Voici un texte écrit par NABUM et un dessin réalisé par NAGY
à notre demande.
La suppression de plus de 100 festivals et les coupes dans les budgets culturels ne peuvent que nous inquiéter
Les élus font le choix de l'ignorance
Tour de vis à l'intelligence.
Cette fois, à n'en point douter, la France entre en récession ; à moins que le pauvre Bonimenteur que je suis ne comprenne rien aux affaires économiques et qu'il ne faille simplement parler que de régression culturelle. J'avoue humblement ne rien comprendre aux règles qui prévalent dès qu'il s'agit de tenir les cordons de la bourse dans nos collectivités territoriales, mais ce qui me saute aux yeux, c'est l'immense liste des festivals supprimés.
Cette fois monsieur Gattaz aura tout lieu de se réjouir : les nuisibles, les inutiles, les néfastes resteront chez eux ; ils n'auront plus accès à des scènes qu'ils utilisaient comme chambre d'écho de leur inadaptation sociale. Au chômage les musiciens et les chanteurs, les acteurs et les rêveurs, les utopistes de tous poils et les parasites du régime des intermittents.
Le tour de vis pratiqué un peu partout sur les territoires va faire taire cette armée honteuse d'hirsutes, de forts en gueule, de dégénérés et de dépendants à des substances illicites. La culture n'a plus sa place dans une nation en proie à la faillite de ses élites financières. D'ailleurs, à quoi sert-elle, si ce n'est à insuffler un mauvais esprit dans la tête, déjà trop pleine, de spectateurs aux idées douteuses ?
Regardons-y d'un peu plus près : les festivals n'attiraient qu'un certain profil de spectateurs :les privilégiés de l'enseignement et de l'éducation : ces classes moyennes qu'on aime tant ponctionner dans les milieux gouvernementaux. Ces gens qui réfléchissent trop, ne sont jamais d'accord avec les mesures régressives qui assurent l'hégémonie d'un système merveilleux : le libéralisme sauvage !
Qu'ils aillent rejoindre ces bataillons que le rouleau compresseur de l'abrutissement collectif a déjà mis au pas, qu'ils ouvrent enfin leurs téléviseurs pour se coller devant les machines à vider les cerveaux. Un peuple lobotomisé regarde la télé-réalité, écoute des chanteurs mièvres et se passionne pour des aventures insipides. Le théâtre, le cinéma, la chanson, la poésie, les arts plastiques sont des arts dégénérés quand ils ne passent pas sur le petit écran.
Un état fort doit être en mesure de surveiller toutes les expressions. Il est grand temps de mettre au pas cette armée de baladins, trouvères et colporteurs d'idées subversives. Un peuple soumis ne réfléchit pas, un peuple asservi ne se passionne pas pour des loisirs qui l'écartent de l'activité essentielle du bon mouton bêlant : consommer.
Toutes les collectivités ont compris le danger qu'il y avait à ouvrir l'esprit des citoyens. Il faut fermer le robinet des subventions pour la culture et les associations. Réduire les espaces de liberté, supprimer les occasions de réflexion, écarter les dissidents, les marginaux, les libres penseurs, c'est dérouler un tapis rouge aux vedettes de la futilité et de l'absence de critique sociale.
Un peuple qui n'a plus de loisirs culturels sera un peuple soumis et obéissant. La dictature de la finance va pouvoir se mettre en place sans que s'élèvent sur des scènes ouvertes, des voix dénonçant le diktat de la stupidité et de l'abrutissement. Il faut faire des économies et ce sont les robinets de l'intelligence, de la beauté, de la réflexion que l'on ferme. Ne croyez pas qu'ils ne savent pas ce qu'ils font : bien au contraire, ils agissent en totale conscience.
La culture est subversive et à ce titre elle n'est plus supportable. Ce monde qu'ils espèrent de leurs vœux sera peuplé de citoyens obéissants, serviles, miséreux, peu instruits. Tout est mis en œuvre pour saccager l'école, briser le tissus associatif, couper la richesse créatrice. Ceux qui prônent la domination des financiers et des économistes savent parfaitement pourquoi ils le font.
Que ce virage se fasse ainsi sous la présidence d'un homme qui se prétend Socialiste atteste de la trahison de cette gauche de pacotille, entièrement vendue aux thèses du libéralisme. Réduire tout ce qui peut enrichir l'individu, l'élever hors de sa condition de simple pion, nuit gravement à la conjuration des ploutocrates. Il est grand temps que nous nous réveillions avant qu'il ne soit trop tard.
Les prochaines élections départementales sont à ce titre exemplaires. En votant pour les trois grands partis, vous faites le choix de la rigueur, de l'ignorance et de la régression. Leur ligne de conduite est identique : économies budgétaires, réduction drastique des dépenses culturelles, casse du monde associatif. Ils sont complices et adhèrent à un même projet de société à quelques nuances près.
Culturellement vôtre.
L'illustration est de Nagy