles au service du taxi solidaire mis en place par la Mairie.

 

"Mais on préfère ne pas parler de taxi", précise Colette Llech, Maire adjointe aux solidarités et à l'inser­tion des personnes handicapées. Ici, pas de condition de ressources ni de degré de dépendance, tous les habi­tants en difficulté de Vaux-le-pénil peuvent faire appel au service. Et c'est gratuit. Le principe est simple: des chauffeurs bénévoles se relaient au volant du véhicule municipal pour

accompagner les personnes en perte d'autonomie ou dans l'incapacité momentanée de conduire. Un ser­vice à la carte du lundi au samedi.

PAS DE CONCURRENCE AVEC LES TAXIS

Pour faire appel au service, rien de plus simple, assure Madame Lardon qui utilise ce service tous les vendre­dis depuis trois ans pour aller faire ses courses. Il suffit d'appeler l'associa­tion et de s'inscrire. l'accueil télépho­nique est ouvert en semaine de 9h à 1lh et de 14h à 17h, et on peut lais­ser ses coordonnées sur le répondeur. Le jour fixé, un bénévole vient cher­cher la personne à son domicile. Les demandes des personnes sont très divers: faire une course, rendre visite à un proche ou aller chez le méde­cin ... "Des besoins pour lesquels les intéressés auraient eu du mal à trou­ver un taxi ou un véhicule sanitaire", explique la maire adjointe. "Et on veille à ne pas de faire concurrence aux transports collectifs s'adressant aux personnes titulaires d'une carte d'in­validité ou de stationnement, comme le PAM 77 du Conseil général'; ajout e­t-elle.

"Ainsi, les trajets ne doivent pas excé­der un rayon de 20 kilomètres et nous poussons les personnes à se réunir pour se déplacer ensemble'; explique  Patrice Théveny, président de l'Association Famille Laïques (AFL) à l'origine du projet.

PEU DE MOYENS, BEAUCOUP D'HUMAIN

Tout a commencé en 2007 avec la création du "Collectif Intergénéra­tion" rassemblant plusieurs asso­ciations autour de Familles Laïques -le Secours Catholique et le Secours Populaire, rejoint par France Béné­volat -. "Grâce à une enquête nous avons pu vérifier que certaines per­sonnes âgées ne sortaient jamais de chez elles", précise Patrice Théveny. C'est ainsi qu'émerge l'idée du taxi solidaire. Le projet a reçu aussitôt l'a­val de la mairie qui met à disposition le véhicule dont l'association a besoin et prend en charge les frais d'entre­tien et d'essence. Au final près de 300 allers-retours par an sont effectués, ce qui contribue à maintenir les personnes âgées chez elles, mais aussi à nouer des relations entre elles", ana­lyse Suzanne Caron, l'une des trente bénévoles de l'association, qui consacre une demie-journée par semaine à ce service. "Pour certaines personnes très isolées, c'est le seul moment de la semaine où elles peuvent parler à quelqu'un", insiste Patrice Theveny.

 

"Localement, le Centre local d'infor­mation et de coordination géron­tologique (Clic) et le CCAS remplis- sent volontiers le rôle de médiateur': précise-t-il. Les associations d'aide et de soins à domicile, les facteurs et les bailleurs sont aussi de très bons relais de l'information. "Les deman­des sont donc de plus en plus nom­breuses': se réjouit la bénévole. "C'est pourquoi il faut s'inscrire au moins 48 heures à l'avance, et qu'il nous est apparu indispensable d'embaucher une secrétaire pour tenir l'agenda et fixer les rendez-vous'; explique Patrice. Une coordinatrice qui fait le lien avec les associations locales, et gére à la fois les demandes d'accompagnement et le vivier de bénévoles. Cela est rendu possible grâce au financement d'un emploi tremplin par le conseil régional. Et pour répondre â la demande, l'hypothèse d'un second véhicule est aussi posée. "Mais ce qui fait la force du service par-dessus tout, c'est la fidélité des bénévoles qui sont là par conviction", soutient le président. Et les personnes le sen­tent. C'est aussi l'engagement du col­lectif qui envisage déjà d'élargir ce concept à des sorties ou des voyages avec le minibus de la Mairie. Pas éton­nant que ce projet soit plébiscité parmi les meilleures idées solidaires adop­tées par les Maires via le Manifeste des municipales du journal 20 Minutes et de RMC!

                  

                                                                                                                                                                                                                                                                                                26

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5 novembre 2010 5 05 /11 /novembre /2010 22:40

 Pour une politique de la petite enfance, ouverte sur l’environnement réel familial , social et urbain.


  Par Laurent Ott, formateur chercheur en travail social, docteur en Philosophie, président de l’association Intermèdes Robinson, à Longjumeau (http://assoc.intermredes.free.fr )
  Depuis toujours les questions d’éducation des enfants en général, mais plus encore des jeunes enfants sont piégées par des préoccupations idéologiques; Il en fut ainsi de spréoccupations religieuses qui pendant des siècles n’ont vu dans le spetits enfants européens que des âmes à sauver. Puis sont venues les utopies naturalistes et romantiques, qui faisaient du jeune enfant  un être “de nature” , pur mais en dehors de la civilisation et en quelque sorte “infra humain”.
  Vinrent ensuite les préoccupations plus scientifiques mais non exemptes d’idéologies qui imposèrent l’image d’un enfant malsain, toujours menacé de maladie, à retrancher du monde et de la vie en société.

  Aujourd’hui nous vivons une époque sécuritaire qui soit prétend enfermer les jeunes enfants dans des institutions où ils circulent le moins possible, et d’où ils ne sortent que trop peu souvent, ou à des assistantes maternelles qui elles aussi sont incitées à avoir peur de tout risque. En dehors et pour beaucoup finalement il ya aussi tous ces enfants sans solution de garde , qui partagent l’isolement ou la solitude de parents  souvent déjà exclus de la vie sociale, économique et culturelle.

  certains rêvent à présent de crèches sécuritaires, de rééducation précoce, de signalement dès le berceau d’enfants à problèmes. Ils ont une vision déterministe de l’existence et pensent qu’il existe des mauvais enfants, comme il existe des mauvais milieux... à rééduquer.  Ils voudraient bien entendu surtout voir disparaître par force ou éviction tous ces enfants qui remettent légitimement en cause des institutions inégalitaires et fatiguées.

   Nous vivons ainsi une époque étonnante où en matière de petite enfance nous avons d’un côté des exigences de surveillance, de technicité, de précautions sidérantes... Et pour beaucoup d’autres, rien du tout ou si peu.
  On nous explique que l’école maternelle à deux ans est une mauvaise chose, mais on feintd ‘ignorer que l’enfermement chez soi est souvent pire encore...
  Bref , il serait un peu temps de travailler à partir de la réalité des contraintes parentales, sociales, et de l’environnement urbain que nous connaissons.

  les jeunes enfants d’aujourd’hui ont besoin – mais on  l’oublie souvent – d’avoir des parents intégrés et insérés dans la vie sociale et économique, de leur ville de leur quartier. Ils devraient tous pouvoir trouver une place dans des accueils collectifs , sécurisants où ils seraient encouragés à la curiosité, à l’expérience et à rencontrer des enfants plus grands.

    Dans les quartiers, il nous faut pouvoir créer de telles structures:

  • inconditionnelles car la véritable prévention, c’est d’abord le bon accueil et une relation personnalisée avec des professionnels engagés.
  • sociales, car cet accueil collectif ne doit pas être réservé aux enfants de parents qui ont une situation et un travail,
  • inter-âges car les enfants ont besoin très rapidement d’être au contact d’enfants plus âgés et si possible aussi plus jeunes, dans un même groupe , pour enrichir leurs interactions et comprendre les différences,
  • en horaires atypiques car les modes de vie qui s’imposent aux parents et singulièrement aux plus précaires,  ne connaissent pas d’horaires classiques, et nécessitent une ouverture pour accueillir l’enfant dans son cadre à chaque fois qu’il en a besoin.  Il en va de même pour l’ouverture le week end, et la nuit.
  • Respectueuses des parents, car accueillir une nfant, c’ets aussi accueillir sa famille et que les parents doivent pouvoir trouver une place et enrichir par leur présence, leur aide et leurs initiatives, les lieux d’éducation des enfants.

  tel est aujourd’hui le projet de structure innovante porté par notre association au bénéfice des enfants et parents du quartier sud, de Longjumeau (91). Ce projet, soutenu par la CNAF et Espoirs Banlieues, finançable et viable... Ets de façon inexplicable en panne, faute de volonté des politiques et institutions pour accéder à des locaux (et pourtant des locaux à l’abandon ou vides dans le quartier comme dans tant d’autres, il y en a!)

Nous voudrions une crèche ouverte sur les cultures, sur la ville ; nous voudrions une crèche conforme aux principes mis en avant par les travaux d’Hubert Montagner : une crèche qui réalise un accueil bienveillant, en collectif propre à construire une réelle sécurité effective et affective des enfants, mais aussi une crèche qui respecte les rythmes des enfants, tout autant que la réalité des rythmes de leur(s) parent(s).

De même nous souhaitons une crèche qui offre aux enfants ce que la réalité a de meilleur, qui favorise leurs prises de risque et l’éducation à l’autonomie, sur le plan moteur, affectif et psychologique.

Mais parce que rien ne peut naître d’un rêve et que seule la réalité est féconde, cette crèche, nous voulons la bâtir ici et maintenant, là où notre association travaille déjà à développer les liens sociaux, intergénérationnels, interculturels, le « vivre ensemble » ; c’est à dire que cette crèche, à réaliser, naît de la réalité de notre travail d’aujourd’hui.

Implantée en quartier REP, CUCS, au sud de Longjumeau, l’association Intermèdes Robinson développe à Longjumeau un travail innovant, en lien  avec les principes de la Pédagogie sociale, de développement social, de création de liens sociaux. Elle travaille essentiellement dans et pour le « Quartier sud[1] de cette ville, qui regroupe près de 50 % de la population sur 20 % de son territoire. Elle a pour finalité de sortir les enfants de la solitude sociale qu’ils partagent avec leurs parents et de pallier les carences éducatives. A cette fin, elle organise des animations de quartier, des ateliers de rue, des goûters en plein air et a mis en place une bibliothèque et une ludothèque de rue, un jardin communautaire. A ces activités s’ajoutent des ateliers d’écriture, des groupes de projet et une permanence éducative au service des enfants, dans ses locaux. Composés de volontaires associatifs dont un grand nombre sont des professionnels éducatifs, de la petite enfance et du travail social, le comité d’administration et le bureau de l’association comptent également des bénéficiaires de nos actions, impliqués dans le fonctionnement associatif : parents, adultes éloignés de l’emploi, notamment. Grâce à ses 4 permanents (3 animateurs socio-environnementaux, un apprenti), ses stagiaires éducateurs de jeunes enfants et éducateurs spécialisés, ses volontaires, notre association réalise chaque semaine de nombreux « ateliers de rue », pour les enfants, ouverts aux parents, à partir de médiations culturelles, artistiques et ludiques.

Lors de ces ateliers, même les très jeunes enfants sont accueillis sur nos tapis d’éveil que nous déployons sur nos bâches et tapis. Ils viennent accompagnés par leur assistante maternelle, par leurs parents, par leurs grands frères et sœurs.
Tous les âges se retrouvent alors et ces temps d’atelier, nous en profitons également pour proposer aux grands et aux adultes de « faire de la cuisine de rue », ou alors nous organisons de grands goûters.
Ces actions que nous menons  plus de 3 fois par semaine, sont dans le prolongement des autres actions de notre association, qui les « alimentent » :
-       Nous faisons du jardinage communautaire et intergénérationnel à partir de pas moins de 3 jardins (et nous avons même des ruches) ;
-       Nous organisons également quelques activités « à couvert », pour des soirées conviviales où nous cultivons la convivialité : nous projetons nos petits films, nos diaporamas réalisés à partir de nos activités ; les adolescents jouent de la musique, préparent des spectacles, les enfants chantent, dansent, etc.
-       Nous organisons des groupes d’enfants et d’adolescents pour les accompagner dans leurs projets ; nous allons avec eux rendre visite à des associations qui travaillent dans le même esprit que la nôtre : artistes, lieux d’accueil culturels, jardins sociaux, etc
C’est donc tout naturellement que la crèche que nous voulons ouvrir à Longjumeau, pour et dans le quartier « grand ensemble » de cette ville, s’inscrit dans le prolongement de notre action.
Située dans le quartier même, notre  structure innovante prendra la place des activités déclinantes dans le quartier (commerces, services…)  et créera de la vie autour d’elle. Il s’agit ouvrir un multi-accueil combinant accueil régulier et accueil occasionnel, ayant une large amplitude d’accueil afin d’accueillir les enfants dont les parents travaillent en horaires atypiques. L’association souhaite également obtenir un agrément pour l’accueil de nuit permettant de répondre aux besoins de familles en difficulté (en accueillant les enfants lorsque les parents ne sont plus en mesure de le faire provisoirement – hospitalisation, besoin de déléguer la garde ponctuellement sans que cela rentre dans le cadre d’une mesure de placement ASE) ou ayant un emploi leur demandant de s’absenter plusieurs jours ou de travailler la nuit.
Destinée à répondre aux besoins d’une population oubliée et souvent à l’écart des structures classiques (car le plus souvent sans emploi et sans moyens),
l’association Intermèdes – Robinson, se positionne très fortement, notamment en faveur de la reconnaissance des compétences des parents, de la nécessité de favoriser la conciliation des différents temps sociaux.


Ce sera une crèche, motivée par un GRAND projet pédagogique, dans un lien vivant avec les activités de l’association et des âges ; pour le faire vivre, notre accueil sera étendu le soir, le week- end et les congés scolaires AUX FRATRIES.
C’est un véritable centre d’activités avec l’éducation au Cœur que nous voulons mettre en œuvre ; et il est légitime que cette activité bénéficie également au quartier ; autour de cette structure d’accueil nous souhaitons mettre en place des actions de qualification, et de formation, des parents, des habitants du quartier pour se professionnaliser et faire bénéficier la structure de leurs compétences et expérience.
Les actions actuelles de l’association tendent déjà à valoriser les compétences et savoirs faire des parents. Elles offrent une large place à l’accueil des responsabilités parentales qui se trouvent, lors de nos actions collectives, largement partagées et socialisées. Les familles trouvent ainsi, dans notre association, un espace et un temps où il est à la fois possible d’enrichir les relations familiales, et de sortir de l’isolement. De la même façon, dans le dispositif d’accueil en projet, les familles seront également présentes pour enrichir le quotidien éducatif, contribuer matériellement au fonctionnement de la structure et à sa pédagogie. La diversité des familles accueillies constitue en soi une grande source de richesses à la fois personnelles et culturelles, que notre association a pris l’habitude de valoriser et de cultiver. Il va sans dire qu’une structure d’accueil ne peut que bénéficier d’une telle dynamique ; les professionnels éducatifs savent conjuguer la nécessaire continuité des situations éducatives avec la richesse des interventions et des propositions tant des enfants que des parents. S’adressant à des parents souvent exclus de l’emploi et de la participation à la vie culturelle et économique, une structure éducative de proximité se doit de valoriser les compétences et les cultures, tout en les enrichissant. Par ailleurs, la nouvelle structure pour assurer la participation de tous à son fonctionnement et à ses orientations pourra compter sur les habitudes actuelles de gestion de notre association ; celle-ci, dotée d’un Conseil d’Administration à l’image de la richesse et de la diversité de son public, a développé des pratiques de concertation et de décision collective régulières, a mis en œuvre un mode de représentation facultatif des enfants et adolescents concernés par nos actions.
 

[1] Ce quartier concentre de nombreuses difficultés et est considéré administrativement, comme relevant d’un CUCS (Contrat de Urbainde Cohésion Sociale) ; en REP (Réesau d’Education Prioritaire), du point de vue de l’Education Nationale, ce quartier fait également l’objet d’un PRE (Programme de Réussite Educative).

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4 novembre 2010 4 04 /11 /novembre /2010 08:27

 

Nantes – 15 octobre 2010

La place des parents et des professionnels au sein des multi-accueils :

des aspirations a la concrétisation des alliances coéducatives

 

Frédéric Jésu*


PLAN


De ce qui fonde les aspirations et la place des parents vis-à-vis des pouvoirs publics et, par délégation, vis-à-vis des professionnels en matière d’accueil de la petite enfance


Les principales composantes qualitatives de la notion d’accueil de la petite enfance (I)

Quelques repères historiques et linguistiques sur les termes « accueillir » et « accueil »

Quelques repères pour définir la qualité de l'accueil des jeunes enfants et la place des parents

L'accueil des jeunes enfants par leurs familles

L'accueil municipal des jeunes enfants


Données quantitatives de cadrage sur le contexte de l’accueil institutionnel de la petite enfance

Données chiffrées sur la natalité et la fécondité

Qui et combien sont les jeunes enfants ?

Où sont les jeunes enfants ?

Qui sont les familles des jeunes enfants et que font-elles pour organiser leur accueil ?


Les principales composantes qualitatives de la notion d’accueil de la petite enfance (II)

L'accueil des jeunes enfants dans les structures collectives

L'accueil des parents dans les structures dédiées à la petite enfance

L'accueil des jeunes enfants par les assistant-e-s maternel-le-s

Tendances actuellement observées dans le champ de l’accueil de la petite enfance

Bilans et perspectives en matière d’accueil de la petite enfance



Des principales conditions éthiques et de quelques occasions institutionnelles récentes propices au développement d’alliances coéducatives au sein et autour des établissements d’accueil des jeunes enfants


Le respect mutuel

Le respect dans l’éducation

Le respect des enfants en matière d'accueil de la petite enfance

Le respect des parents en matière d'accueil de la petite enfance

Le respect des professionnels de l'accueil de la petite enfance.


La co-construction des projets d’établissement

Le contexte d’une possible co-construction du projet d’établissement

Des leviers pour la co-construction du volet éducatif du projet d’établissement

Des leviers pour la co-construction du projet social du projet d’établissement

Des propositions pour favoriser la participation et l’information des parents


Les conseils d’établissement

Des bases juridiques fragiles, sur un fond d’ouverture progressive des établissements aux parents

Des conditions politiques indispensables mais aléatoires

Des enjeux considérables pour accompagner l’évolution des relations entre parents et professionnels

Des enjeux territoriaux potentiels, en lien avec ceux des projets éducatifs locaux

De ce qui fonde les aspirations et la place des parents vis-à-vis des pouvoirs publics et, par délégation, vis-à-vis des professionnels en matière d’accueil de la petite enfance


Les principales composantes qualitatives de la notion d’accueil de la petite enfance (I)


Quelques repères historiques et linguistiques sur les termes « accueillir » et « accueil »


Accueillir


Le sens du verbe est ambivalent dans l'ancien français :

  • Réunir, associer.

  • Attaquer, chasser, assaillir, accompagner brutalement.

  • Saisir, prendre.

  • Recevoir quelqu'un bien ou mal, admettre (verbe lui aussi ambivalent, et comportant une notion de tolérance contrainte).


Au XVIIèmesiècle seulement se dégagent des sens plus positifs :

  • Recevoir favorablement.

  • Aider, protéger.

  • Puis, de façon plus neutre : recevoir d'une certaine manière.


Accueil


D’assemblée, lieu de réunion (XVèmesiècle) en passant par réception aimable (faire un bon accueil) (XVIèmesiècle), le mot finit par désigner, de façon neutre, la façon – bonne ou mauvaise - de recevoir quelqu'un et/ou d'être reçu par quelqu'un.


Aujourd'hui encore, le mot, employé dans l’expression « comité d'accueil » (officiel, informel ou hostile) peut indiquer une structure ou un service chargés de recevoir les personnes qui lui sont extérieures. La notion d’extériorité est ici importante comme on le voit, par exemple, à propos de la notion de « pays d’accueil » au sujet des étrangers.


En résumé


«Accueil» fait partie de ces mots qui comme «hôte» ou «apprendre» sont réversibles, fonctionnent dans les 2 sens. L'accueil est le fait d'accueillir ou d'être accueilli. D'ambivalent il est devenu neutre. L'accueil n'est ni bon ni mauvais en soi et a priori. Il est et devient ce qu'on en fait. C'est une façon de faire associée à une façon d'être. Bref : une posture, une attitude.



Quelques repères pour définir la qualité de l'accueil des jeunes enfants et la place des parents »


Une définition possible de l’accueil selon différentes chartes de qualité


L’accueil est une manière d'établir le premier lien avec quelqu'un, de le recevoir quand il arrive - qu'il s'agisse d'un enfant, de parents, de professionnels - , de façon à créer d'emblée, puis au jour le jour, la confiance entre eux.


Deux notions importantes en résultent.


1) La qualité de l'accueil et la confiance qu'elle permet d’établir concernent tous les acteurs impliqués ; elles sont propices à créer et entretenir une ambiance générale, à tous les niveaux de relation, et elles bénéficient à tous. On peut faire ici le parallèle avec la dimension « contagieuse » de la bientraitance : des parents et des professionnels bien accueillis dans une structure donnée seront plus enclins à bien accueillir les enfants (les leurs et ceux des autres).


2) Une hypothèse, plausible, est que la qualité de l'accueil et la confiance qu'elle induit favoriseraient la séparation enfant / parent, la construction de nouveaux liens et l'adaptation de l'enfant à son nouvel environnement.


Autres conséquences


L'accueil repose sur la disponibilité, l’écoute, les échanges, l’aménagement des temps et des espaces pour que «chacun se sente bien». Ces termes désignent une posture qui ne se décrète pas, mais qui dépend de chacun et de tous, parents et professionnels.


Elle requiert en outre du professionnel, mieux qu’une neutralité bienveillante : une empathie. Celles-ci doivent beaucoup à l'influence des attitudes psychanalytiques. Mais elles dépendent aussi de conditions objectives (temps, locaux, organisation, fonctionnement et «gouvernance» du lieu d'accueil).


Ces caractéristiques idéales de l'accueil doivent s'appliquer à tous les temps (premier accueil, accueil quotidien, temps d'échanges parents / professionnels et entre professionnels) et à tous les espaces (espaces propres à la structure, rapprochement des différentes structures entre elles). On va examiner plus en détail différentes déclinaisons des attentes et des valeurs ainsi attachées à l'accueil des jeunes enfants mais aussi de leurs parents : accueil familial, municipal, dans les structures collectives, et par les assistant-e-s maternel-le-s.



L'accueil des jeunes enfants par leurs familles


L'enfant est accueilli par sa famille avant même sa naissance.


Il est dépositaire d'une histoire, de désirs, d'espoirs, de projets qui dépassent d'ailleurs les seuls parents, et mobilisent par exemple, les grands parents, les frères et sœurs éventuels, voire au delà (familles élargies «traditionnelles» et / ou migrantes, familles recomposées, familles homoparentales).


Les différents aspects du suivi de la grossesse participent à ce «pré-accueil» de l'enfant, et il est important de ne pas en exclure les pères, les frères et sœurs.


L'accueil à la naissance


Les différents rites ou équivalents de rites qui accompagnent la naissance sont :

  • la cotation immédiatement post-natale du score d’APGAR, modalité scientifique de recherche prédictive de la présence de critères d'humanité (accessibilité à la marche bipéde, au langage) ;

  • l’attribution du prénom, la déclaration à l'état civil ;

  • les visites des proches en maternité, la remise de cadeaux, la diffusion de faire-part de naissance ;

  • et bientôt le «choix», si possible, d'un mode d'accueil.


Ces pratiques reflètent une double prise en compte : celle de la fragilité et de la dépendance propres au petit d'homme, et celle de sa nécessaire inscription symbolique et sociale.


Dans tous ces domaines, le rôle des pères est moins visible, mais bien réel, d'autant qu'il est à la recherche de nouvelles formes de manifestation, dans le cadre d'une recherche de parité parentale accrue.


L’accueil par la famille ne dépend pas seulement de la famille


L’amélioration de l’hygiène et des conditions de vie des familles ainsi que la médicalisation de la grossesse et de la naissance ont permis de sécuriser celles-ci et contribuent à une qualité objective de l’accueil des jeunes enfants. Avec d'autres facteurs (développement du travail des femmes, de la contraception, de l’assurance vieillesse), elles ont contribué à réduire le taux de croissance démographique : l'enfant se fait plus rare, donc plus précieux et il est donc accueilli comme tel.


Autrement que - mais aussi comme - dans les sociétés traditionnelles, l'attente, la naissance et les modes d'accueil familial et collectif des enfants sont l'affaire de tous. Malgré les tendances à l'individualisme et au repli sur soi, ce ne sont pas des événements totalement «privés». Ainsi l’accompagnement médico-social de la grossesse, de l'accouchement et de la naissance, par exemple, est-il largement financé par la Sécurité sociale et par les impôts locaux. Ce sont, au moins à ce titre, des actes publics.


Le territoire de vie de la famille et de l'enfant est de même très vite impliqué dans l’accueil de celui-ci.



L'accueil municipal des jeunes enfants


La famille peut être considérée comme la plus petite des collectivités territoriales.


C'est là que se prennent, pendant 18 ans, le plus grand nombre de décisions, et cela dans le plus grand nombre de domaines. C'est là que la disponibilité, l'écoute, les échanges, l'aménagement du cadre de vie, bref – on l’ a dit - l'accueil au quotidien trouvent les occasions les plus essentielles et les plus durables de s'exprimer. Peu à peu, l'enfant lui même contribue à y forger les conditions de son propre accueil, celui de ses frères et soeurs.


Juste après, et au plus près autour de la famille, vient l'entité de la commune – la bien-nommée.


Outre le logement, où l'enfant réside avec sa famille (et il y a parfois plusieurs logements pour une même famille - en cas de séparation des parents), les différents équipements publics et espaces ouverts municipaux constituent l'essentiel du cadre de vie des enfants. Ces espaces sont aussi des espaces-temps : ils correspondent aux différents temps et contribuent à l'organisation des rythmes de vie des enfants. Nombreux et divers sont les professionnels rencontrés en ces ocasions.


Dans quels domaines et dans quelle mesure la commune est-elle impliquée dans l’accueil des jeunes enfants ?


Tout d'abord à partir du Bureau municipal de l'état civil, où sont consignées la naissance et la filiation de l'enfant.


Puis à travers les choix effectués par les communes, avec le soutien et les interventions de l'Etat, de la CAF et du département, en matière de structures d'accueil collectif des jeunes enfants (y compris s'agissant des assistant-e-s maternel-le-s, de création de crèches familiales et de RAM). On y reviendra dans un instant.


Ensuite, en construisant, en aménageant et en entretenant les locaux des écoles pré-élémentaires (y compris pour accueillir les enfants de 2-3 ans) et en y affectant du personnel (ATSEM, gardien-ne-s), sans oublier le Bureau des écoles.


La scolarisation et la scolarité des enfants de 2-3 ans peuvent nécessiter des efforts spécifiques, portés par les communes et - de moins en moins, depuis quelques années, - par l'Education Nationale :

  • dispositifs passerelles, aménagement des locaux;

  • affectation et formation d'EJE, d'auxiliaires de puériculture, d'ATSEM).

  • sans parler des récents projets, encore controversés, de création de « jardins d'éveil ».


La commune intervient aussi en assurant, pour les jeunes élèves des écoles pré-élémentaires, la présence de services périscolaires (accueil du matin et du soir, restauration scolaire, CLSH), en veillant à la qualité de ceux-ci et en décidant de leurs tarifs.


Par ailleurs, pour les enfants de moins de 3 ans (souvent les plus nombreux) qui, pour une raison ou une autre, n'accèdent pas à des structures d'accueil collectif, la commune peut prévoir dans le cadre du PEL ou de projets éducatifs plus spécifiquement centrés sur la petite enfance, des lieux et des temps d'accueil adaptés aux besoins et attentes des enfants et des familles (ludothèques, section petite enfance dans les bibliothèques, lieux d’accueil parents-enfants, ateliers d'éveil artistique.


Enfin, pour tous les jeunes enfants résidant sur la commune, la commune peut et doit veiller à des aménagements et à des équipements amicaux pour les enfants, par exemple :

  • accessibilité aux poussettes (dans les transports en commun, par des ascenseurs dans les bâtiments municipaux) ;

  • présence et aménagement de jeux et de loisirs pour les jeunes enfants dans les espaces verts ;

  • adaptation des équipements culturels ;

  • création d'évènements et de spectacles en direction des jeunes enfants et de leurs familles, etc.


On voit bien, à travers cet exemple des politiques municipales, que l'accueil de la petite enfance ne va pas de soi. Se dire, se vouloir, et se montrer accueillant dépend, en ville comme en famille :

  • de volontés - politiques, parentales ;

  • et de moyens - revenus, contraintes et modes de vie familiaux ; budget de la commune et contribution des autres pouvoirs publics ;

qui déterminent les différences entre les intentions et les réalisations.


Les regards et les attentions portés sur les enfants, sur les parents et sur les besoins d'accueil et de soutien des uns et des autres sont également très déterminants. En complément des volontés et des moyens disponibles, ils influencent le contenu et la qualité des projets des services et des pratiques des professionnels au plan local, mais aussi les tendances observées ou souhaitées au niveau des politiques nationales, voire européennes, d'accueil de la petite enfance.


Données quantitatives de cadrage sur le contexte institutionnel de l’accueil de la petite enfance


Données chiffrées sur la natalité et la fécondité


Depuis 25 ans, on observe :

  • une baisse du nombre de naissances au cours de la décennie 1985-1994, puis une reprise à la hausse ;

  • un mini baby-boom en 2000, une légère diminution en 2002, puis la tendance à la hausse reprend son cours pour atteindre en 2008 son niveau le plus élevé depuis 1981 : 834 000 ;

  • ce chiffre est redescendu à 821.000 en 2009.


L’âge moyen des mères à la naissance était de 30,3 ans en 2009 (pour 28,3 en 1990) ; c’est l’indice d’une natalité de plus en plus choisie.


L’indicateur conjoncturel de fécondité est resté plusieurs années de suite aux alentours de 1,90. Il a atteint 2,14 enfants par femme en 2009.


La France est ainsi devenue, avec l’Irlande, l’un des pays les plus féconds de l’Union européenne. Ce constat est souvent attribué à la politique d’accueil des jeunes enfants activement menée en France depuis au moins un quart de siècle, et plus généralement à sa politique familiale.


La France ne consacre pourtant que 1,3 % de son PIB à l’accueil des enfants de moins de 4 ans (0,6 % aux Pays-Bas, 0,8 % en Allemagne, 2,7 % au Danemark), mais 2,8 % à sa politique en faveur de la maternité et des familles (3,8 % au Danemark).



Qui et combien sont les « jeunes enfants » ?


Qui sont les « jeunes enfants » ?


En France, les notions de « petite enfance » et de « jeunes enfants » sont floues, et leurs définitions non stabilisées. De la naissance à 3 ans ou de la naissance à 6 ans ?


Les indicateurs utilisés en démographie ou en santé publique privilégient souvent les tranches 0-1 an et 0-5 ans.


Les CAF et le ministère en charge des affaires sociales et/ou de la santé - mais la « petite enfance » doit-elle aujourd’hui relever de ces domaines ? - , prennent spécifiquement en compte les enfants de 0 à 3 ans et les conditions de leur accueil, familial ou institutionnel.


Le ministère de l’Education nationale emploie rarement le terme de « petite enfance ».


Les conseils généraux exercent des compétences légales de PMI pour les 0-6 ans, et d’aide sociale à l’enfance, en matière d’accueil physique des « femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins de 3 ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique ».


Dans les communes, les délégations politiques et les organisations administratives intègrent de façon très diverse ce qui relève de la « petite enfance », de l’enfance, de la jeunesse, de l’éducation, voire des affaires sociales et de l’éducation.


Les grands organismes internationaux tels que l’ONU, l’UNICEF, etc. définissent la petite enfance comme l’âge menant de la naissance à la scolarité obligatoire.


Il faut rappeler que l’âge de la scolarité obligatoire, en France, est fixé à 6 ans - même si, de fait, la quasi-totalité des enfants de 3 à 6 ans sont désormais scolarisés à l’école pré-élémentaire, improprement qualifiée de « maternelle ».


On désignera donc ici sous le terme d’« accueil de la petite enfance » l’ensemble des modalités d’accueil, familiales ou institutionnelles, publiques ou privées, destinées aux enfants de moins de 6 ans.


Combien sont les « jeunes enfants » ?


En incluant les départements d’outre-mer, les enfants de moins de 3 ans sont aujourd’hui plus de 2,4 millions, et les enfants de moins de 6 ans plus de 4,8 millions, soit 300 000 de plus qu'il y a dix ans. Depuis 2000, le nombre d'enfants de moins de 6 ans augmente chaque année de 1,1 %.


La répartition des enfants de moins de 6 ans est inégale selon les départements : la part de ces enfants, par rapport à la population totale, varie de 4,8 % à 8,7 %. Dans le quart sud-ouest, la proportion d'enfants de moins de 6 ans est nettement plus faible que dans le reste du pays. Elle est en revanche élevée dans le grand nord-ouest et le long du couloir rhodanien.



Où sont les jeunes enfants ?


L’accueil collectif (non scolaire) et familial des enfants de moins de 3 ans


En France métropolitaine, fin 2008, 48,6 % des enfants de moins de 3 ans ont pu être accueillis à temps plein ou partiel hors du domicile familial Ce taux était en moyenne de 43 % fin 2005, date à laquelle, pour 23 départements, il se situait entre 18 % et 36%, et pour 23 autres entre 54 % et 82 %.


Fin 2008, on comptait 10.212 établissements proposant 342.728 places, soit 14,6 places pour 100 enfants de moins de 3 ans :

  • 9444 établissements d’accueil collectif (crèches collectives, haltes-garderies, jardins d’enfants et établissements multi-accueil) proposaient près de 282.000 places (environ + 26.000 places depuis 2005, pour environ 500 établissements de plus);

  • 768 services d’accueil familial proposaient plus de 61.000 places (environ le même nombre qu’en 2005, pour 150 services de moins).


Une hausse de 3,7% a été observée entre 2008 et 2007, supérieure à celles enregistrées les années précédentes et qui témoignaient plutôt d'une décélération. La promesse présidentielle de l'instauration d'un droit de garde opposable étant aujourd'hui abandonnée, l'inversion de tendance observée en 2008 résulte pour une bonne part des « assouplissements » réglementaires.


Fin 2008, on comptait 769.200 places disponibles, chez 281.700 assistant-e-s maternel-le-s agréé-e-s directement rémunéré-e-s par les parents (+ 89.000 places depuis 2005), soit 34 places (théoriques) pour 100 enfants de moins de 3 ans.


Les départements les plus urbains et ceux du quart sud-est de la France sont les plus dotés en accueil collectif. L’inégale répartition territoriale des différents modes d’accueil est révélatrice d’inégalités d’accès aux différents modes d’accueil et parfois d’absence de choix. Sur certains territoires, il s’agit d’une pénurie de services d’accueil quels qu’ils soient. Sur d’autres, il s’agit d’une pénurie de places d’accueil pour un type de service précis.


La place relative et évolutive des structures multi-accueil dans l'« offre » d'accueil collectif et familial des jeunes enfants


Les établissements multi-accueil proposent au sein d'une même structure différents modes d'accueil d’enfants de moins de six ans : accueil régulier, accueil occasionnel (de type halte-garderie) ou accueil polyvalent, et combinaison pour certains d'entre eux d'accueil collectif et d'accueil familial. La très forte croissance de ces structures a commencé à se manifester au début des années 2000.


Le nombre des établissements de multi-accueil collectif a cru de 9,2 % entre 2007 et 2008, pour atteindre 5.241, soit 55 % du total des structures d’accueil collectif. La progression a été plus rapide encore en termes de places (+11,1 %), pour constituer 54 % du total de l'accueil collectif.


Ces chiffres témoignent de la grande plasticité du dispositif d'accueil de la petite enfance. Pendant que, entre 2004 et 2009, les structures de multi-accueil collectif passaient de 89.000 à 152.000 places, les établissements mono-accueil reculaient de 158.000 à 130.000 places.


Ce développement s’est fait également au détriment de l'accueil familial classique : encore embryonnaires avec un peu moins de 10.000 places, les places en multi-accueil collectif et familial ont progressé de 14,9 % en 2008, alors que celles en accueil familial « isolé » reculaient de 1,4 %.


Les enfants de moins de 3 ans gardés par leurs parents, par des employè-e-s rémunéré-e-s ou par des proches


En 2005 :

  • 40 % des enfants de moins de 3 ans non scolarisés sont gardés par leur(s) parent(s), leur mère le plus souvent ;

  • 14 % par leurs grands-parents ;

  • 2 % par un-e auxiliaire parental-e à domicile rémunéré-e1 ;

  • 2 % par un-e assistant-e maternel-le non agréé-e ;

  • 2 % au moyen d’autres formes d’aides de proximité.


Le principal mode de « garde » des enfants de moins de 3 ans est donc la famille, et notamment la mère.


L’« allocation parentale d’éducation », créée en 1985, n’était alors versée par la CAF qu’à partir du troisième enfant. À partir de 1994, elle l’a été à partir du deuxième enfant (150 000 familles bénéficiaires). Le « complément libre choix d’activité » de la « prestation d’accueil du jeune enfant », qui l’a remplacé à partir de 2004, peut être versé dès le premier enfant (plus de 600 000 familles bénéficiaires).



La scolarisation des enfants de moins de 3 ans


Le taux de scolarisation à 2 ans continue de baisser. À la rentrée 2010, pour la France métropolitaine et les DOM, il était de 15,2 % (11,6 % dans le secteur public et 3,6 % dans le secteur privé), après avoir été de 35,3 % en 2000 et de 24,5 % en 2005. Pour 2 enfants sur 3, la scolarité est partielle et se combine avec un mode d’accueil.


Le taux moyen de scolarisation des enfants de 2 ans est entaché de grandes disparités géographiques. En 2003, certains départements en scolarisaient plus de 60 % (en Bretagne, dans le Massif central, dans la région Nord Pas-de-Calais) contre 5 %, par exemple, à Paris. En 2010, le taux maximum est enregistré dans l’académie de Lille (42,2 %) et le taux minimum dans celle de Paris (4,3 %).


L’application de la loi d’orientation sur l’éducation de 1989 qui prescrit de privilégier la scolarisation à 2 ans dans les ZEP2permettait d’y observer, en 2003, un taux de plus de 37 % (contre 29 % au plan national). En l’absence de données officielles actualisées à ce sujet, il est peu probable que cette tendance se soit maintenue aujourd’hui.


L’accueil extra-scolaire des enfants de 3 à 6 ans


Le soir après l'école et le mercredi en journée, les enfants de 3 à 6 ans sont gardés par leurs parents pendant plus des trois quarts du temps considéré. Lorsque les deux parents travaillent à temps complet, ils assurent eux-mêmes deux tiers du temps le soir après l'école, et la moitié du temps le mercredi. C'est le mercredi, plus que le soir entre 16h30 et 19h30, que les parents font le plus fréquemment appel à des intervenants informels non rémunérés ou à une garde payante - assistant-e-s maternel-le-s, centres de loisirs sans hébergement, gardes à domicile – (respectivement 20 % du temps et 30 % du temps le mercredi, et 10% et 25% les soirs en semaine pour les parents bi-actifs).



Qui sont les familles des jeunes enfants et que font-elles pour organiser leur accueil ?


Neuf dixièmes des enfants de moins de 6 ans vivent avec leurs deux parents. Si les foyers monoparentaux représentaient en 2007 près de 20 % des familles ayant au moins un enfant de moins de 25 ans, ils comportent en effet moins souvent des enfants de moins de 6 ans.


Près de 6 enfants de moins de 6 ans sur 10 vivent avec deux parents actifs (c’est-à-dire qui travaillent ou recherchent un emploi). Lorsqu’ils vivent dans un foyer monoparental, le parent avec lequel ils résident principalement est actif plus d’une fois sur deux.


Le taux de femmes actives ayant un enfant de moins de 3 ans est de 80 %. Il chute à 60 % lorsqu’elles en ont deux et à 37 % lorsqu’elles en ont trois ou plus. Les hommes, quant à eux, par choix ou par nécessité, conservent au fil des naissances un taux d’activité supérieur à 90 %3.


La création de places d’accueil collectives n’est pas une compétence obligatoire des communes. Les critères d’attribution de ces places ne font l’objet d’aucune réglementation nationale. Dès lors, en situation de pénurie de places et de diversité de revenus des familles candidates, les commissions municipales d’attribution évincent souvent les parents sans emploi, et réservent une proportion variable aux allocataires de minima sociaux.


En outre, s’agissant des enfants de moins de 6 ans vivant avec deux parents actifs :

  • 39 % des enfants ont une mère qui travaille à temps partiel ;

  • 9 % ont une mère qui souhaiterait travailler davantage ;

  • 10 % ont une mère qui travaille à temps partiel par manque de services d’accueil d'enfants ou parce que ceux-ci sont trop chers.


Au total, 60 % des enfants de moins de 3 ans et 70 % des moins de 6 ans sont aujourd’hui gardés à temps plein ou partiel par leurs familles, principalement par leur mère. Mais cette solution n’est pas toujours l’expression d’un véritable souhait : 37 % des bénéficiaires des congés parentaux déclarent ne pas avoir trouvé de solution d’accueil et 40 % que leurs horaires de travail n’étaient pas compatibles avec l’offre existante.


Il importe de souligner ici, malgré la résurgence récente et culpabilisante de versions renouvelées des théories psychologiques de l’« attachement précoce », que la volonté des deux parents, et notamment celle des mères, d’exercer une activité professionnelle n’est pas a priori contraire à l’intérêt des enfants :

  • le travail des deux parents, et en particulier des mères, satisfait un besoin économique et sécurise les revenus familiaux, notamment en cas de séparation conjugale : il contribue donc au bien-être matériel des enfants ;

  • l’activité professionnelle satisfait un besoin personnel d’implications et de relations sociales des parents : elle favorise donc le bien-être relationnel des enfants, qui ont plus à gagner d’être élevés par des parents ayant un sentiment de complétude que par des parents réduits malgré eux à leur seul rôle de parent ;

  • le recours à un mode d’accueil extérieur au cercle de la famille nucléaire lorsque les deux parents travaillent satisfait le besoin d’ouverture ou d’élargissement de celui-ci : il stimule donc chez les enfants les aptitudes à une socialisation choisie et pilotée par leurs parents et, si possible, adaptée aux besoins de chacun.


C’est pourquoi il est préoccupant que les besoins particuliers d’un nombre croissant de familles ne soient qu’imparfaitement satisfaits, notamment pour ce qui concerne l’accueil d’urgence, les horaires atypiques et les familles pauvres.


Aujourd’hui, 80 % des enfants de moins de 7 ans et demi dont les parents travaillent ont au moins un parent concerné par des horaires de travail irréguliers ou décalés4. Ceci est source de tensions fortes pour les parents et pour les enfants. Aussi les familles demandent-elles des « services d’accueil à la carte » eux aussi très flexibles. Cette demande pose la question de l’obligation faite aux jeunes enfants et à leurs parents de s’adapter aux besoins des entreprises, alors que peu nombreuses sont encore les entreprises qui font l’effort de s’adapter aux besoins des parents de jeunes enfants qu’elles emploient, et donc aux besoins de ces jeunes enfants eux-mêmes.


Aujourd’hui, quoi qu’il en soit, l’essentiel de l’offre d’accueil est organisé pour des horaires dits classiques (entre 8 heures et 19 heures). Les horaires atypiques ou l’accueil en urgence regroupent un ensemble de situations variées (missions intérimaires, travail en alternance, journée longue, travail de nuit, le dimanche ou le week-end) qui suscitent un besoin et des modalités d’accueil et de garde différents. Si certains couples réussissent à s’organiser de façon à pouvoir eux-mêmes garder en alternance leurs enfants, d’autres familles - et notamment les foyers monoparentaux - sont exposées à d’importantes contraintes, face auxquelles elles ne trouvent pas toujours de solution.


Lorsque les parents travaillent le week-end ou la nuit, les grands-parents et les autres membres de la famille sont particulièrement sollicités pour garder les enfants. Ainsi 17 % des 0-7 ans dont les deux parents exercent une activité professionnelle sont-ils gardés de la sorte le week-end, et 7 % gardés la nuit en semaine.


Par ailleurs, respectivement 29 % et 17 % des enfants dont les parents travaillent sont parfois gardés en semaine, le matin entre 6 heures et 8 heures, et le soir entre 19 heures et 22 heures. Pour la garde matinale (entre 6h et 8h) et en soirée (entre 19h et 22h), la famille est mobilisée pour les tranches horaires extrêmes (entre 6h et 7h30 et entre 19h30 et 22h). Si les professionnels sont davantage présents pour les autres tranches (entre 7h30 et 8h et entre 19h et 19h30), ce sont presque exclusivement des assistant-e-s maternel-le-s ou des gardes à domicile, les structures collectives n’assurant qu’une partie très marginale de l’accueil en horaires atypiques.


La réforme de la Prestation de service unique (PSU), généralisée au 1er janvier 2005, a permis de mieux répondre à l’évolution des amplitudes d’ouverture liées à l’évolution des rythmes et des temps de travail en se basant sur un financement horaire et non plus journalier des places par les familles et par les CAF. Ces modalités de financement ont conduit un nombre croissant d’établissements à transformer leurs places mono-accueil en places polyvalentes, et par conséquent à devenir des établissements multi-accueil. Elles permettent donc d’assurer une plus grande flexibilité de l’offre.


Les initiatives locales d’accueil d’urgence ouvertes 24h sur 24 ou en horaires atypiques et répondant aux besoins spécifiques de certains parents restent cependant marginales.


L’articulation entre vie professionnelle et vie familiale est une question délicate pour toutes les familles. Elle est en outre essentielle pour toute politique de réduction de la pauvreté des enfants, notamment des moins de trois ans et des jeunes enfants scolarisés.


Or la question de l’accès des jeunes enfants aux modes d’accueil est à l’intersection de trois constats :

  • les inégalités face aux savoirs et à l’éducation se creusent dès les premiers âges tandis que les moyens d’intervention de la puissanc

e publique sont mal distribués pour favoriser un développement harmonieux de tous les enfants ;

  • la difficulté d’accès à l’emploi des parents et notamment des femmes pauvres est amplifiée par les règles d’attribution des places d’accueil collectif qui sont le plus souvent réservées aux couples bi-actifs ;

  • le coût des modes d’accueil représente une dépense proportionnellement plus importante dans le budget des ménages pauvres que dans celui des ménages riches.


  • On sait désormais que les contraintes de l’offre de mode d’accueil pèsent essentiellement sur les ménages les plus pauvres : dès 2000, les familles situées dans la tranche des 20 % inférieurs des revenus n’avaient accès que dans 7% des cas à un-e assistant-e maternel-le et dans 5% des cas à une place en crèche (contre 19% et 9% pour l’ensemble des familles, 27 % et 8 % pour les familles situées dans la tranche des 20 % supérieurs des revenus).


    Dans ces conditions, le recours au Complément de Libre Choix d’Activité (CLCA) de la Prestation d’Accueil du Jeune Enfant (PAJE) constitue en réalité une solution contrainte.


    En pratique, ce sont les mères en situation précaire - notamment celles qui sont en contrats à durée déterminée -, les employées du secteur privé et les femmes les moins diplômées qui ont tendance à déserter plus fréquemment le marché du travail que les autres, et qui abandonnent donc classiquement à leur conjoint la charge de pourvoir au budget familial.


    On observe, pour conclure cette approche des conditions de « choix » des parents en matière de mode d’accueil de leurs jeunes enfants, qu’un décalage persistant se manifeste entre les souhaits des parents, les besoins des enfants et l’offre existante. Selon le CREDOC, 21 % des parents avec des enfants en bas âge estiment que la crèche collective est le mode d’accueil le plus satisfaisant, alors que 13 % seulement ont pu y avoir recours. Ce décalage est plus important encore pour les familles aisées. Les familles modestes ont quant à elles une préférence souvent plus marquée pour le recours aux assistant-e-s maternel-le-s, dont le coût s’avère pourtant prohibitif, malgré la PAJE-CMG. Il y a donc une forte proportion de comportements parentaux contraints, et ceci dans toutes les catégories sociales.


    C’est pourquoi la priorité doit aller au développement de l’offre de modes d’accueil diversifiés, adaptés aux besoins personnels et locaux - tels qu’initiés par le développement du « multi-accueil » dans les établissements d’accueil collectif voire familial - plutôt qu’à un renforcement des prestations liées à l’interruption de la vie professionnelle. Les multiples propositions, envisagées depuis 2006, et visant la création d’un « service public de la petite enfance » de même que la reconnaissance d’un droit éventuellement opposable (mais à qui ?) au mode d’accueil et l’affirmation du caractère obligatoire de la compétence des collectivités locales (mais lesquelles ?) en matière d’accueil de la petite enfance s’inscrivent dans le fil de ces constats et des analyses qui en résultent. Elles ne peuvent cependant s’inscrire que dans le cadre d’un projet, non seulement d’accueil, mais aussi éducatif, c’est-à-dire à la fois plus global, non confiné à la seule petite enfance et plus résolument territorial.




    Les principales composantes qualitatives de la notion d’accueil de la petite enfance (II)


    L'accueil des jeunes enfants dans les structures collectives


    Depuis leur création, il y a plus de 160 ans, jusqu'à il y a une quarantaine d'années, les finalités de ces structures étaient essentiellement sécuritaires et hygiénistes. On y parlait de « garde » et non pas d'« accueil » (et le mot « garde » reste encore très présent dans le discours courant).


    Il s'agissait en particulier d'assurer un contrôle social sur les comportements des mères, les pratiques populaires en matière de puériculture et de soin des nourrissons et d'éducation précoce. Il s'agissait de « moraliser les classes indigentes en les secourant », de lutter contre leur « intentions répréhensibles », comme on pouvait le lire dans certains écrits politiques et médicaux du 19èmeet du 20èmesiècles.


    Le rôle important du Conseil général et du service départemental de PMI en matière d'agrément et de contrôle de ces structures (comme d'ailleurs des assistant-e-s maternel-le-s) reste un marqueur historique de l’accent ainsi porté sur la protection de l'enfance et sur les priorités sanitaires (désormais physiques et psychiques) de l'accueil des jeunes enfants. Le retour de cette tendance s’est récemment manifesté avec l’instauration, par la loi du 5 mars 2007 relatif à la protection de l’enfance, d’un examen « psychosocial » obligatoire (et non plus systématiquement proposé, comme le préconisait alors le « plan périnatalité ») destiné à la mère (et non plus au couple parental) au 4èmemois de grossesse.


    L'émergence, depuis une quarantaine d'années, du concept prédominant d'accueil est contemporaine :

    • d'un accueil progressivement accru et amélioré des parents : la famille n'est plus un « vecteur de microbes », et l'accueil des parents se substitue à leur mise à distance ;

    • d'une meilleure connaissance du développement de l'enfant, de ses besoins de sécurité physique et affective comme conditions non seulement de sa « sauvegarde » mais aussi et surtout de son ouverture relationnelle et de sa socialisation, et au total de son éducation globale précoce ;

    • autrement dit, d’un rééquilibrage des fondamentaux : la santé et l’éducation sont les piliers conjoints du développement personnel et social.


    La prise en compte de ces nouvelles dimensions de l'accueil et des nouvelles missions des structures d’accueil des jeunes enfants induisent progressivement une promotion de la notion de projet d'établissement pour y guider l'action éducative collective (c’est-à-dire auprès du collectif des enfants accueillis par le collectif des professionnels accueillants) et pour la coordonner avec celle des parents.


    Il s’en déduit au passage l'importance :

    • de la qualité et du caractère accueillant des locaux, et pas seulement de leur cubage et de leur conformité aux normes règlementaire de sécurité ;

    • mais encore et surtout de la qualification des différents professionnels, de leur formations initiales et continues, de leurs capacités de travailler ensemble, en complémentarité de rôles, et non pas de façon étanche et segmentée, auprès des enfants.


    Ce sont là autant de conditions permettant de mettre en valeur :

    • le rôle du projet d'établissement et de ses deux volets – éducatif et social - à cet égard, et de l'adhésion / implication des parents dans son élaboration et sa mise en œuvre ;

    • le rôle du projet pédagogique propre à l'équipe des professionnels, et qui se distingue du volet éducatif du projet d'établissement.


    Il faut mentionner, à ce sujet, l’existence d’un débat sur la notion de « référent » dans les structures d’accueil collectif des jeunes enfants. La personne du référent correspond :

    • certes à une fonction explicite pour l'enfant : celle de repère, de source et de cible d'une certaine focalisation relationnelle dont l’enfant peut avoir besoin à certaines phases de son développement ;

    • mais à une fonction plus implicite pour les adultes, et qui doit faire l’objet de précautions préalables : les professionnels ne sont pas des substituts parentaux et, notamment, maternels, qui devraient s’efforcer d’accueillir « comme une mère », de même que les parents ne sont pas des consommateurs de garde professionnalisée.


    A cet égard, le récent retour en vogue, à peine «relooké», du concept d’« attachement » et de la notion de « figure d'attachement » est porteur d’ambiguïtés.


    Nous ne sommes plus en 1946, date où la création de ce concept et de cette notion a trouvé toute sa pertinence pour décrire et prévenir la situation de carence de soins relationnels à laquelle avaient été exposés des jeunes enfants confiés à des institutions collectives, pendant et dans les décours immédiats de la seconde guerre mondiale. La formation des professionnels, l’organisation et le fonctionnement des structures et l'option co-éducative permettent aujourd’hui de pallier l’essentiel de ces risques abandonniques et de garantir une continuité et une cohérence relationnelles à l’égard des jeunes enfants accueillis collectivement hors de leurs familles.


    Il importe en revanche de veiller à ce que la réactualisation de ces bases théoriques ne vienne contribuer à culpabiliser les mères (et les pères) qui travaillent et les professionnel-le-s auxquel-le-s ils confient leurs jeunes enfants. Il importe, tout au contraire, de prendre en compte l'environnement, les choix et les contraintes sociaux, économiques et professionnels des familles. Cela doit permettre de penser l'accueil collectif de leurs enfants dans un contexte réel et actuel, et non pas en référence à une idéologie materno-centrée aujourd’hui dépassée.


    Il importe tout autant de se prémunir des idéologies individualistes et consuméristes prédominantes qui peuvent inspirer certains parents, lorsque tel ou tel d’entre eux entend mettre la structure au service de son enfant, sans considération des autres enfants et des dimensions éducatives et pédagogiques collectives de cette structure. Ces tendances risquent de reproduire par la suite leurs effets délétères en milieu scolaire.


    C’est dire au total, et de nouveau, l'importance de promouvoir un accueil collectif structuré autour d'un projet éducatif et d’un projet social qui s'assument comme tels, et qui ne réduisent cet accueil collectif ni à un empilement d’accueils personnalisés, ni à des conceptions exclusivement psychologisantes de ce que ceux-ci nécessitent et recouvrent.



    L'accueil des parents dans les structures dédiées à la petite enfance


    C'est à la lumière de l'ensemble de ces considérations que doit être pensé l'accueil des parents, dans une perspective non seulement de confiance mais aussi de respect mutuels qui déterminent également le respect de la personne de l'enfant.


    L'accueil des parents ne se résume pas aux temps de remise et de reprise de l'enfant. Il ne s’exprime pas seulement, non plus, dans le cadre de « réunions de parents » :

    • organisées pour les informer et répondre à leurs questions, au motif qu’ils sont considérés ou se donnent à percevoir d'emblée comme ignorants, passifs et inquiets ;

    • et/ou animées par des médecins et des psychologues en référence à la vieille tradition du contrôle social hygiéniste, aujourd’hui renommé «soutien à la parentalité» ; la parentalité n'est pourtant pas une fonction a priori défaillante, encore moins une source ou une forme de maladie, même si l’on voit émerger ici ou là, dans des structures sanitaires, des « unités de parentologie » !).


    Pour autant, des temps et occasions spécifiques d'accueil s'imposent, et ceci en direction des deux parents :

    • phase de prise de contact, de rencontre de l'équipe, de visite des locaux (avec l'enfant) ;

    • phase de signature des documents d'admission, en veillant à une présence et une participation paritaire, surtout si les parents sont séparés ou en voie de séparation ;

    • phase d'adaptation, d'intégration, de séparation (cette phase n'étant pas à appréhender comme systématiquement difficile) ;

    • phases de résolution de problèmes particuliers intercurrents (à l'initiative éventuelle des parents), voire accueil d'urgence ;

    • phase d'information et de préparation lors de la transition vers l'école.


    Au-delà de ces temps et occasions spécifiques, l'accueil est une posture permanente, quotidienne, évolutive et nécessairement interactive, où chacun – professionnel et parent - doit pouvoir prendre en considération les contraintes et les difficultés mais aussi les ressources et les potentialités de tous les autres acteurs de la coéducation.


    La posture accueillante qui doit se manifester à l'intérieur de la structure, à la lumière et avec l'appui de son projet, peut aussi se manifester entre l'ensemble des équipements, services et professionnels extérieurs et de proximité dédiés à la petite enfance et à son accueil. Cela passe par une mise en réseau visible pour les parents et ouverte à leurs propres réseaux relationnels, par la recherche de coopérations plutôt que de simples juxtapositions ou, pire, de compétitions entre les différentes ressources locales ainsi mobilisées. La commune joue ici un rôle essentiel de pilote des échanges, de l'information et de la communication.


    L’ouverture sur l’environnement de la structure est aussi l’un des enjeux de ces formes approfondies de l’accueil des parents que représentent :

    • la participation des parents à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation de certains aspects du projet d’établissement ;

    • de leurs implications dans la dynamique des conseils d’établissement, quand ils existent.



    L'accueil des jeunes enfants par les assistant-e-s maternel-le-s


    Quelques remarques complémentaires peuvent être formulées s’agissant des spécificités des accueils assurés par des assistant-e-s maternel-le-s agréé-e-s.


    Leur «offre» d'accueil constitue une réalité quantitative, notamment en zones rurales et péri-urbaines éloignées du centre d'agglomération, où cette offre à la fois traditionnelle et de nature libérale dépasse souvent celle des structures collectives municipales ou associatives.


    La souplesse (théorique) des horaires d'accueil des assistant-e-s maternel-le-s et le caractère parfois perçu comme plus sécurisant de la relation personnalisée qu’elles/ils établissent avec les enfants et les parents séduisent les parents de milieux modestes ou contraints par leurs horaires de travail. Mais leur coût les rend moins accessibles aux parents à petits revenus que le coût des structures collectives.


    Les communes peuvent aider les assistant-e-s maternel-le-s à sortir de leur isolement, à travers notamment la création de RAM (avec le soutien des CAF) et leur recrutement dans le cadre de crèches familiales municipales ou associatives. Celles-ci peuvent notamment être dotées d’un projet d’établissement et d’un règlement intérieur, voire d’autres outils (réunions de parents, etc.) permettant de prévenir, gérer et résoudre les éventuelles difficultés entres parents et assistant-e-s maternel-le-s.


    Pour plus personnalisé qu’il soit, l’accueil des enfants par des assistant-e-s maternel-le-s, notamment libérales et salariées par les parents en position d’employeurs, peut comporter aux yeux de ceux-ci plus d’incertitudes sur la dynamique coéducative et parfois moins de perspectives de socialisation précoce des enfants. Cet accueil est aussi exposé à certains travers liés à la logique libérale du rapport «offre/demande» au plan local : plus la demande dépasse l’offre, plus les assistant-e-s maternel-le-s peuvent «sélectionner» les parents selon les horaires, les attentes et toutes autres caractéristiques dont ils font état. L’idée même de l’accueil s’en trouve profondément affectée.




    Tendances actuellement observées dans le champ de l’accueil de la petite enfance


    On observe de fait une ouverture progressive - mais pas nécessairement progressiste - de l’accueil de la petite enfance aux logiques du marché.


    Ainsi, au niveau des structures existantes :

    • l’aide publique aux structures collectives (et même au recours aux assistant-e-s maternel-le-s) tend à s’effacer devant la solvabilisation individuelle ou familiale de la demande ; ainsi, depuis sa création en 2004, le coût de la Prestation d'Accueil du Jeune Enfant – PAJE - et de ses différents compléments est-il passé de 8 à 11 milliards d’euros ;

    • le choix d’aider les familles plutôt que les structures est non seulement plus coûteux pour la collectivité, mais il accroît aussi les inégalités d’offres et d’accès.


    L'accent mis sur la satisfaction du «besoin individuel - ou familial - de service» d’accueil se traduit :

    • par l'apparition et l'implantation, recherchée ou encouragée par certaines municipalités, d'entreprises de crèche, qui font valoir leur logique concurrentielle sur le marché de l'accueil - plutôt que le projet d'établissement - comme facteur d'attraction (et de sélection) des parents ;

    • par la création de crèches d'entreprise, qui peuvent représenter une régression historique aux premiers âges du capitalisme industriel, mais aussi d'intéressantes évolutions si les Comités d'entreprise et donc les parents sont associés à leur conception, à leur gestion et à leur évaluation, et si la qualité d'accueil et le respect de la personne de l'enfant y restent prioritaires.


    On peut cependant imaginer ou conforter d'autres façons pour les entreprises de se montrer accueillantes envers les parents et respectueuses envers leurs enfants :

    • par une meilleure prise en compte des besoins spécifiques des parents (mères et pères), notamment par l'aménagement d'horaires de travail appropriées (comme certaines grosses entreprises commencent à le faire pour leur cadres) : conforter la condition parentale des salariés les rend d’ailleurs souvent plus concentrés, plus productifs, plus «présents» sur leurs lieux de travail (et moins sujets aux absences liées à leurs contraintes parentales) ;

    • par la participation accrue des entreprises, surtout depuis la refondation de la taxe professionnelle, au financement de la création et du fonctionnement des structures d'accueil, sous l'égide et avec l’appui des communes (au moyen par exemple de systèmes croisés de réservation de places pour leurs salariés, comme on le voit par exemple avec le secteur hospitalier).



    Bilans et perspectives en matière d’accueil de la petite enfance


    L'accueil de la petite enfance tend à (ou risque de) devenir une prestation de service, ouverte à différents types de concurrence, et non plus un enjeu éducatif et social local, garanti et soutenu par l'Etat et la CNAF, pour tous les enfants.


    Cependant, et même en France où la situation est meilleure que dans la plupart des pays européens, Scandinavie mise à part, le nombre d'enfants dépourvus de modes institutionnels d'accueil dépasse largement, on l’a vu, celui des enfants qui en disposent. Au 1er janvier 2009, les enfants de moins de 3 ans sont surtout gardés par leurs parents : 63 % passent la majeure partie de la semaine avec eux. En dehors des parents, l’accueil chez un-e assistant-e maternel-le agréé-e est le plus fréquent (18 %), devant celui dans une structure d’accueil collectif (10 %). Nombre de familles, et notamment de femmes, se résignent à cette réalité plutôt qu'elles ne la suscitent par leurs choix, si ces «choix» ne résultent que de contraintes.


    Certes, il revient en premier lieu et en première instance aux familles d'accueillir les enfants, leurs enfants. Mais, pas plus que l'enfant ne « fait » la famille - car elle lui préexiste - , l'enfant n'appartient à sa famille. Il appartient en revanche à tous les adultes que l'enfant côtoie - ceux qui peuplent ses espaces de vie et dont il reçoit matière à forger l'avenir - de contribuer à son accueil. Au sens large, comme au sens institutionnel, l'accueil du jeune enfant est donc une mission de service public, répartie en France entre plusieurs responsabilités légales, obligatoires ou facultatives : celles des communes, des départements, de l'État et des instances de sécurité sociale – CNAF et CAF notamment – qui contractualisent avec eux. Le développement quantitatif et qualitatif des structures multi-accueil illustre au mieux la souplesse et la réactivité de ces partenaires et le

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    3 novembre 2010 3 03 /11 /novembre /2010 17:37

    Voici une nouvelle contribution, celle d'Hubert MONTAGNER que nous reproduisons  avec son aimable autorisation

     

     

    LES JARDINS D’EVEIL


    Hubert MONTAGNER *



    Avec la création des jardins d’éveil, l’objectif du gouvernement français est officiellement de pallier la faiblesse de l’offre de “garde” pour les enfants de moins de trois ans. Le pays compte en effet à peine un million de places pour 2,4 millions d’enfants concernés. C’est pour répondre à cette insuffisance que Madame Nadine MORANO, Secrétaire d’Etat chargée de la Famille et de la Solidarité, a promis l’ouverture de 8000 places dans les jardins d'éveil d’ici 2012. En s’abritant derrière l’intérêt de l’enfant (voir plus loin), elle affirme que la création des jardins d’éveil “permet une nouvelle approche en matière de politique d’accueil de la petite enfance dans notre pays”. En créant ces structures, la Secrétaire d’Etat reprend la proposition de la députée Madame Michèle TABAROT dans un rapport remis en 2008 au Premier Ministre, et reprise par les sénateurs Madame Monique PAPON et Monsieur Pierre MARTIN, également en 2008 . Deux arguments majeurs sont avancés :


    LES ARGUMENTS DES PARLEMENTAIRES


    1. “L’enjeu de ce développement de l’offre d’accueil est d’apporter une véritable liberté de choix aux femmes qui souhaitent travailler : aujourd’hui, la pénurie est telle que beaucoup de mères sont contraintes de prendre un congé parental contre leur gré” (rapport des sénateurs Mme PAPON et M. MARTIN).

    Tous les observateurs sont d’accord pour reconnaître l’insuffisance de l’offre d’accueil des jeunes enfants, à la fois pour des raisons familiales, sociales, professionnelles, sociétales... mais aussi pour mieux répondre aux besoins et particularités des enfants. Mais, dans le rapport des deux sénateurs, on voit poindre l’idée que le congé parental n’est pas une nécessité puisque “beaucoup de mères sont contraintes de prendre un congé parental contre leur gré”. Il pourrait donc être supprimé dès lors que les mères auraient la possibilité de confier leur enfant à un jardin d’éveil, ou alors sa durée serait diminuée. La durée du congé parental passerait de trois ans possibles à un an au maximum. C’est en tout cas ce que suggère explicitement le rapport des sénateurs. Autrement dit, à travers cette suggestion, on voit déjà se dévoiler l’une des motivations sous-jacentes à la création des jardins d’éveil : une motivation d’ordre comptable... Or, dans les familles en souffrance qui cumulent les difficultés, ou en cas d’adoption, une année de congé parental n’est pas forcément suffisante pour que des liens d’attachement “sécure” se nouent entre l’enfant et sa mère (et son père). Le gouvernement voudrait-il faire des économies au détriment de l’enfant, de sa mère, de sa famille ... et donc de la société de demain en s’abritant derrière “la liberté de choix” des “femmes qui souhaitent travailler” ?


    2. Selon la députée Mme TABAROT, “l’éveil préscolaire est une nécessité. Le jardin d’éveil aura pour mission principale de préparer la préscolariation à l’école maternelle”.


    L’éveil préscolaire est une nécessité”

    Mme TABAROT décrète que “l’éveil préscolaire est une nécessité”, sans préciser ce qu’il faut entendre par éveil comme si la signification et le sens de ce terme étaient évidents. Pour ceux qui se penchent sur le rythme veille-sommeil, l’éveil est l’action de se réveiller et de rester éveillé par opposition à l’endormissement, au sommeil et à la somnolence. Cependant, si on suit l’une des définitions du dictionnaire “le Petit Robert", l'éveil est “l’action de se révéler, de se manifester (facultés, sentiments)” ? Mais alors, s’agissant de l’enfant âgé de 2 à 3 ans, quelles facultés et quels sentiments devraient être révélés, et comment se manifesteraient-ils ? Est-ce qu’on entend par éveil “l’émergence” ou l’activation de telle ou telle potentialité, particularité, possibilité ou capacité sensorielle, motrice, comportementale, affective, relationnelle, sociale, cognitive, langagière ... ? S’agit-il de “l’éveil de l’intelligence”, de “l’éveil de l’imagination” (Le Petit Robert) ? Quelle que soit la définition, il est légitime de demander aux promoteurs des jardins d’éveil ce qui doit être “révélé”, “manifesté”... puisqu’ils doivent préparer à la préscolarisation (“l’éveil préscolaire est une nécessité”). “L’éveil préscolaire” à quoi et à qui, pour quoi et pour qui, pour faire quoi et pour quels potentialités, possibilités, capacités, “sentiments”, “facultés”... préscolaires. En d’autres termes, l’éveil désignerait-il de nouvelles émergences et de nouveaux développements du corps, de la motricité, de la sensorialité, de la vie émotionnelle et affective, des systèmes de communication, y compris le langage oral, des relations sociales et de la socialisation, des processus cognitifs, des constructions intellectuelles, de l’imaginaire, de la créativité ... ? “Eveil préscolaire” reste un terme flou, sans contenu.


    préparer la préscolariation à l’école maternelle”.


    Selon la députée et les sénateurs, “le “jardin d’éveil aura pour mission principale de préparer la préscolarisation à l’école maternelle” ... “Il s’agit de créer une nouvelle structure ambitieuse en termes d’accueil éducatif qui s’inscrive dans une forme de transition éducative qui permet de préparer chaque enfant à l’entrée en école maternelle”. Les sénateurs répondent ainsi au souhait de la commission des affaires culturelles du Sénat de dresser un état des lieux de la scolarisation des jeunes enfants. Mais, au nom de qui et de quoi devrait-on formater les enfants de 2 à 3 ans pour qu’ils soient préparés à la préscolarisation ? Les enfants seraient-ils génétiquement ou culturellement programmés pour une telle finalité ? Se pose-t-on ces questions dans les pays où il n’y a pas d’école maternelle… ?

    Posons au contraire qu’un enfant est d’abord une personne qui se développe à son rythme sans autre "finalité" que grandir et qui se réalise dans ses différentes dimensions et facettes, quelles que soient ses potentialités, possibilités et particularités, et non pas “simplement” un “pré-élève” qui se prépare à devenir élève. C'est au fil du temps qu'il acquiert des savoirs et connaissances de tout ordre non enfermés dans un déterminisme scolaire. Chacun se développe en fonction des influences combinées de ses gènes et des facteurs d’environnement, “nourri” de ses expériences, de ce qu'il mémorise, de ses constructions et acquisitions successives, et de son vécu. Qui pourrait reconnaître entre 2 et 3 ans les mécanismes, processus, acquisitions “naturelles” ou culturelles, et apprentissages spécifiques qui préparent à la préscolarisation, c’est-à-dire à l’école maternelle ?


    Selon les parlementaires, la création d’une nouvelle structure pour accueillir de façon spécifique des enfants âgés de 2 à 3 ans, se justifie parce que cette “tranche d’âges” serait différente des autres. On doit donc se demander en quoi les comparaisons avec la classe d’âge précédente (1 à 2 ans) et la classe d’âge suivante (3 à 4 ans) les rendraient différents.


    QUI SONT LES ENFANTS AGES DE 2 A 3 ANS ? SONT-ILS FONDAMENTALEMENT DIFFERENTS DES ENFANTS DE 1 A 2 ANS ET DE 3 A 4 ANS ?


    A les lire, il est clair que nos parlementaires ont des difficultés à définir des particularités ou “spécificités” qui caractériseraient les enfants âgés de deux à trois ans ... comme s’ils ne croyaient pas eux-mêmes à la “spécificité” de cette classe âges.

    Les raisons explicitées du choix de cette “tranche d’âge sont en effet à géométrie variable comme si les promoteurs du jardin d’éveil cherchaient des justifications à tout prix.


    Une caution intellectuelle


    En guise de préambule, les sénateurs s’abritent derrière l’opinion de Françoise DOLTO qui écrit dans La cause des enfants : “Quand on dit 2 ans et 3 ans, c’est comme si on disait 12 ans et 25 ans. A 2 ans, de trois mois en trois mois, les enfants évoluent énormément ; leurs intérêts, leur mode de langage au sens large du terme sont en continuelle mutation». Avec tout le respect que l’on doit à l’éminente psychanalyste, cela n’a aucun sens d’établir un parallèle entre d’une part les différences qui existeraient entre les enfants de 2 ans et les enfants de 3 ans, et d’autre part les différences évidemment aveuglantes entre les jeunes adultes de 25 ans et les enfants de 12 ans. Françoise DOLTO n’aurait pas écrit une telle énormité si elle avait pu, su ou voulu tenir compte des données de la recherche fondamentale sur le développement de l’enfant. En outre, n’importe qui aurait pu lui dire que, entre 1 et 2 ans, “les enfants évoluent énormément”, mais également entre 3 et 4 ans ... et pas seulement entre 2 et 3 ans. On ne voit pas en quoi les différences d’évolution seraient plus fondamentales, “énormes”, soudainement transformées (“en perpétuelle mutation")... entre 2 et 3 ans qu’entre 1 an et 2 ans, et aussi entre 3 et 4 ans, même si le langage oral devient alors de plus en plus élaboré et de mieux en mieux maîtrisé (voir plus loin). Le développement du petit de l'Homme ne se confond pas avec la maîtrise du langage oral, même si celui-ci fait de l’Homo sapiens sapiens une espèce très particulière.


    Une argumentation à géométrie variable


    Les deux-trois ans forment une tranche d’âge charnière”


    L’embarras de Mme TABAROT pour justifier les particularités des enfants de 2 ans par rapport à ceux de 3 ans tient dans deux phrases : 1. “Les deux-trois ans forment une tranche d’âge charnière qui relève d’une grande diversité sur le plan de la maturité psychique et physique. Ces jeunes enfants sont à la fois un peu grands pour fréquenter la crèche, qui est une structure plutôt conçue autour des tout-petits même si les rythmes de l’enfant font l’objet d’une attention particulière, et un peu petits pour une école plus enclin à les placer en situation d’apprentissage".

    Selon le rapport de Mme PAPON et M. MARTIN, l’enfant de 2 ans “doit passer du stade de « grand bébé » à celui de « petit écolier » alors que ses besoins physiologiques nécessitent une grande proximité et une forte intervention de l’adulte”. Il est aussi affirmé que “L’enfant de deux ans, ce n’est pas l’enfant de trois ans, et que l’enfant de deux ans a ses propres rythmes et besoins physiologiques qu’il est important de respecter. Rythmes de sommeil, besoins d’isolement ou de mouvement, tels sont les éléments qui doivent être pris en considération”.

    Autrement dit, les rythmes et les besoins de l’enfant de 2 ans seraient fondamentalement différents de ceux de l’enfant de 3 ans. Les éléments à prendre “en considération” seraient les “besoins physiologiques”, les “rythmes de sommeil”, les “besoins d’isolement ou de mouvement”. C’est évidemment simpliste et réducteur (voir plus loin). En outre, l’enfant de 1 à 2 ans et celui de 3 à 4 ans ont aussi des “besoins physiologiques”, des “rythmes de sommeil” et des “besoins d’isolement ou de mouvement” qui, également, “doivent être pris en considération”.

    L’affirmation que “Les deux-trois ans forment une tranche d’âge charnière”, ne repose donc pas sur des différences clairement objectivées, explicitées et argumentées entre les enfants de 2 ans et les enfants de 3 ans. En revanche, le constat que tout le monde peut faire est que, à 2 ans, à 3 ans ... à tout âge, les enfants diffèrent entre eux dans leurs particularités, qu’il s’agisse du développement corporel, de la motricité, des systèmes perceptifs, des comportements, des rythmes, des modes d’occupation de l’espace, des systèmes de communication (et pas seulement le langage oral), des stratégies cognitives... C’est d’ailleurs ce que le rapport admet en faisant état pour les enfants de 2 à 3 ans “d’une grande diversité sur le plan de la maturité psychique et physique”. C’est vrai à tous les âges. Mais alors, pourquoi considérer la troisième année comme “une tranche d’âge charnière” ?


    La classe d’âges de deux à trois ans serait l’âge charnière “d’acquisition d'une première autonomie”

    Dans l’appel à candidature de la Caisse Nationale des Allocations Familiales, chargée de mettre en oeuvre la création des jardins d’éveil, on lit que deux ans est un “âge charnière dans l'acquisition d'une première autonomie”. La CNAF reprend ainsi des éléments du rapport des deux sénateurs : “Qu’est-ce qu’un enfant de deux ans ? L’enfant de cet âge a ses propres rythmes de vie, il apparaît autonome ...”. On se demande si ces personnes savent de quoi elles parlent. Il n’y a pas en effet un “âge-charnière dans l’acquisition d’une première autonomie”. L’autonomie étant définie comme “un droit pour l’individu de déterminer librement les règles auxquelles il se soumet” (“Petit Robert”), elle est “plurielle” et multiforme selon les aspects du développement individuel et les acquisitions que l’on considère. Pour donner un exemple trivial, les enfants acquièrent le plus souvent l’autonomie locomotrice entre sept et quinze mois dès lors qu’ils peuvent se mouvoir librement par reptation, quadrupédie, debout en prenant des appuis... L’autonomie pour escalader une superstructure “sur les jambes” (escalier, plan incliné ..) et, ainsi, pour conquérir debout la troisième dimension de l’espace, est observée entre treize et seize mois, en tout cas lorsque les enfants peuvent évoluer en activité libre avec des pairs dans un lieu sécurisé et devenu familier. Dans ces conditions, l’autonomie dans les interactions sociales, les différents modes de communication et les échanges, se développe avant la fin de la première année et au début de la deuxième année. L’autonomie dans les interactions complexes qui nourrissent les processus de socialisation (coopération, anticipation du comportement du partenaire, entraide...) devient de plus en plus fréquente au cours de la deuxième année. L’autonomie dans les habiletés manuelles qui permettent d’emboîter, d’encastrer, d’assembler les objets est déjà “en place” avant la fin de la première année ou au début de la deuxième année. Etcetera. On ne peut donc pas affirmer que l’âge de 2 ans à 3 ans est une charnière dans “l’acquisition d’une première autonomie”.


    Le développement des moins de trois ans ne correspond pas au temps des apprentissages de type scolaire mais à celui des acquisitions sensorielles”

    Affirmer que “le développement des moins de trois ans” correspond au temps des “acquisitions sensorielles” n’a pas de sens et relève de la caricature. Si tous les systèmes sensoriels sont fonctionnels à la naissance (et déjà, pour certains, au cours de la vie intra-utérine ), le temps des “acquisitions sensorielles” ne se limite pas aux trois premières années pas plus que toutes les “acquisitions sensorielles” se font avant 3 ans. Indépendamment, de façon combinée ou en “interaction”, telles ou telles acquisitions sensorielles deviennent de plus en plus affinées, complètes, nuancées et complexes à tel ou tel moment du développement selon le système sensoriel que l’on considère et selon l’enfant, et non pas forcément et totalement avant 3 ans, mais parfois et plutôt entre 3 et 5 ans. C’est au fil des années, notamment au delà de 3 ans, que les enfants structurent plus ou moins précocement leurs systèmes perceptifs, c’est-à-dire le sens et la signification qu’ils donnent, par exemple, à telle ou telle sollicitation ou stimulation visuelle et telle ou telle sollicitation ou stimulation auditive, selon qu’ils traitent les informations de façon séparée ou selon qu’ils combinent et intègrent les “entrées” visuelles et auditives en un seul message. C’est vrai pour tous les systèmes perceptifs. Il n’est pas rare qu’à l’école maternelle, il faille apprendre aux enfants âgés de plus de 4 ans, parfois 5 ans, les formes, les volumes, le “spectre” des couleurs, les différentes gammes et catégories de bruits, sons, mélodies ... les odeurs, les saveurs, la texture des substrats, les étirements (la proprioception) ... On ne voit donc pas pourquoi il est affirmé que les acquisitions sensorielles se feraient avant 3 ans. Une nouvelle fois, pourquoi faudrait-il enfermer les apprentissages entre deux et trois ans dans une finalité “de type scolaire” ? Comment pourrait-on identifier ceux qui seraient “de type scolaire” et ceux qui ne le seraient pas ?


    L’enfant de deux ans serait un individualiste”

    Quand les sénateurs écrivent que “L’enfant de deux ans, c’est en quelque sorte un individualiste auquel il faut laisser le temps d’évoluer, de mûrir pour être en capacité un peu plus tard de devenir élève”, ils commettent un contresens total. En effet, la recherche a largement démontré que, pendant la deuxième année, les enfants multiplient “spontanément” avec leurs pairs les comportements affiliatifs que sont les offrandes, les “trocs”... Ils ont aussi toute une gamme de comportements de sollicitation manuelle, corporelle, vocale... (verbale chez ceux qui parlent), de coopération, d’anticipation du comportement des autres, d’entraide, plus généralement de conduites sociales. Je pourrais projeter de nombreuses vidéos qui montrent sans ambiguïté la réalité et la diversité des conduites affiliatives bien avant l’âge de 2 ans, et leur complexité croissante lorsque l’environnement s’y prête. On ne peut donc pas dire que, "en quelque sorte", “l’enfant de deux ans est un individualiste”.


    Quant au terme “mûrir”, j’en laisse la responsabilité aux sénateurs. Les enfants ne sont pas des fruits ou des légumes qui doivent mûrir, c’est-à-dire “attendre” tel ou tel âge pour “venir à maturité”, “grandir”, “se développer", " atteindre son plein développement”, acquérir de la maturité d’esprit, de la sagesse” (définitions du Petit ROBERT) sous le contrôle d’un processus de croissance, génétiquement programmé. Tous les chercheurs savent en effet que s’il y a un plan global de développement ancré dans le programme génétique de l’espèce et de l’individu, les facteurs d’environnement jouent un rôle majeur dans sa “réalisation”, son orientation fonctionnelle, son façonnement et son évolution au fil de l’âge. En outre, si on affirme qu’en laissant aux enfants le temps de “murir pour être en capacité un peu plus tard de devenir élève”, on admet, une fois de plus, que la finalité du développement, en particulier des processus cognitifs et des ressources intellectuelles, est la perspective de devenir un écolier. On retrouve toujours le même postulat, évidemment vide de sens.


    Entre 2 et 4 ans, et pas seulement entre 2 et 3 ans, le développement de l’enfant est “buissonnant”. Chacun investit ses processus cognitifs et ses ressources intellectuelles dans des savoirs et connaissances sans cesse affinés et remodelés. C’est un processus plus ou moins graduel et variable d’un enfant à l’autre. C’est à son rythme (quand il est prêt) qu’entre 2 et 4 ans la plupart des enfants apprennent et comprennent les caractéristiques physiques et les propriétés fonctionnelles d’un nombre “illimité” d’objets et structurent ainsi leurs perceptions, manipulations et réalisations. Mais, également, la signification et le sens du comportement et du langage des autres, la “gestion” des conflits, la configuration des espaces, les particularités des environnements et partenaires nouveaux. En d’autres termes, entre deux et quatre ans, les enfants se construisent et se reconstruisent à leur rythme selon les opportunités fournies par des environnements de plus en plus diversifiés, mouvants et complexes, à travers l’exploration et la découverte des espaces, des mobiliers, des objets et des partenaires ... sans qu’on puisse extrapoler à ce qu’on attendra d'eux entre quatre et six ans puis à l’école élémentaire. Entre deux et quatre ans, dans le cadre d’une autonomie de mieux en mieux maîtrisée et multiforme, l’enfant peut se donner les moyens de découvrir, montrer et démontrer, à son rythme, toute la gamme de ses possibilités et capacités à ses partenaires, de conquérir le monde dans sa diversité et sa complexité… indépendamment d’une projection pour “devenir élève”.


    Les besoins des enfants de 2 à 3 ans vues par les sénateurs Mme PAPON et M. MARTIN


    Le rythme éveil-sommeil” et les “rythmes de sommeil”

    Selon le rapport des deux sénateurs, Le jeune enfant a besoin de dormir à deux moments de la journée : le matin et l’après-midi. Non, cela dépend de l’enfant, de l’évolution de son rythme veille-sommeil au fil du temps .... Le rythme veille-sommeil étant défini comme l’alternance des épisodes de sommeil et des états de veille qui se succèdent au cours des 24 heures, certains enfants âgés de 2 ans ont déjà une rythmicité d’adulte, c’est-à-dire un long épisode de sommeil nocturne ininterrompu par un réveil et un temps de veille diurne ininterrompu par une sieste, même si, comme les autres, ils ont des fluctuations dans leur vigilance comportementale au cours de la phase éclairée. D’autres enfants du même âge ont deux ou trois épisodes de sommeil diurne. Par comparaison, si la plupart des enfants âgés de 4 ans développent encore régulièrement un seul épisode de sommeil diurne (la sieste), certains ont encore deux épisodes de sommeil au cours de la phase éclairée.

    De telles différences interindividuelles sont également observées chez les enfants “gardés” dans le milieu familial et chez ceux qui sont accueillis dans une crèche ou à l’école maternelle (quand il y a une possibilité de sieste). Dans une même famille, un enfant de 2 ans peut présenter régulièrement un rythme veille-sommeil sans épisode de sommeil diurne alors que son frère ou sa sœur développait au même âge deux siestes en plus du long épisode de sommeil nocturne. De grandes différences entre enfants existent aussi aux âges de six mois, un an... à tous les âges. Autrement dit, rien ne permet de considérer que l’âge de 2 à 3 ans se caractérise par une organisation particulière du rythme veille-sommeil, même si la majorité des enfants développent alors deux siestes. Ce qui devrait compter, c’est le respect du rythme veille-sommeil de chaque enfant dans ses différents lieux de vie (à la maison, à la crèche, au jardin d’enfants, à l’école maternelle et ailleurs), quel que soit son âge. Et non pas un à priori selon lequel il y aurait un rythme veille-sommeil spécifique de chaque âge.


    Les besoins affectifs”

    Selon les sénateurs, “L’intense besoin de sécurité des petits enfants ne peut se faire avec les pairs. La qualité de ce lien est conditionnée surtout par la sécurité de l’attachement aux parents. La plupart des enfants sécurisés avec leurs parents le sont aussi avec le professionnel référent du lieu d’accueil”.

    Bien entendu, la sécurité affective et les liens d’attachement qui se nouent et se renforcent entre l’enfant et sa mère, son père (les deux parents) dans un bain d’interactions accordées, c’est-à-dire dans l’ajustement des comportements, émotions, affects et rythmes, est un besoin fondamental. La sécurité affective est le “coeur” de l’enfant et le “moteur” de son développement. Cependant, des liens sécurisants et un attachement du type sécure peuvent aussi se tisser avec des pairs. Il est étonnant que, malgré les nombreuses recherches nationales et internationales, les sénateurs ignorent ou nient l’importance des relations affectives (et autres) de l’enfant avec ses pairs, en particulier entre 2 et 3 ans. Contrairement à ce que Alain BENTOLILA a écrit, rien ne permet d’affirmer qu’elles génèrent “une insécurité linguistique”.


    Les Besoins d’isolement” ou les “Besoins d’isolement ou de mouvement”

    Le constat est le même pour “les besoins d’isolement” ou “les besoins d’isolement ou de mouvement”. Tout d’abord, il est simpliste de distinguer isolement et mouvement, et encore plus de les opposer. En effet, entre deux et trois ans à la crèche ou à l’école maternelle, mais aussi plus tôt ou plus tard, un enfant peut choisir de se tenir à l’écart des autres, mais cela ne signifie pas qu’il s’isole de ses pairs ou des éducateurs. L’observation montre en effet que s’il est sollicité par un tiers, il répond par des gestes, postures, vocalisations ... et/ou paroles, selon les enfants et le contexte, et non par une attitude d’évitement ou d’isolement. Lorsqu’un enfant se met “simplement” en retrait (en “stand by”), cela ne signifie pas qu’il n’est pas disponible pour des interactions et échanges avec un ou des tiers. Par comparaison, un enfant du même âge peut apparaître en mouvement pour le mouvement (il est qualifié improprement d’hyperactif), et ne pas répondre aux sollicitations de ses partenaires comme s’il était “dans sa bulle”, “sur son nuage”, “dans sa forteresse”... Cela ne veut pas dire qu’il ne perçoit pas la signification et le sens des messages qui lui sont adressés. En fait, il faudrait concevoir les “objets” (jouets, ustensiles ...), les mobiliers, les espaces et l’environnement global, organiser les plages d’activités libres et proposer les activités structurantes, éducatives et/ou pédagogiques de façon que chaque enfant de deux ans (et aussi de moins de deux ans), de trois ans, de quatre ans ... puisse alterner de lui-même et à son rythme les temps de retrait par rapport au groupe, les “vrais” temps d’isolement (il “se met en position de non vigilance” et se déconnecte” de l’environnement), et les temps de mouvement. Mais aussi, les temps d’interaction et de communication, que les enfants soient ou non en mouvement, qu’ils soient ou non en retrait. Il est étrange que, dans la conférence de presse donnée le 4 novembre 2008 par les deux sénateurs Mme PAPON et M. MARTIN, il n’y ait pas un mot sur les réalités et capacités de l’enfant à communiquer dès lors qu’il en a la possibilité et l’envie (dans leur rapport, le mot communication est cité une seule fois ... à propos de l’histoire récente de l’école maternelle).


    A 2, 3, 4 ans ... tous les enfants ont des capacités de communication personnalisées, nuancées, diversifiées et complexes. Elles ne se confondent pas avec leurs capacités langagières. Même si le langage oral joue évidemment un rôle incontestable dans les échanges émotionnels, les processus de communication, les constructions cognitives, le façonnement et la mobilisation des ressources intellectuelles et, bien évidemment, l’organisation de la pensée. Et réciproquement. C’est déjà ce qu’on observe entre 1 et 2 ans, même si le langage oral n’est pas encore “clairement structuré et audible” chez la plupart des enfants. Parmi d’autres scientifiques, mes collaborateurs et moi-même avons étudié et décrit les capacités de communication des enfants de moins de 2 ans, notamment avec leurs pairs. Par exemple, dans deux articles publiés en 1993 respectivement par “Pediatrics”, le périodique officiel de la Société Américaine de Pédiatrie et par “Les Archives Françaises de Pédiatrie”. Nous avons montré notamment que, dans un lieu qui autorise la conquête de l’espace dans toutes ses dimensions avec cinq ou six pairs, les enfants de moins de 2 ans révèlent des conduites bien structurées de coopération, d’entraide et d’anticipation du comportement des pairs. Contrairement aux sénateurs, on ne peut donc affirmer que “entre deux et trois ans, les enfants sont généralement en situation de juxtaposition durant leurs phases de jeux”. En outre, “les séquences de collaboration entre eux" ne sont pas forcément "peu fréquentes et courtes”.

    Plus généralement, en créant à la crèche des conditions d’accueil sécurisant pour l’enfant et sa famille, en aménageant l’espace et le temps, en multipliant les stratégies relationnelles... afin que “tout soit a priori possible”, on observe que tous les enfants de moins de 2 ans révèlent un registre large, inattendu et complexe de potentialités, possibilités et compétences “cachées”, et en acquièrent de nouvelles. Y compris les autocentrés qui paraissaient repliés sur eux-mêmes, ceux qui se caractérisaient par des conduites d’évitement et de fuite, par une “hyperactivité” débordante et/ou par une agressivité hors de propos (sans raison apparente). L’émergence et le développement des capacités à communiquer et à s’approprier les espaces dans toutes leurs dimensions, ne sont donc pas fondamentalement ou seulement liés à l’âge. Elles dépendent aussi ou plutôt des conditions d’environnement, notamment quand les échanges avec les pairs stimulent et facilitent les interactions sociales. En d’autres termes, tout dépend de l’enfant et du contexte. Pas simplement de l’âge, voire pas du tout.


    Les besoins moteurs et cognitifs”

    Selon le rapport des sénateurs, l’enfant âgé de 2 ans “a besoin de se déplacer, de se mouvoir, d’expérimenter sur le plan de la motricité. Il est également très curieux mais sa capacité de concentration est très fragile. Au cours de la deuxième année, et déjà au cours de la première année, on observe effectivement chez les enfants un “besoin de se déplacer, de se mouvoir, d’expérimenter sur le plan de la motricité”. Mais, à aucun moment, la députée Mme TABAROT, les deux sénateurs Mme PAPON et M. MARTIN, sans compter la Secrétaire d’Etat à la Famille, ne font allusion à la nécessité d’aménager les espaces, les mobiliers et l’environnement pour que chaque enfant puisse révéler et développer ses possibilités et capacités réelles, et en acquérir de nouvelles (les sénateurs se contentent d’évoquer la “motricité spatiale”... sans la définir). Quand les enfants de moins de 2 ans peuvent libérer leurs conduites d’exploration dans un groupe de pairs, ils se montrent capables de s’approprier la troisième dimension de l’espace, par exemple l’escalade d’un escalier et d’une rampe, la conquête d’une mezzanine ou d’une plate-forme, la traversée d’un “tunnel”... En outre, ils peuvent ainsi satisfaire non seulement leur “besoin de se déplacer, de se mouvoir, d’expérimenter sur le plan de la motricité”, mais aussi structurer leur schéma corporel, c’est-à-dire la représentation ou l’idée qu’ils ont de leur corps dans toutes les dimensions de l’espace. Ainsi, des concepts spatiaux peuvent “naturellement” se développer bien avant l’âge de deux ans (au dessus, au dessous, en haut, en bas, derrière, devant, à gauche, à droite ...).

    Qui peut définir la capacité de concentration ? En revanche, on sait identifier et mesurer la vigilance comportementale et les capacités d’attention. Si la vigilance et les capacités d’attention des enfants non sécures ou insécures sont effectivement “fragiles” (réduites et “fugitives”), elles sont en revanche soutenues et durables chez les enfants sécures dès la deuxième année, en particulier lorsqu’ils observent des pairs à la conquête de l’espace. Tout dépend des enfants, de la composition du groupe de pairs, du jour, du moment, du contexte et des expériences vécues.


    Les apprentissages langagiers et le destin linguistique”

    Les spécialistes de la petite enfance insistent sur l’importance des apprentissages de la langue comme élément essentiel d’accès à la lecture. La maîtrise des mots à l’oral préfigure la capacité à apprendre à lire. En ce sens, faciliter l’augmentation d’un capital de mots est primordial” (rapport de Mme TABAROT). Oui, bien entendu. Mais cela ne signifie pas qu’il faille formater les jeunes enfants dans des apprentissages formels et explicites de la langue. Etroitement imbriqués, le langage, les savoirs et les connaissances de tout ordre qui façonnent le fonctionnement du cerveau et organisent l'intelligence, peuvent être acquis, maîtrisés et consolidés au moyen de démarches, situations, méthodes et techniques différentes de celles qui nourrissent le dogme des apprentissages en situation d'apprentissage formel et explicite. Et souvent plus efficacement et beaucoup mieux, surtout chez les enfants qui ont des difficultés à comprendre et apprendre. Il y a “trente six” façons d'apprendre et un nombre infini de situations qui permettent aux enfants de comprendre et d'apprendre, notamment lorsque les différents modes d'expression sont libérés.

    On ne peut pas affirmer que “la période deux-trois ans est l’âge fondamental de l’acquisition du langage”. En effet, il est clair que certains enfants développent déjà peu ou prou le “langage oral” au cours de la deuxième année. Cependant, si on se fonde sur les données des recherches longitudinales après la naissance et tout au long des premières années, ainsi que sur les observations et le vécu des éducateurs de jeunes enfants, “l'émergence» et le développement du langage oral dans ses dimensions émotionnelle, affective, relationnelle, sociale (communiquer), linguistique («parler»), cognitive et intellectuelle («penser», «comprendre», «apprendre»), apparaissent indissociables des combinaisons plurisensorielles et comportementales qui enveloppent et englobent la parole. En d'autres termes, le langage oral est un joyau qui ne peut briller en dehors de l'écrin constitué par le regard, les postures, attitudes et contacts corporels, les expressions faciales, les mouvements des mains, les gestes, les vocalisations et autres bruits oraux, plus généralement les «manifestations» qui précèdent, accompagnent et suivent les productions langagières, sans oublier les odeurs et les «saveurs» des partenaires et de l'environnement. C'est grâce à sa capacité de diversifier et symboliser les combinaisons « œil à œil », locomotrices, manuelles, gestuelles, vocales, langagières et autres que l'enfant structure et organise son langage oral.

    Que propose le rapport des sénateurs pour prendre ces données en considération ? Rien, alors qu’ils se préoccupent de la préparation à “la préscolarisation à l’école maternelle” et qu’ils critiquent l’école maternelle.


    Les critiques formulées à l’égard de l’école maternelle


    Voulant justifier la création des jardins d’éveil pour les enfants de deux à trois ans, les sénateurs Madame PAPON et Monsieur MARTIN essaient de disqualifier l’école maternelle, structure concurrente qui accueille aussi des enfants de cette classe d’âges, plus souvent ceux qui sont âgés de deux ans et demi à trois ans. Leurs critiques sont ainsi formulées : “des locaux parfois peu adaptés, des effectifs nombreux, un manque de souplesse des horaires, des activités imposées, peu de jeux libres, de nombreux temps d’attente”. “Curieusement”, les sénateurs épargnent les crèches dont la grande section reçoit également des enfants de 2 à 3 ans. Examinons ces critiques avant de considérer ce que les jardins d’éveil proposent, ou seraient en mesure de proposer, et le “non dit” (“non écrit) et "le flou" qui en font des coquilles vides.


    Des locaux parfois peu adaptés aux jeunes enfants”.

    Il est clair que les locaux dans lesquels les enfants sont accueillis à l’école maternelle sont souvent exigus, non aménagés, mal conçus, mal aménagés pour que les différents enfants, en particulier ceux qui sont porteurs d’un handicap, puissent se réaliser dans leurs potentialités, possibilités et capacités. Par exemple, faute d’un budget suffisant, il y a rarement un vrai lieu d’accueil spécifique qui permette aux enfants de vivre leur sécurité affective en continuité avec le milieu familial, ou de la restaurer si elle s’est dégradée (la situation n’est pas tellement meilleure dans les crèches à cause, également, de problèmes budgétaires). Il n’y a pas souvent un lieu réservé au sommeil (il n’y en a pas toujours dans les crèches). Les lieux d’hygiène et les toilettes sont souvent insuffisants ou mal conçus, parfois mal entretenus, en particulier pour les plus petits (c’est habituellement mieux dans les crèches). Plus globalement, la surface utile est le plus souvent insuffisante pour un effectif d’enfants trop élevé (parfois plus de trente “élèves” dans la petite section). Ce qui, en plus des convictions éducatives et pédagogiques de nombreux enseignants, conduit à la sectorisation de l’espace en “coins d’activités” au détriment des activités libres, des conduites exploratoires, de la découverte et de la conquête de l’espace dans toutes ses dimensions, et en toute sécurité. Pourtant, les enseignants, les parents, les associations, les chercheurs ... dénoncent depuis des lustres le manque d’espace et la non fonctionnalité des locaux, tout en soulignant les bénéfices que les enfants retirent ou peuvent retirer du temps passé en petite section ... malgré tout. En outre, pourquoi a-t-on démantelé les superstructures sécurisées qui avaient été installées dans les écoles maternelles (et les crèches) au cours des années 1980 et 1990 (mezzanines, plates-formes, “parois d’escalade”...) ? Pourquoi certaines petites sections n’ont pas un lieu spécifique qui permette de respecter le rythme veille-sommeil de chaque enfant ?

    Il faut améliorer à l’école maternelle les lieux et conditions d’accueil, de sommeil, d’hygiène (surtout dans les toilettes), d’activités libres, d’activités éducatives et/ou pédagogiques, tout en réduisant les effectifs. Et non pas remplacer les petites sections par des jardins d’éveil. Ces structures ne sont en effet que des coquilles vides ou floues, en tout cas si on se fonde sur les rapports de Madame TABAROT, Madame PAPON et Monsieur MARTIN, ainsi que le silence, la suffisance et l’autosatisfaction sans bornes de la Secrétaire d’Etat à la Famille.


    des effectifs nombreux”

    Là, les sénateurs ont tout à fait raison. Nombreux sont ceux qui ont dénoncé le nombre trop élevé d’enfants par adulte à l’école maternelle, en particulier dans la petite section. Ceux qui sont en difficulté ne peuvent pas tirer leur épingle du jeu, faute de pouvoir s’installer dans une sécurité affective minimale (enfants repliés sur eux-mêmes, timides, craintifs, mutiques, agités, “hyperactifs”, agressifs, agresseurs...), les enseignants fussent-ils les meilleurs du monde. Le ratio nombre d’enfants par adulte doit impérativement être réduit dans les classes de l’école maternelle.


    L’école maternelle a une fonction de première socialisation qui se fonde sur des savoirs”.

    Comment peut-on affirmer que l’école maternelle a une fonction de première socialisation ? En effet, accueillis à la crèche, chez une assistante maternelle, dans une halte-garderie ... les enfants de moins de deux ans s’engagent déjà avec leurs pairs dans des interactions et communications élaborées et diversifiées qui fondent les relations sociales (voir précédemment). Ils découvrent alors les différences des uns et des autres, apprennent à les reconnaître, à faire reconnaître leurs propres particularités et à s’accorder à autrui, c’est-à-dire à s’installer dans une vie de groupe apaisée, au moins à certains moments, et ainsi à se socialiser, y compris lorsqu'il y a des conflits et des compétitions. Il est donc faux d’affirmer que “l’école maternelle a une fonction de première socialisation”.

    En outre, pourquoi et comment cette “fonction se fonde sur des savoirs”. De quels savoirs s’agit-il ? Les interactions sociales ne seraient-elles pas possibles si elles ne reposaient pas sur des processus cognitifs ? Les échanges émotionnels et affectifs n’auraient-il pas une fonction de socialisation ?


    Le cadre relativement rigide et contraignant de la journée scolaire alternant activités individuelles ou collectives, temps d’apprentissage et phase d’attente, n’est pas sans poser des difficultés d’adaptation à nombre de jeunes enfants qui ne disposent pas encore de la maturité nécessaire pour faire face à toutes ses exigences”. Il y a à l’école maternelle “des activités imposées, peu de jeux libres, de nombreux temps d’attente”

    Si les enseignants sont, logiquement, orientés vers l’apprentissage et l’acquisition de connaissances”, on ne peut pas leur reprocher de mettre en oeuvre toutes sortes d’activités qui canalisent le mouvement pour le mouvement (“l’hyperactivité”) et l’agressivité des enfants, surtout ceux qui expriment leur insécurité affective par une turbulence jugée excessive et/ou par des agressions “sans raison apparente”. Et aussi, des activités qui sortent les enfants de leurs conduites autocentrées, d’évitement ou de fuite. Tout en créant des situations susceptibles de développer les systèmes perceptifs, la motricité organisée, le schéma corporel, les interactions et les systèmes de communication, les processus cognitifs et les ressources intellectuelles (en lien ou sans lien avec les apprentissages scolaires). Il est effectivement souhaitable que les enfants puissent évoluer plus souvent et longtemps en activité libre pour qu’ils puissent explorer, découvrir et conquérir des espaces et des mobiliers à leur rythme, en interaction ou non avec les pairs, et puissent ainsi se construire dans la troisième dimension (hauteur et profondeur), et pas seulement sur des surfaces, c’est-à-dire pour qu'ils puissent s'approprier des toboggans, escaliers, mezzanines, plates-formes, passerelles de déambulation, tunnels ... Il est également souhaitable que les enfants passent moins de temps à attendre. Mais, c’est un pari difficile avec un effectif qui, selon les écoles, les lieux, les communes ... dépasse parfois ou souvent trente enfants, couramment vingt-cinq, alors qu’il n’y a que deux personnes pour “gérer” le groupe tout au long du temps scolaire, et sur une surface insuffisante et non aménagée pour répondre aux besoins des différents enfants. C’est d’autant plus difficile que les enfants ne sont plus aussi “dociles”, calmes et à l’écoute que dans les années 1970 et 1980, ou même 1990. Quand le gouvernement sera-t-il assez lucide, responsable et intelligent pour prendre conscience que la société n’est pas figée mais évolue en permanence, que de plus en plus de familles cumulent de plus en plus de difficultés matérielles, affectives, relationnelles, professionnelles, sociales ... et souffrent ? Quand va-t-il prendre conscience que cette vie quotidienne et “répétitive” est génératrice ou amplificatrice de stress, de mal-être, de maltraitance, d’anxiété, d’angoisses ... qui se retrouvent non seulement chez les parents mais aussi dans les équilibres affectifs, mentaux ... de leurs enfants ? Quand va-t-il prendre conscience que l’insécurité affective qui en résulte empêche les uns et les autres de libérer leurs émotions et leur langage oral, de les partager, et donc de nouer entre eux un attachement sécure, y compris à l’école ? Quand va-t-il prendre conscience que la classe et l’école elles-mêmes peuvent également générer ou amplifier l’insécurité affective des enfants qui ont le sentiment de ne pas être écoutés, aimés, reconnus... qui se sentent abandonnés, délaissés, rejetés, niés. Pourquoi le gouvernement ne donne-t-il pas à l’école maternelle les personnels et moyens suffisants pour que chaque enfant puisse tirer son épingle du jeu ... malgré ses difficultés ? Pourquoi Madame TABAROT, Madame PAPON et Monsieur MARTIN “oublient” d’évoquer cette question alors qu’ils se permettent de critiquer l’école maternelle ?


    "La qualité des modes d’accueil"

    Selon le rapport des sénateurs, “la qualité des modes d’accueil garantit, voire favorise le développement cognitif et social des enfants”. Pour que les enfants accueillis à la crèche, à l’école maternelle et dans toute autre structure pour la petite enfance, puissent libérer leurs relations sociales, organiser leurs processus cognitifs et mobiliser leurs ressources intellectuelles, tout en s'appropriant des savoirs nouveaux et de nouvelles connaissances, il faut au préalable qu'ils puissent s'installer et se conforter dans la sécurité affective, quels que soient leurs précocités ou «retards apparents». C'est alors que le langage oral et les émotions peuvent être pleinement libérés, et que l'enfant peut rendre lisibles et fonctionnelles les compétences-socles indispensables au développement des systèmes de communication, à la socialisation, à la libération des processus cognitifs et à l'épanouissement des ressources cérébrales, ferments de la réussite personnelle, scolaire

    et sociale.

    Toutes les structures d’accueil de la petite enfance, et pas seulement les écoles maternelles, devraient effectivement être conçues pour que les imbrications fonctionnelles soient possibles dès l’arrivée de l’enfant avec son ou ses accompagnateurs. Elles doivent impérativement s'organiser pour que les enfants non sécures ou insécures puissent s'installer dans une sécurité affective minimale, ou la restaurer si elle a été altérée ou détruite. Un accueil rassurant dans une «sphère d'accueil» bien aménagée, des interactions accordées et des possibilités d'attachement sécure avec au moins une personne apaisante (qui ne se confond pas avec la personne d'attachement initial) sont des leviers majeurs pour qu'un enfant non sécure ou insécure puisse «s'imprégner» d'une sécurité affective qu'il ne trouve pas dans le milieu familial. Il peut ainsi développer une confiance minimale en soi et dans autrui, mais également nourrir l'estime de soi. Mais, faute de moyens, l’école maternelle dispose rarement d’une sphère d’accueil. Peut-on lui en attribuer la responsabilité ?

    La plupart des critiques formulées à l’encontre des petites sections des écoles maternelles sont donc fallacieuses. Il faudrait en améliorer le fonctionnement en leur apportant plus de considération, et en leur donnant plus de moyens humains et matériels.


    QUE PROPOSENT LES JARDINS D’ACCUEIL ?


    Tout d’abord, comme nous l’avons déjà souligné, on se demande si la députée Madame TABAROT, les sénateurs Madame PAPON et Monsieur MARTIN savent réellement ce qu’ils veulent en préconisant les jardins d’éveil. En effet, ils souhaitent à un moment “des locaux adaptés” qui “doivent permettre le besoin d’isolement mais aussi d’échanges et de motricité spatiale”, et à un autre moment “un aménagement fonctionnel des locaux pour répondre à leurs besoins de mouvements, de jeux, de repos”. S’ils avaient une conception réellement claire du développement et des besoins des enfants âgés de 2 à 3 ans, et de l’aménagement des locaux dans les jardins d’éveil, pourquoi ne proposeraient-ils pas une formulation unique et claire qui rassemble les besoins précédemment énumérés... et les autres ?


    des locaux adaptés aux jeunes enfants” ?

    Les sénateurs proposent que les jardins d’éveil puissent être ouverts dans les locaux attenant à une crèche ou une école maternelle, ou au sein de celle-ci, ou alors à une distance raisonnable (que faut-il entendre par là : 20 mètres, 100 mètres, 500 mètres ... ?). Les conséquences sont évidentes : ils envisagent implicitement de réduire l’espace disponible à l’intérieur et/ou à l’extérieur des structures existantes alors que l’une des critiques formulées à l’encontre des écoles maternelles est le manque de surface utile, en particulier pour l’accueil des enfants et de leur(s) accompagnateur(s). “On déshabille Pierre pour habiller Paul” ? Va-t-on aggraver les équilibres de vie des enfants en réduisant les surfaces disponibles dans les crèches et les écoles maternelles... pour faire de la place aux jardins d’éveil ? Les sénateurs évoquent aussi la possibilité d’implanter les jardins d’éveil dans des locaux appartenant aux collectivités territoriales. C’est-à-dire des hangars, des remises, des bâtiments désaffectés, des locaux anciens de la Poste comme à Ville-de-Tardenois... ? Combien de mètres carrés seront réservés au lieu de sommeil, aux toilettes et aux sanitaires ? De combien de mètres carrés les enfants disposeront-ils pour évoluer en activité libre et pour être accompagnés dans des activités éducatives et/ou pédagogiques ? En conséquence de surfaces étriquées et non aménagées ou aménageables, les enfants seront-ils placés “à la consigne” comme des “sardines en boîte”. En outre, quelle serait la proximité avec une crèche ou une école maternelle ? Si des locaux municipaux ou autres sont “convertis” en jardins d’éveil, qui financera en dehors de la Mairie et de la CNAF ? L’Etat ? En effet, le budget attribué pour l’investissement, l’équipement et le fonctionnement des jardins d’éveil n’est que de 25 millions d’euros jusqu’en 2012 ? Or, dans chaque jardin d'éveil, il faudra construire des sanitaires et des toilettes adaptés aux enfants de deux à trois ans, au moins un lieu de sommeil, une possibilité de préparer ou réchauffer le(s) repas, des lieux équipés de mobiliers appropriés et des espaces qui autorisent les activités ludiques, les activités libres, les activités à finalité éducative ou pédagogique ... qui permettent aux différents enfants de révéler et structurer leurs potentialités, particularités, possibilités et capacités, tout en acquérant de nouvelles. On nous cite en exemple la contribution financière du conseil général de l’Essonne à la construction d’un établissement multi-accueil et d’une maison de la petite enfance (c'est aussi ce que nous proposons). Tant mieux, mais comment feront les conseils généraux des départements aux ressources beaucoup plus modestes ? Les jardins d’éveil entraîneront de facto une nouvelle discrimination et sélection par l’argent.


    Il eût été plus intelligent et responsable de concevoir et développer des espaces aménagés, des mobiliers appropriés et un environnement à la fois sécurisant et stimulant dans les grandes sections existantes des crèches et dans les petites sections d’école maternelle, structures que la France a inventées au 19èmesiècle. Ou alors, dans des structures innovantes, gratuites et ouvertes à tous qui permettent à chaque enfant de révéler, vivre et renforcer sans rupture ses possibilités et capacités relationnelles, temporelles et spatiales en passant de la crèche entre 2 et 3 ans, ou avant selon les enfants, à une petite section d’école maternelle (voir les “crèches-écoles enfantines” que nous avons conçues et proposées pour les enfants âgés deux à quatre ans).


    Un encadrement suffisant ?

    Le rapport des sénateurs nous annonce que, dans un jardin d’éveil, il y aurait un adulte pour douze enfants, ce qui, au plan comptable des moyennes, serait intermédiaire entre les crèches (un pour huit dans le corps le rapport, en réalité cinq comme cela est indiqué dans une autre partie du texte) et les écoles maternelles (un pour quinze, en réalité “aucune norme” comme cela est indiqué dans la présentation des jardins d’éveil). Une contradiction apparaît dans les suggestions des rapporteurs puisque, dans une partie du rapport, la norme d’encadrement dans un jardin d'éveil serait d’un adulte pour quinze enfants et non plus un pour douze.

    On “oublie” de nous dire que le mode de fonctionnement des jardins d’éveil ne pourra pas avoir la même adaptabilité, la même flexibilité et la même efficacité que dans une structure "traditionnelle". En effet, dans une crèche qui accueille au total vingt ou quarante enfants, parfois davantage, l’organisation et le fonctionnement sont assurés par une équipe composée de professionnels compétents et complémentaires qui peuvent se remplacer, s’entraider et se répartir les tâches selon les besoins et particularités des enfants, selon les événements et selon les jours, selon les absences de l’un ou l’autre, même s’il y a une référente pour chaque enfant et même si les missions de chaque catégorie (auxiliaire de puériculture, éducateur de jeunes enfants ...) sont clairement définies. A l’école maternelle, il y a dans toutes les classes un partage des tâches entre le (la) professeur(e) des écoles qui organise les différents temps, activités et apprentissages, et l’aide maternelle (ATSEM) qui les prépare sans oublier qu’elle accompagne les enfants aux toilettes, assure les soins hygiéniques lorsque cela est nécessaire, accompagne et aide l’enseignant(e) dans ses temps et “tâches” ... Par comparaison, dans un jardin d’éveil qui accueillerait 24 enfants (deux unités de douze), comment l’un(e) ou l’autre des deux adultes feraient-ils (elles) pour assurer tout cela sans aide maternelle ou personne équivalente, en interaction ou non, même si un éducateur de jeunes enfants est prévu dès lors que l’effectif est de 24 (autrement dit, il n’y en aurait pas si l’effectif était de 18, 20 ou 23 enfants) ? L’une de ces personnes, ou toutes, auraient-elles des fonctions et compétences équivalentes à celles des professeurs des écoles... sans en avoir la formation ? Une autre devrait--elle se consacrer à des tâches habituellement dévolues aux aides maternelles ? Ou alors, les deux personnes (ou trois si on compte l’éducateur de jeunes enfants) seraient-elles interchangeables ? Comment pourraient-elles assurer un accueil sécurisant à vingt-quatre enfants, alors que le rapport des sénateurs insiste (à juste titre) sur l’importance de l’accueil ? En outre, qui va assurer le rangement, le nettoyage et l’entretien des locaux ? Pour pallier le nombre insuffisant de professionnels, Madame TABAROT propose “de constituer au sein de chaque relais d’accueil familial un réseau de “seniors à la retraite” qui pourraient “être mobilisés à certaines périodes de la journée”. On croit rêver. C’est vraiment se moquer des enfants, de leur famille ... et des professionnels. Quelles seraient en effet les compétences de ces seniors ? Il ne suffit pas d’être grand-mère ou grand-père (à la retraite) pour être compétent dans l’accueil des enfants et leur accompagnement dans telle ou telle activité, à tel ou tel moment. La proposition de Madame TABAROT est une hérésie. Une vraie solution de parvenir à un accueil amélioré des jeunes enfants est d’agir sur trois leviers : augmenter et aménager les surfaces utiles, augmenter le nombre des professionnels dans chaque structure de façon à réduire le nombre d’enfants par adulte, et compléter la formation de chaque catégorie de personnes.

    Le jardin d’éveil pourra-t-il être “une structure adaptée aux moins de trois ans ? Y aura-t-il un aménagement fonctionnel des locaux pour répondre à leurs besoins de mouvements, de jeux, de repos... ? L’espace sera-t-il conçu à leur échelle” ? Tout est flou ou ambigu.

    Tels que les jardins d’éveil sont présentés, on peut faire l’hypothèse forte qu’ils entraîneront encore plus d’activités imposées, plus de situations d’attente, moins de “jeux libres”, c’est-à-dire ce que les sénateurs reprochent à l’école maternelle. En effet, non aidé par une aide maternelle, le professionnel devra gérer encore plus étroitement le temps et les activités de “ses” 12 enfants dans un lieu non aménagé pour autoriser les activités libres dans toutes les dimensions de l’espace.

    Il ne suffit pas de souhaiter un “aménagement fonctionnel des locaux”. Encore faut-il préciser comment les locaux seront aménagés, et pour quoi faire.

    Mais que peut-on attendre d’une Secrétaire d’Etat à la Famille qui déclare que “la fessée est structurante” ?...


    CONCLUSION


    Le rapport de la députée Mme TABAROT et celui des sénateurs Mme PAPON et M. MARTIN sont des tissus d'affirmations gratuites, de méconnaissances, d'ignorances et d’erreurs qui masquent mal une manipulation de l’opinion publique et de la classe politique dans son ensemble. Aucun de leurs arguments ne justifie la création de structures "spécifiques" qui seraient réservées aux enfants âgés de deux à trois ans. En effet, ces enfants ne se caractérisent nullement par des besoins, "émergences", constructions... qui en feraient des êtres fondamentalement différents des enfants âgés de trois à quatre ans, notamment ceux qui sont accueillis en petite section d'école maternelle, sinon des différences de complexité liées à l'âge et aux particularités individuelles. En fait, les "jardins d'éveil" ne reposent nullement sur la prise en compte de l'intérêt des enfants et de leur famille. Rien ne permet à Mme MORANO d'affirmer que la création de ces structures “permet une nouvelle approche en matière de politique d’accueil de la petite enfance dans notre pays".

    Les "jardins d'éveil" ne sont que des coquilles vides et de la poudre aux yeux. C'est une diversion qui masque mal les besoins et demandes croissants des familles pour que l'accueil de leur enfant se fasse, à juste titre, dans des conditions qui préservent son bien-être et son intégrité. En réalité, en soulignant que les "jardins d'éveil" doivent préparer les enfants à « la préparation à la préscolarisation », les parlementaires préparent l'opinion publique à la disparition des petites sections de l'école maternelle puis, plus ou moins progressivement, à celle des moyennes et grandes sections. En effet, on peut faire l'hypothèse forte qu'au fil du temps, ils auront pour objectif avoué non plus la préparation à la préscolarisation mais la préparation à la scolarisation, ce que fait l'école maternelle dès la petite section. Dans cette perspective, les petites sections d'école maternelle ne serviraient plus à rien puisque les "jardins d'éveil" prépareraient à la scolarisation. Le document transmis à la CNAF et aux maires par le secrétariat d’Etat à la famille conforte cette hypothèse. En effet, les enfants accueillis à partir de l'âge de 2 ans dans un "jardin d'éveil", pourront y rester pendant une durée de neuf à dix-huit mois, c'est-à-dire jusqu’à 3 ans et demi, empiétant ainsi sur la classe d'âges de 3 à 4 ans qui est, selon la loi, normalement accueillie en petite section d'école maternelle. Il sera ensuite facile de faire admettre que, pour telle ou telle raison, les enfants pourront être "gardés" au "jardin d'éveil" jusqu'à l'âge de 4 ans. Ils entreront alors directement en moyenne section. Les "jardins d'éveil" privés se substitueront ainsi "logiquement" aux petites sections maternelles de l'école publique. On peut craindre que, au nom de la continuité éducative, le processus "n'avale" ensuite les moyennes et grandes sections. La mystification sera alors totale : les "jardins d'éveil" auront conduit à la mort programmée de l'école maternelle.

    Structures d'éducation payantes, les "jardins d'éveil" seront un cheval de Troie au bénéfice des promoteurs, constructeurs et autres "businessmen" très prisés par le pouvoir politique actuel. En effet, les entreprises privées auront alors un boulevard pour répondre aux appels d’offre, pour être retenus car ils auront des projets standard apparemment moins coûteux ... en tout cas non adaptés à l’accueil, aux besoins et aux particularités des enfants, et pour avoir ainsi une source supplémentaire de profits. L'accueil dans un "jardin d'éveil" sera dissuasive et discriminante pour les familles dont les moyens financiers ne seront pas suffisants, même si le coût sera indexé sur leurs revenus. Faut-il rappeler que l'école maternelle est gratuite et ouverte à tous les milieux sociaux et ethniques grâce à la solidarité nationale et communale qui s'est maintenue dans la République au cours du vingtième siècle ? Le Président de la République et son gouvernement ignorent-ils que de nombreuses familles qui auront du mal à "joindre les deux bouts" malgré les aides sociales, ne pourront pas envisager de payer tous les mois à leur enfant une place au "jardin d'accueil"? En outre, le nombre de places y sera limité puisque quelques-unes seront réservées aux entreprises qui auront "sponsorisé" sa réalisation. La régression sociale et humaniste est en marche forcée avec les enfants pour principales victimes.

    On ne peut donc laisser l’engrenage des "jardins d'éveil" se mettre en place. Il est urgent que, en dehors des dogmes et des intérêts personnels, claniques ou politiques, il y ait une “vraie” réflexion communale, départementale, régionale et nationale sur les besoins, les finalités, les missions et les enjeux des différentes structures éducatives, en particulier l’école maternelle, et que leur importance pour les équilibres de l'enfant (et de sa famille) soit mieux expliquée à l'opinion publique. Malheureusement, elles prêtent le flan à la critique. car elles n'ont pas pu, su ou voulu se rénover pour faire face à l'évolution de la société tout en se nourrissant des données des recherches scientifiques et cliniques sur le développement de l'enfant. Surtout l’école maternelle, à cause de son autosatisfaction et de ses schémas de fonctionnement quelque peu surannés. Elle vit sur les mêmes certitudes et pratiques depuis les années 1970, implicitement soutenus ou prônés par des politiciens à court d’idées, immobiles et animés par la seule logique comptable et économique, par des syndicats trop souvent archaïques et par quelques associations du monde éducatif devenues pour la plupart conservatrices voire rétrogrades (à l’exception notable de la Fédération des Conseils de Parents d’Elèves). L’innovation dans les crèches est également en panne, malgré les qualités humaines et les compétences des professionnels.

    Je suis effaré que, toutes opinions et idéologies confondues, beaucoup de responsables politiques manquent à ce point de générosité, de lucidité, de culture, d’intelligence, d’imagination et de vision sur l’essence et le fondement de toute société humaine, quelle que soit sa culture : LES ENFANTS EN COURS DE CONSTRUCTION OU DE RECONSTRUCTION. Ils ne peuvent former l’idée que la petite enfance est le terreau des forces vives de la famille, de l’école et de la société de demain alors que toute politique conséquente devrait forcément en faire le coeur de son projet. Mais qui a perçu ou voulu percevoir réellement les dangers que portent en germe “les jardins d’éveil” ? Je n‘ai rien entendu ou lu qui soit réellement conséquent ou convaincant, même si je n’ignore pas la vigoureuse protestation de quelques-uns. La violence à l’école, l’échec scolaire, les “troubles du comportement” et les visites chez le médecin pour fatigue scolaire et troubles du sommeil, ont encore de beaux jours devant eux alors que, bien évidemment, il n’y a ni déterminisme ni fatalité dès lors qu'on agit sur les leviers pertinents ! Une fois de plus, les enfants sont niés ou maltraités.

    Il y a donc bien des choses à faire et à inventer. Mais certainement pas ces « jardins d’éveil ». Il faut au contraire améliorer les deux structures que la France a inventées au 19èmesiècle : la crèche et l’école maternelle. Et aussi créer de nouvelles entités qui soient intermédiaires et passerelles entre la crèche et l’école. Nous pouvons d’ailleurs en donner un exemple avec les « crèches-écoles enfantines » . Ces structures permettraient d'assurer entre deux et quatre ans une continuité dans la satisfaction des besoins « basiques » et universels qui perdurent (protection, sécurité, alimentation, hydratation, propreté et soins corporels, sommeil …) et dans le « façonnement » des constructions, acquisitions et apprentissages au rythme de chacun, que ceux--ci soient liées au développement ou tributaires de l'environnement. On parle encore trop souvent de retard ou de déficit dans telle ou telle façon d'être, façon de faire, capacité, conduite … pour souligner celles qui ne sont pas encore observées chez certains enfants alors qu'elles sont évidentes chez la plupart des pairs du même âge ou plus jeunes. Le plus souvent, il suffit d'attendre quelques semaines ou quelques mois pour que les enfants « en retard » ou « déficitaires » soient comparables aux autres, en tout cas peu différents, voire « en avance » pour d'autres aspects. « Tout » devient possible si on crée des structures au fonctionnement flexible et adapté qui reçoivent dans les mêmes lieux les enfants de deux à trois ans et ceux de trois à quatre ans. Ils sont conçues pour permettre aux différents enfants de passer à tout moment et à leur rythme d'un petit groupe à un plus grand groupe, et inversement, et d'une classe d'âges à une autre, tout en restant dans des limites qui évitent de trop grands écarts de compétences liées au développement (par exemple, le passage d'un ou de plusieurs enfants d'un groupe de deux ans et demi à un groupe de trois ans et demi, et inversement), mais aussi de passer sans appréhension, stress ou détresse d'une activité à une autre. C’est l’objectif des crèches-écoles enfantines présentées dans le numéro de juin-juillet 2009 du Journal des Educateurs de Jeunes Enfants (EJE). Les crèches-écoles enfantines seraient des structures passerelles et intermédiaires entre la crèche et la moyenne section de l’école maternelle. Elles seraient gratuites et ouvertes à tous les enfants de tous les milieux sociaux et ethniques dès l’âge de deux ans jusqu’à quatre ans, en interaction avec les moyennes et grandes sections de l’école maternelle. L’équipe de professionnels serait “pluridisciplinaire” (auxiliaires de puériculture, éducateurs de jeunes enfants, professeurs des écoles, éducateurs spécialisés des RASED ...). Les crèches-écoles enfantines assureraient une continuité sans rupture entre le milieu familial, la crèche et l’école maternelle.


    Eléments de bibliographie en langue française

    H. MONTAGNER 1988 l'attachement, les débuts de la tendresse, Paris, Editions Odile Jacob (édité en livre de poche, dernière édition 2006).

    H. MONTAGNER 1995 L'enfant acteur de son développement, Paris, Stock.

    H.MONTAGNER 2002 L'enfant, la vraie question de l'école, Paris, Editions Odile Jacob.

    H. MONTAGNER 2002 L'enfant et l'animal, Paris, Editions Odile Jacob.

    H. MONTAGNER 2006 L'arbre enfant. Une nouvelle approche du développement de l'enfant, Paris, Editions Odile Jacob.






     

     

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