Merci à Jean Epstein pour ce texte écrit pour notre association
La famille se porte bien, merci !
Il est courant et presque normal d’entendre régulièrement clamer haut et fort que la famille est en crise !
En tant que psychosociologue observant et étudiant l’évolution de ce qu’il est convenu de nommer « la famille », mon intime conviction en est tout autre.
Car, à la lumière de mon travail, je ne peux que constater que la famille, loin d’être en crise, est avant tout (et très rapidement) en mutation. D’ailleurs, peut-on encore aujourd’hui parler de la famille, au singulier ?
A mon sens, il serait plus juste d’en parler au pluriel, en ajoutant que, avant, la famille avait toutes les réponses alors que, maintenant, les familles ont toutes les questions !
D’où, de plus en plus souvent, un sentiment d’Isolement, de dépassement voire d’incompétences ressenti par bon nombre de parents !
Sentiment qui, d’ailleurs, peut parfois être plus ou moins consciemment entretenu voire activé par la société, ne serait- ce que dans un but mercantile – Rappelons- nous ce que disait Françoise Dolto, au milieu des années 80, lorsqu’elle déclarait : « Des spécialistes risquent de construire leur fonds de commerce sur le sentiment d’incompétence des parents ! »
- Pour mieux comprendre la portée d’une telle phrase, il suffit de penser à l’impact ( y compris économique) d’émissions télévisées style « Super Nanny », ou encore de consulter sur internet les nombreux sites de « coaching parental » qui, moyennant finances, proposent à tout parent qui s’interroge des réponses stéréotypées soit disant idéales… bien que, par définition, inadaptées aux réalités diverses de chacun.
Mais revenons à cette notion de mutation
- Pour cela, prenons l’exemple des pères - Il y encore quelques décennies, leur rôle était parfaitement résumé dans le livre Intitulé « Boucle d’or », au sein duquel on pouvait apprendre que « Papa Ours » avait le grand bol, « maman Ourse » seulement le moyen bol… et les oursons « pas de bol » ! Mais tout cela pouvait sembler naturel si l’on se souvient que la notion de « droits de l’enfant » est plus récente et que la loi sur l’autorité parentale conjointe remonte a à peine plus de deux décennies : au début des années 70, elle se nommait « loi sur la puissance paternelle », ce qui signifiait que, juridiquement, les mères, en France, n’avaient aucune autorité sur leurs propres enfants !!!
Autre exemple du même tonneau : celui des grands parents. Si l’on se réfère aux chiffres, on peut tomber des nues ! A la question : « Combien d’enfants ont leurs quatre grands parents à la naissance ? », les relevés de l’état civil nous répondent :
En 1960 : 5% - en 1980 : 47%
En 1990 : 61% !
Ce qui doit de toute urgence nous amener à arrêter de nous la jouer « radio Nostalgie » en nous lamentant sur un passé soi-disant Idéal : « Avant, les grands-mères, c’était en noir et ça gardait les petits-enfants ! »
Absurdité puisque, chiffres objectifs à l’appui, la plupart des grands-parents n’étaient plus vivants, contrairement à aujourd’hui où notre société en possède « deux couches » : les arrières grands-parents (qui ont, dans les représentations, le « Look » des grands-parents !)… et les véritables grands-parents (moyen d’âge 56 ans !)… qu’il ne faut surtout pas, cependant, appeler grand- père ou grand-mère : ils se font nommer « mamie chat », « papy loup »… où autres qualificatifs tout aussi soft !
Nous pourrions tout autant, pour évoquer la mutation familiale, évoquer la question des divorces qui, bien que souvent très douloureux pour les enfants, témoignent du fait que l’immense majorité des mariages sont des mariages d’amour alors que, dans une période pas si lointaine, tant en milieu rural que dans le cadre urbain, beaucoup de mariages étaient « arrangés », pour des questions d’intérêts de toutes natures.
En résumé : la liste des phénomènes très concrets et quotidiens témoignant cette mutation positive serait extrêmement longue à faire, ce qui suffit longuement pour justifier ce titre : « La familles se porte bien, merci ! »
Jean Epstein