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4 novembre 2010 4 04 /11 /novembre /2010 08:27

 

Nantes – 15 octobre 2010

La place des parents et des professionnels au sein des multi-accueils :

des aspirations a la concrétisation des alliances coéducatives

 

Frédéric Jésu*


PLAN


De ce qui fonde les aspirations et la place des parents vis-à-vis des pouvoirs publics et, par délégation, vis-à-vis des professionnels en matière d’accueil de la petite enfance


Les principales composantes qualitatives de la notion d’accueil de la petite enfance (I)

Quelques repères historiques et linguistiques sur les termes « accueillir » et « accueil »

Quelques repères pour définir la qualité de l'accueil des jeunes enfants et la place des parents

L'accueil des jeunes enfants par leurs familles

L'accueil municipal des jeunes enfants


Données quantitatives de cadrage sur le contexte de l’accueil institutionnel de la petite enfance

Données chiffrées sur la natalité et la fécondité

Qui et combien sont les jeunes enfants ?

Où sont les jeunes enfants ?

Qui sont les familles des jeunes enfants et que font-elles pour organiser leur accueil ?


Les principales composantes qualitatives de la notion d’accueil de la petite enfance (II)

L'accueil des jeunes enfants dans les structures collectives

L'accueil des parents dans les structures dédiées à la petite enfance

L'accueil des jeunes enfants par les assistant-e-s maternel-le-s

Tendances actuellement observées dans le champ de l’accueil de la petite enfance

Bilans et perspectives en matière d’accueil de la petite enfance



Des principales conditions éthiques et de quelques occasions institutionnelles récentes propices au développement d’alliances coéducatives au sein et autour des établissements d’accueil des jeunes enfants


Le respect mutuel

Le respect dans l’éducation

Le respect des enfants en matière d'accueil de la petite enfance

Le respect des parents en matière d'accueil de la petite enfance

Le respect des professionnels de l'accueil de la petite enfance.


La co-construction des projets d’établissement

Le contexte d’une possible co-construction du projet d’établissement

Des leviers pour la co-construction du volet éducatif du projet d’établissement

Des leviers pour la co-construction du projet social du projet d’établissement

Des propositions pour favoriser la participation et l’information des parents


Les conseils d’établissement

Des bases juridiques fragiles, sur un fond d’ouverture progressive des établissements aux parents

Des conditions politiques indispensables mais aléatoires

Des enjeux considérables pour accompagner l’évolution des relations entre parents et professionnels

Des enjeux territoriaux potentiels, en lien avec ceux des projets éducatifs locaux

De ce qui fonde les aspirations et la place des parents vis-à-vis des pouvoirs publics et, par délégation, vis-à-vis des professionnels en matière d’accueil de la petite enfance


Les principales composantes qualitatives de la notion d’accueil de la petite enfance (I)


Quelques repères historiques et linguistiques sur les termes « accueillir » et « accueil »


Accueillir


Le sens du verbe est ambivalent dans l'ancien français :

  • Réunir, associer.

  • Attaquer, chasser, assaillir, accompagner brutalement.

  • Saisir, prendre.

  • Recevoir quelqu'un bien ou mal, admettre (verbe lui aussi ambivalent, et comportant une notion de tolérance contrainte).


Au XVIIèmesiècle seulement se dégagent des sens plus positifs :

  • Recevoir favorablement.

  • Aider, protéger.

  • Puis, de façon plus neutre : recevoir d'une certaine manière.


Accueil


D’assemblée, lieu de réunion (XVèmesiècle) en passant par réception aimable (faire un bon accueil) (XVIèmesiècle), le mot finit par désigner, de façon neutre, la façon – bonne ou mauvaise - de recevoir quelqu'un et/ou d'être reçu par quelqu'un.


Aujourd'hui encore, le mot, employé dans l’expression « comité d'accueil » (officiel, informel ou hostile) peut indiquer une structure ou un service chargés de recevoir les personnes qui lui sont extérieures. La notion d’extériorité est ici importante comme on le voit, par exemple, à propos de la notion de « pays d’accueil » au sujet des étrangers.


En résumé


«Accueil» fait partie de ces mots qui comme «hôte» ou «apprendre» sont réversibles, fonctionnent dans les 2 sens. L'accueil est le fait d'accueillir ou d'être accueilli. D'ambivalent il est devenu neutre. L'accueil n'est ni bon ni mauvais en soi et a priori. Il est et devient ce qu'on en fait. C'est une façon de faire associée à une façon d'être. Bref : une posture, une attitude.



Quelques repères pour définir la qualité de l'accueil des jeunes enfants et la place des parents »


Une définition possible de l’accueil selon différentes chartes de qualité


L’accueil est une manière d'établir le premier lien avec quelqu'un, de le recevoir quand il arrive - qu'il s'agisse d'un enfant, de parents, de professionnels - , de façon à créer d'emblée, puis au jour le jour, la confiance entre eux.


Deux notions importantes en résultent.


1) La qualité de l'accueil et la confiance qu'elle permet d’établir concernent tous les acteurs impliqués ; elles sont propices à créer et entretenir une ambiance générale, à tous les niveaux de relation, et elles bénéficient à tous. On peut faire ici le parallèle avec la dimension « contagieuse » de la bientraitance : des parents et des professionnels bien accueillis dans une structure donnée seront plus enclins à bien accueillir les enfants (les leurs et ceux des autres).


2) Une hypothèse, plausible, est que la qualité de l'accueil et la confiance qu'elle induit favoriseraient la séparation enfant / parent, la construction de nouveaux liens et l'adaptation de l'enfant à son nouvel environnement.


Autres conséquences


L'accueil repose sur la disponibilité, l’écoute, les échanges, l’aménagement des temps et des espaces pour que «chacun se sente bien». Ces termes désignent une posture qui ne se décrète pas, mais qui dépend de chacun et de tous, parents et professionnels.


Elle requiert en outre du professionnel, mieux qu’une neutralité bienveillante : une empathie. Celles-ci doivent beaucoup à l'influence des attitudes psychanalytiques. Mais elles dépendent aussi de conditions objectives (temps, locaux, organisation, fonctionnement et «gouvernance» du lieu d'accueil).


Ces caractéristiques idéales de l'accueil doivent s'appliquer à tous les temps (premier accueil, accueil quotidien, temps d'échanges parents / professionnels et entre professionnels) et à tous les espaces (espaces propres à la structure, rapprochement des différentes structures entre elles). On va examiner plus en détail différentes déclinaisons des attentes et des valeurs ainsi attachées à l'accueil des jeunes enfants mais aussi de leurs parents : accueil familial, municipal, dans les structures collectives, et par les assistant-e-s maternel-le-s.



L'accueil des jeunes enfants par leurs familles


L'enfant est accueilli par sa famille avant même sa naissance.


Il est dépositaire d'une histoire, de désirs, d'espoirs, de projets qui dépassent d'ailleurs les seuls parents, et mobilisent par exemple, les grands parents, les frères et sœurs éventuels, voire au delà (familles élargies «traditionnelles» et / ou migrantes, familles recomposées, familles homoparentales).


Les différents aspects du suivi de la grossesse participent à ce «pré-accueil» de l'enfant, et il est important de ne pas en exclure les pères, les frères et sœurs.


L'accueil à la naissance


Les différents rites ou équivalents de rites qui accompagnent la naissance sont :

  • la cotation immédiatement post-natale du score d’APGAR, modalité scientifique de recherche prédictive de la présence de critères d'humanité (accessibilité à la marche bipéde, au langage) ;

  • l’attribution du prénom, la déclaration à l'état civil ;

  • les visites des proches en maternité, la remise de cadeaux, la diffusion de faire-part de naissance ;

  • et bientôt le «choix», si possible, d'un mode d'accueil.


Ces pratiques reflètent une double prise en compte : celle de la fragilité et de la dépendance propres au petit d'homme, et celle de sa nécessaire inscription symbolique et sociale.


Dans tous ces domaines, le rôle des pères est moins visible, mais bien réel, d'autant qu'il est à la recherche de nouvelles formes de manifestation, dans le cadre d'une recherche de parité parentale accrue.


L’accueil par la famille ne dépend pas seulement de la famille


L’amélioration de l’hygiène et des conditions de vie des familles ainsi que la médicalisation de la grossesse et de la naissance ont permis de sécuriser celles-ci et contribuent à une qualité objective de l’accueil des jeunes enfants. Avec d'autres facteurs (développement du travail des femmes, de la contraception, de l’assurance vieillesse), elles ont contribué à réduire le taux de croissance démographique : l'enfant se fait plus rare, donc plus précieux et il est donc accueilli comme tel.


Autrement que - mais aussi comme - dans les sociétés traditionnelles, l'attente, la naissance et les modes d'accueil familial et collectif des enfants sont l'affaire de tous. Malgré les tendances à l'individualisme et au repli sur soi, ce ne sont pas des événements totalement «privés». Ainsi l’accompagnement médico-social de la grossesse, de l'accouchement et de la naissance, par exemple, est-il largement financé par la Sécurité sociale et par les impôts locaux. Ce sont, au moins à ce titre, des actes publics.


Le territoire de vie de la famille et de l'enfant est de même très vite impliqué dans l’accueil de celui-ci.



L'accueil municipal des jeunes enfants


La famille peut être considérée comme la plus petite des collectivités territoriales.


C'est là que se prennent, pendant 18 ans, le plus grand nombre de décisions, et cela dans le plus grand nombre de domaines. C'est là que la disponibilité, l'écoute, les échanges, l'aménagement du cadre de vie, bref – on l’ a dit - l'accueil au quotidien trouvent les occasions les plus essentielles et les plus durables de s'exprimer. Peu à peu, l'enfant lui même contribue à y forger les conditions de son propre accueil, celui de ses frères et soeurs.


Juste après, et au plus près autour de la famille, vient l'entité de la commune – la bien-nommée.


Outre le logement, où l'enfant réside avec sa famille (et il y a parfois plusieurs logements pour une même famille - en cas de séparation des parents), les différents équipements publics et espaces ouverts municipaux constituent l'essentiel du cadre de vie des enfants. Ces espaces sont aussi des espaces-temps : ils correspondent aux différents temps et contribuent à l'organisation des rythmes de vie des enfants. Nombreux et divers sont les professionnels rencontrés en ces ocasions.


Dans quels domaines et dans quelle mesure la commune est-elle impliquée dans l’accueil des jeunes enfants ?


Tout d'abord à partir du Bureau municipal de l'état civil, où sont consignées la naissance et la filiation de l'enfant.


Puis à travers les choix effectués par les communes, avec le soutien et les interventions de l'Etat, de la CAF et du département, en matière de structures d'accueil collectif des jeunes enfants (y compris s'agissant des assistant-e-s maternel-le-s, de création de crèches familiales et de RAM). On y reviendra dans un instant.


Ensuite, en construisant, en aménageant et en entretenant les locaux des écoles pré-élémentaires (y compris pour accueillir les enfants de 2-3 ans) et en y affectant du personnel (ATSEM, gardien-ne-s), sans oublier le Bureau des écoles.


La scolarisation et la scolarité des enfants de 2-3 ans peuvent nécessiter des efforts spécifiques, portés par les communes et - de moins en moins, depuis quelques années, - par l'Education Nationale :

  • dispositifs passerelles, aménagement des locaux;

  • affectation et formation d'EJE, d'auxiliaires de puériculture, d'ATSEM).

  • sans parler des récents projets, encore controversés, de création de « jardins d'éveil ».


La commune intervient aussi en assurant, pour les jeunes élèves des écoles pré-élémentaires, la présence de services périscolaires (accueil du matin et du soir, restauration scolaire, CLSH), en veillant à la qualité de ceux-ci et en décidant de leurs tarifs.


Par ailleurs, pour les enfants de moins de 3 ans (souvent les plus nombreux) qui, pour une raison ou une autre, n'accèdent pas à des structures d'accueil collectif, la commune peut prévoir dans le cadre du PEL ou de projets éducatifs plus spécifiquement centrés sur la petite enfance, des lieux et des temps d'accueil adaptés aux besoins et attentes des enfants et des familles (ludothèques, section petite enfance dans les bibliothèques, lieux d’accueil parents-enfants, ateliers d'éveil artistique.


Enfin, pour tous les jeunes enfants résidant sur la commune, la commune peut et doit veiller à des aménagements et à des équipements amicaux pour les enfants, par exemple :

  • accessibilité aux poussettes (dans les transports en commun, par des ascenseurs dans les bâtiments municipaux) ;

  • présence et aménagement de jeux et de loisirs pour les jeunes enfants dans les espaces verts ;

  • adaptation des équipements culturels ;

  • création d'évènements et de spectacles en direction des jeunes enfants et de leurs familles, etc.


On voit bien, à travers cet exemple des politiques municipales, que l'accueil de la petite enfance ne va pas de soi. Se dire, se vouloir, et se montrer accueillant dépend, en ville comme en famille :

  • de volontés - politiques, parentales ;

  • et de moyens - revenus, contraintes et modes de vie familiaux ; budget de la commune et contribution des autres pouvoirs publics ;

qui déterminent les différences entre les intentions et les réalisations.


Les regards et les attentions portés sur les enfants, sur les parents et sur les besoins d'accueil et de soutien des uns et des autres sont également très déterminants. En complément des volontés et des moyens disponibles, ils influencent le contenu et la qualité des projets des services et des pratiques des professionnels au plan local, mais aussi les tendances observées ou souhaitées au niveau des politiques nationales, voire européennes, d'accueil de la petite enfance.


Données quantitatives de cadrage sur le contexte institutionnel de l’accueil de la petite enfance


Données chiffrées sur la natalité et la fécondité


Depuis 25 ans, on observe :

  • une baisse du nombre de naissances au cours de la décennie 1985-1994, puis une reprise à la hausse ;

  • un mini baby-boom en 2000, une légère diminution en 2002, puis la tendance à la hausse reprend son cours pour atteindre en 2008 son niveau le plus élevé depuis 1981 : 834 000 ;

  • ce chiffre est redescendu à 821.000 en 2009.


L’âge moyen des mères à la naissance était de 30,3 ans en 2009 (pour 28,3 en 1990) ; c’est l’indice d’une natalité de plus en plus choisie.


L’indicateur conjoncturel de fécondité est resté plusieurs années de suite aux alentours de 1,90. Il a atteint 2,14 enfants par femme en 2009.


La France est ainsi devenue, avec l’Irlande, l’un des pays les plus féconds de l’Union européenne. Ce constat est souvent attribué à la politique d’accueil des jeunes enfants activement menée en France depuis au moins un quart de siècle, et plus généralement à sa politique familiale.


La France ne consacre pourtant que 1,3 % de son PIB à l’accueil des enfants de moins de 4 ans (0,6 % aux Pays-Bas, 0,8 % en Allemagne, 2,7 % au Danemark), mais 2,8 % à sa politique en faveur de la maternité et des familles (3,8 % au Danemark).



Qui et combien sont les « jeunes enfants » ?


Qui sont les « jeunes enfants » ?


En France, les notions de « petite enfance » et de « jeunes enfants » sont floues, et leurs définitions non stabilisées. De la naissance à 3 ans ou de la naissance à 6 ans ?


Les indicateurs utilisés en démographie ou en santé publique privilégient souvent les tranches 0-1 an et 0-5 ans.


Les CAF et le ministère en charge des affaires sociales et/ou de la santé - mais la « petite enfance » doit-elle aujourd’hui relever de ces domaines ? - , prennent spécifiquement en compte les enfants de 0 à 3 ans et les conditions de leur accueil, familial ou institutionnel.


Le ministère de l’Education nationale emploie rarement le terme de « petite enfance ».


Les conseils généraux exercent des compétences légales de PMI pour les 0-6 ans, et d’aide sociale à l’enfance, en matière d’accueil physique des « femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins de 3 ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique ».


Dans les communes, les délégations politiques et les organisations administratives intègrent de façon très diverse ce qui relève de la « petite enfance », de l’enfance, de la jeunesse, de l’éducation, voire des affaires sociales et de l’éducation.


Les grands organismes internationaux tels que l’ONU, l’UNICEF, etc. définissent la petite enfance comme l’âge menant de la naissance à la scolarité obligatoire.


Il faut rappeler que l’âge de la scolarité obligatoire, en France, est fixé à 6 ans - même si, de fait, la quasi-totalité des enfants de 3 à 6 ans sont désormais scolarisés à l’école pré-élémentaire, improprement qualifiée de « maternelle ».


On désignera donc ici sous le terme d’« accueil de la petite enfance » l’ensemble des modalités d’accueil, familiales ou institutionnelles, publiques ou privées, destinées aux enfants de moins de 6 ans.


Combien sont les « jeunes enfants » ?


En incluant les départements d’outre-mer, les enfants de moins de 3 ans sont aujourd’hui plus de 2,4 millions, et les enfants de moins de 6 ans plus de 4,8 millions, soit 300 000 de plus qu'il y a dix ans. Depuis 2000, le nombre d'enfants de moins de 6 ans augmente chaque année de 1,1 %.


La répartition des enfants de moins de 6 ans est inégale selon les départements : la part de ces enfants, par rapport à la population totale, varie de 4,8 % à 8,7 %. Dans le quart sud-ouest, la proportion d'enfants de moins de 6 ans est nettement plus faible que dans le reste du pays. Elle est en revanche élevée dans le grand nord-ouest et le long du couloir rhodanien.



Où sont les jeunes enfants ?


L’accueil collectif (non scolaire) et familial des enfants de moins de 3 ans


En France métropolitaine, fin 2008, 48,6 % des enfants de moins de 3 ans ont pu être accueillis à temps plein ou partiel hors du domicile familial Ce taux était en moyenne de 43 % fin 2005, date à laquelle, pour 23 départements, il se situait entre 18 % et 36%, et pour 23 autres entre 54 % et 82 %.


Fin 2008, on comptait 10.212 établissements proposant 342.728 places, soit 14,6 places pour 100 enfants de moins de 3 ans :

  • 9444 établissements d’accueil collectif (crèches collectives, haltes-garderies, jardins d’enfants et établissements multi-accueil) proposaient près de 282.000 places (environ + 26.000 places depuis 2005, pour environ 500 établissements de plus);

  • 768 services d’accueil familial proposaient plus de 61.000 places (environ le même nombre qu’en 2005, pour 150 services de moins).


Une hausse de 3,7% a été observée entre 2008 et 2007, supérieure à celles enregistrées les années précédentes et qui témoignaient plutôt d'une décélération. La promesse présidentielle de l'instauration d'un droit de garde opposable étant aujourd'hui abandonnée, l'inversion de tendance observée en 2008 résulte pour une bonne part des « assouplissements » réglementaires.


Fin 2008, on comptait 769.200 places disponibles, chez 281.700 assistant-e-s maternel-le-s agréé-e-s directement rémunéré-e-s par les parents (+ 89.000 places depuis 2005), soit 34 places (théoriques) pour 100 enfants de moins de 3 ans.


Les départements les plus urbains et ceux du quart sud-est de la France sont les plus dotés en accueil collectif. L’inégale répartition territoriale des différents modes d’accueil est révélatrice d’inégalités d’accès aux différents modes d’accueil et parfois d’absence de choix. Sur certains territoires, il s’agit d’une pénurie de services d’accueil quels qu’ils soient. Sur d’autres, il s’agit d’une pénurie de places d’accueil pour un type de service précis.


La place relative et évolutive des structures multi-accueil dans l'« offre » d'accueil collectif et familial des jeunes enfants


Les établissements multi-accueil proposent au sein d'une même structure différents modes d'accueil d’enfants de moins de six ans : accueil régulier, accueil occasionnel (de type halte-garderie) ou accueil polyvalent, et combinaison pour certains d'entre eux d'accueil collectif et d'accueil familial. La très forte croissance de ces structures a commencé à se manifester au début des années 2000.


Le nombre des établissements de multi-accueil collectif a cru de 9,2 % entre 2007 et 2008, pour atteindre 5.241, soit 55 % du total des structures d’accueil collectif. La progression a été plus rapide encore en termes de places (+11,1 %), pour constituer 54 % du total de l'accueil collectif.


Ces chiffres témoignent de la grande plasticité du dispositif d'accueil de la petite enfance. Pendant que, entre 2004 et 2009, les structures de multi-accueil collectif passaient de 89.000 à 152.000 places, les établissements mono-accueil reculaient de 158.000 à 130.000 places.


Ce développement s’est fait également au détriment de l'accueil familial classique : encore embryonnaires avec un peu moins de 10.000 places, les places en multi-accueil collectif et familial ont progressé de 14,9 % en 2008, alors que celles en accueil familial « isolé » reculaient de 1,4 %.


Les enfants de moins de 3 ans gardés par leurs parents, par des employè-e-s rémunéré-e-s ou par des proches


En 2005 :

  • 40 % des enfants de moins de 3 ans non scolarisés sont gardés par leur(s) parent(s), leur mère le plus souvent ;

  • 14 % par leurs grands-parents ;

  • 2 % par un-e auxiliaire parental-e à domicile rémunéré-e1 ;

  • 2 % par un-e assistant-e maternel-le non agréé-e ;

  • 2 % au moyen d’autres formes d’aides de proximité.


Le principal mode de « garde » des enfants de moins de 3 ans est donc la famille, et notamment la mère.


L’« allocation parentale d’éducation », créée en 1985, n’était alors versée par la CAF qu’à partir du troisième enfant. À partir de 1994, elle l’a été à partir du deuxième enfant (150 000 familles bénéficiaires). Le « complément libre choix d’activité » de la « prestation d’accueil du jeune enfant », qui l’a remplacé à partir de 2004, peut être versé dès le premier enfant (plus de 600 000 familles bénéficiaires).



La scolarisation des enfants de moins de 3 ans


Le taux de scolarisation à 2 ans continue de baisser. À la rentrée 2010, pour la France métropolitaine et les DOM, il était de 15,2 % (11,6 % dans le secteur public et 3,6 % dans le secteur privé), après avoir été de 35,3 % en 2000 et de 24,5 % en 2005. Pour 2 enfants sur 3, la scolarité est partielle et se combine avec un mode d’accueil.


Le taux moyen de scolarisation des enfants de 2 ans est entaché de grandes disparités géographiques. En 2003, certains départements en scolarisaient plus de 60 % (en Bretagne, dans le Massif central, dans la région Nord Pas-de-Calais) contre 5 %, par exemple, à Paris. En 2010, le taux maximum est enregistré dans l’académie de Lille (42,2 %) et le taux minimum dans celle de Paris (4,3 %).


L’application de la loi d’orientation sur l’éducation de 1989 qui prescrit de privilégier la scolarisation à 2 ans dans les ZEP2permettait d’y observer, en 2003, un taux de plus de 37 % (contre 29 % au plan national). En l’absence de données officielles actualisées à ce sujet, il est peu probable que cette tendance se soit maintenue aujourd’hui.


L’accueil extra-scolaire des enfants de 3 à 6 ans


Le soir après l'école et le mercredi en journée, les enfants de 3 à 6 ans sont gardés par leurs parents pendant plus des trois quarts du temps considéré. Lorsque les deux parents travaillent à temps complet, ils assurent eux-mêmes deux tiers du temps le soir après l'école, et la moitié du temps le mercredi. C'est le mercredi, plus que le soir entre 16h30 et 19h30, que les parents font le plus fréquemment appel à des intervenants informels non rémunérés ou à une garde payante - assistant-e-s maternel-le-s, centres de loisirs sans hébergement, gardes à domicile – (respectivement 20 % du temps et 30 % du temps le mercredi, et 10% et 25% les soirs en semaine pour les parents bi-actifs).



Qui sont les familles des jeunes enfants et que font-elles pour organiser leur accueil ?


Neuf dixièmes des enfants de moins de 6 ans vivent avec leurs deux parents. Si les foyers monoparentaux représentaient en 2007 près de 20 % des familles ayant au moins un enfant de moins de 25 ans, ils comportent en effet moins souvent des enfants de moins de 6 ans.


Près de 6 enfants de moins de 6 ans sur 10 vivent avec deux parents actifs (c’est-à-dire qui travaillent ou recherchent un emploi). Lorsqu’ils vivent dans un foyer monoparental, le parent avec lequel ils résident principalement est actif plus d’une fois sur deux.


Le taux de femmes actives ayant un enfant de moins de 3 ans est de 80 %. Il chute à 60 % lorsqu’elles en ont deux et à 37 % lorsqu’elles en ont trois ou plus. Les hommes, quant à eux, par choix ou par nécessité, conservent au fil des naissances un taux d’activité supérieur à 90 %3.


La création de places d’accueil collectives n’est pas une compétence obligatoire des communes. Les critères d’attribution de ces places ne font l’objet d’aucune réglementation nationale. Dès lors, en situation de pénurie de places et de diversité de revenus des familles candidates, les commissions municipales d’attribution évincent souvent les parents sans emploi, et réservent une proportion variable aux allocataires de minima sociaux.


En outre, s’agissant des enfants de moins de 6 ans vivant avec deux parents actifs :

  • 39 % des enfants ont une mère qui travaille à temps partiel ;

  • 9 % ont une mère qui souhaiterait travailler davantage ;

  • 10 % ont une mère qui travaille à temps partiel par manque de services d’accueil d'enfants ou parce que ceux-ci sont trop chers.


Au total, 60 % des enfants de moins de 3 ans et 70 % des moins de 6 ans sont aujourd’hui gardés à temps plein ou partiel par leurs familles, principalement par leur mère. Mais cette solution n’est pas toujours l’expression d’un véritable souhait : 37 % des bénéficiaires des congés parentaux déclarent ne pas avoir trouvé de solution d’accueil et 40 % que leurs horaires de travail n’étaient pas compatibles avec l’offre existante.


Il importe de souligner ici, malgré la résurgence récente et culpabilisante de versions renouvelées des théories psychologiques de l’« attachement précoce », que la volonté des deux parents, et notamment celle des mères, d’exercer une activité professionnelle n’est pas a priori contraire à l’intérêt des enfants :

  • le travail des deux parents, et en particulier des mères, satisfait un besoin économique et sécurise les revenus familiaux, notamment en cas de séparation conjugale : il contribue donc au bien-être matériel des enfants ;

  • l’activité professionnelle satisfait un besoin personnel d’implications et de relations sociales des parents : elle favorise donc le bien-être relationnel des enfants, qui ont plus à gagner d’être élevés par des parents ayant un sentiment de complétude que par des parents réduits malgré eux à leur seul rôle de parent ;

  • le recours à un mode d’accueil extérieur au cercle de la famille nucléaire lorsque les deux parents travaillent satisfait le besoin d’ouverture ou d’élargissement de celui-ci : il stimule donc chez les enfants les aptitudes à une socialisation choisie et pilotée par leurs parents et, si possible, adaptée aux besoins de chacun.


C’est pourquoi il est préoccupant que les besoins particuliers d’un nombre croissant de familles ne soient qu’imparfaitement satisfaits, notamment pour ce qui concerne l’accueil d’urgence, les horaires atypiques et les familles pauvres.


Aujourd’hui, 80 % des enfants de moins de 7 ans et demi dont les parents travaillent ont au moins un parent concerné par des horaires de travail irréguliers ou décalés4. Ceci est source de tensions fortes pour les parents et pour les enfants. Aussi les familles demandent-elles des « services d’accueil à la carte » eux aussi très flexibles. Cette demande pose la question de l’obligation faite aux jeunes enfants et à leurs parents de s’adapter aux besoins des entreprises, alors que peu nombreuses sont encore les entreprises qui font l’effort de s’adapter aux besoins des parents de jeunes enfants qu’elles emploient, et donc aux besoins de ces jeunes enfants eux-mêmes.


Aujourd’hui, quoi qu’il en soit, l’essentiel de l’offre d’accueil est organisé pour des horaires dits classiques (entre 8 heures et 19 heures). Les horaires atypiques ou l’accueil en urgence regroupent un ensemble de situations variées (missions intérimaires, travail en alternance, journée longue, travail de nuit, le dimanche ou le week-end) qui suscitent un besoin et des modalités d’accueil et de garde différents. Si certains couples réussissent à s’organiser de façon à pouvoir eux-mêmes garder en alternance leurs enfants, d’autres familles - et notamment les foyers monoparentaux - sont exposées à d’importantes contraintes, face auxquelles elles ne trouvent pas toujours de solution.


Lorsque les parents travaillent le week-end ou la nuit, les grands-parents et les autres membres de la famille sont particulièrement sollicités pour garder les enfants. Ainsi 17 % des 0-7 ans dont les deux parents exercent une activité professionnelle sont-ils gardés de la sorte le week-end, et 7 % gardés la nuit en semaine.


Par ailleurs, respectivement 29 % et 17 % des enfants dont les parents travaillent sont parfois gardés en semaine, le matin entre 6 heures et 8 heures, et le soir entre 19 heures et 22 heures. Pour la garde matinale (entre 6h et 8h) et en soirée (entre 19h et 22h), la famille est mobilisée pour les tranches horaires extrêmes (entre 6h et 7h30 et entre 19h30 et 22h). Si les professionnels sont davantage présents pour les autres tranches (entre 7h30 et 8h et entre 19h et 19h30), ce sont presque exclusivement des assistant-e-s maternel-le-s ou des gardes à domicile, les structures collectives n’assurant qu’une partie très marginale de l’accueil en horaires atypiques.


La réforme de la Prestation de service unique (PSU), généralisée au 1er janvier 2005, a permis de mieux répondre à l’évolution des amplitudes d’ouverture liées à l’évolution des rythmes et des temps de travail en se basant sur un financement horaire et non plus journalier des places par les familles et par les CAF. Ces modalités de financement ont conduit un nombre croissant d’établissements à transformer leurs places mono-accueil en places polyvalentes, et par conséquent à devenir des établissements multi-accueil. Elles permettent donc d’assurer une plus grande flexibilité de l’offre.


Les initiatives locales d’accueil d’urgence ouvertes 24h sur 24 ou en horaires atypiques et répondant aux besoins spécifiques de certains parents restent cependant marginales.


L’articulation entre vie professionnelle et vie familiale est une question délicate pour toutes les familles. Elle est en outre essentielle pour toute politique de réduction de la pauvreté des enfants, notamment des moins de trois ans et des jeunes enfants scolarisés.


Or la question de l’accès des jeunes enfants aux modes d’accueil est à l’intersection de trois constats :

  • les inégalités face aux savoirs et à l’éducation se creusent dès les premiers âges tandis que les moyens d’intervention de la puissanc

e publique sont mal distribués pour favoriser un développement harmonieux de tous les enfants ;

  • la difficulté d’accès à l’emploi des parents et notamment des femmes pauvres est amplifiée par les règles d’attribution des places d’accueil collectif qui sont le plus souvent réservées aux couples bi-actifs ;

  • le coût des modes d’accueil représente une dépense proportionnellement plus importante dans le budget des ménages pauvres que dans celui des ménages riches.


  • On sait désormais que les contraintes de l’offre de mode d’accueil pèsent essentiellement sur les ménages les plus pauvres : dès 2000, les familles situées dans la tranche des 20 % inférieurs des revenus n’avaient accès que dans 7% des cas à un-e assistant-e maternel-le et dans 5% des cas à une place en crèche (contre 19% et 9% pour l’ensemble des familles, 27 % et 8 % pour les familles situées dans la tranche des 20 % supérieurs des revenus).


    Dans ces conditions, le recours au Complément de Libre Choix d’Activité (CLCA) de la Prestation d’Accueil du Jeune Enfant (PAJE) constitue en réalité une solution contrainte.


    En pratique, ce sont les mères en situation précaire - notamment celles qui sont en contrats à durée déterminée -, les employées du secteur privé et les femmes les moins diplômées qui ont tendance à déserter plus fréquemment le marché du travail que les autres, et qui abandonnent donc classiquement à leur conjoint la charge de pourvoir au budget familial.


    On observe, pour conclure cette approche des conditions de « choix » des parents en matière de mode d’accueil de leurs jeunes enfants, qu’un décalage persistant se manifeste entre les souhaits des parents, les besoins des enfants et l’offre existante. Selon le CREDOC, 21 % des parents avec des enfants en bas âge estiment que la crèche collective est le mode d’accueil le plus satisfaisant, alors que 13 % seulement ont pu y avoir recours. Ce décalage est plus important encore pour les familles aisées. Les familles modestes ont quant à elles une préférence souvent plus marquée pour le recours aux assistant-e-s maternel-le-s, dont le coût s’avère pourtant prohibitif, malgré la PAJE-CMG. Il y a donc une forte proportion de comportements parentaux contraints, et ceci dans toutes les catégories sociales.


    C’est pourquoi la priorité doit aller au développement de l’offre de modes d’accueil diversifiés, adaptés aux besoins personnels et locaux - tels qu’initiés par le développement du « multi-accueil » dans les établissements d’accueil collectif voire familial - plutôt qu’à un renforcement des prestations liées à l’interruption de la vie professionnelle. Les multiples propositions, envisagées depuis 2006, et visant la création d’un « service public de la petite enfance » de même que la reconnaissance d’un droit éventuellement opposable (mais à qui ?) au mode d’accueil et l’affirmation du caractère obligatoire de la compétence des collectivités locales (mais lesquelles ?) en matière d’accueil de la petite enfance s’inscrivent dans le fil de ces constats et des analyses qui en résultent. Elles ne peuvent cependant s’inscrire que dans le cadre d’un projet, non seulement d’accueil, mais aussi éducatif, c’est-à-dire à la fois plus global, non confiné à la seule petite enfance et plus résolument territorial.




    Les principales composantes qualitatives de la notion d’accueil de la petite enfance (II)


    L'accueil des jeunes enfants dans les structures collectives


    Depuis leur création, il y a plus de 160 ans, jusqu'à il y a une quarantaine d'années, les finalités de ces structures étaient essentiellement sécuritaires et hygiénistes. On y parlait de « garde » et non pas d'« accueil » (et le mot « garde » reste encore très présent dans le discours courant).


    Il s'agissait en particulier d'assurer un contrôle social sur les comportements des mères, les pratiques populaires en matière de puériculture et de soin des nourrissons et d'éducation précoce. Il s'agissait de « moraliser les classes indigentes en les secourant », de lutter contre leur « intentions répréhensibles », comme on pouvait le lire dans certains écrits politiques et médicaux du 19èmeet du 20èmesiècles.


    Le rôle important du Conseil général et du service départemental de PMI en matière d'agrément et de contrôle de ces structures (comme d'ailleurs des assistant-e-s maternel-le-s) reste un marqueur historique de l’accent ainsi porté sur la protection de l'enfance et sur les priorités sanitaires (désormais physiques et psychiques) de l'accueil des jeunes enfants. Le retour de cette tendance s’est récemment manifesté avec l’instauration, par la loi du 5 mars 2007 relatif à la protection de l’enfance, d’un examen « psychosocial » obligatoire (et non plus systématiquement proposé, comme le préconisait alors le « plan périnatalité ») destiné à la mère (et non plus au couple parental) au 4èmemois de grossesse.


    L'émergence, depuis une quarantaine d'années, du concept prédominant d'accueil est contemporaine :

    • d'un accueil progressivement accru et amélioré des parents : la famille n'est plus un « vecteur de microbes », et l'accueil des parents se substitue à leur mise à distance ;

    • d'une meilleure connaissance du développement de l'enfant, de ses besoins de sécurité physique et affective comme conditions non seulement de sa « sauvegarde » mais aussi et surtout de son ouverture relationnelle et de sa socialisation, et au total de son éducation globale précoce ;

    • autrement dit, d’un rééquilibrage des fondamentaux : la santé et l’éducation sont les piliers conjoints du développement personnel et social.


    La prise en compte de ces nouvelles dimensions de l'accueil et des nouvelles missions des structures d’accueil des jeunes enfants induisent progressivement une promotion de la notion de projet d'établissement pour y guider l'action éducative collective (c’est-à-dire auprès du collectif des enfants accueillis par le collectif des professionnels accueillants) et pour la coordonner avec celle des parents.


    Il s’en déduit au passage l'importance :

    • de la qualité et du caractère accueillant des locaux, et pas seulement de leur cubage et de leur conformité aux normes règlementaire de sécurité ;

    • mais encore et surtout de la qualification des différents professionnels, de leur formations initiales et continues, de leurs capacités de travailler ensemble, en complémentarité de rôles, et non pas de façon étanche et segmentée, auprès des enfants.


    Ce sont là autant de conditions permettant de mettre en valeur :

    • le rôle du projet d'établissement et de ses deux volets – éducatif et social - à cet égard, et de l'adhésion / implication des parents dans son élaboration et sa mise en œuvre ;

    • le rôle du projet pédagogique propre à l'équipe des professionnels, et qui se distingue du volet éducatif du projet d'établissement.


    Il faut mentionner, à ce sujet, l’existence d’un débat sur la notion de « référent » dans les structures d’accueil collectif des jeunes enfants. La personne du référent correspond :

    • certes à une fonction explicite pour l'enfant : celle de repère, de source et de cible d'une certaine focalisation relationnelle dont l’enfant peut avoir besoin à certaines phases de son développement ;

    • mais à une fonction plus implicite pour les adultes, et qui doit faire l’objet de précautions préalables : les professionnels ne sont pas des substituts parentaux et, notamment, maternels, qui devraient s’efforcer d’accueillir « comme une mère », de même que les parents ne sont pas des consommateurs de garde professionnalisée.


    A cet égard, le récent retour en vogue, à peine «relooké», du concept d’« attachement » et de la notion de « figure d'attachement » est porteur d’ambiguïtés.


    Nous ne sommes plus en 1946, date où la création de ce concept et de cette notion a trouvé toute sa pertinence pour décrire et prévenir la situation de carence de soins relationnels à laquelle avaient été exposés des jeunes enfants confiés à des institutions collectives, pendant et dans les décours immédiats de la seconde guerre mondiale. La formation des professionnels, l’organisation et le fonctionnement des structures et l'option co-éducative permettent aujourd’hui de pallier l’essentiel de ces risques abandonniques et de garantir une continuité et une cohérence relationnelles à l’égard des jeunes enfants accueillis collectivement hors de leurs familles.


    Il importe en revanche de veiller à ce que la réactualisation de ces bases théoriques ne vienne contribuer à culpabiliser les mères (et les pères) qui travaillent et les professionnel-le-s auxquel-le-s ils confient leurs jeunes enfants. Il importe, tout au contraire, de prendre en compte l'environnement, les choix et les contraintes sociaux, économiques et professionnels des familles. Cela doit permettre de penser l'accueil collectif de leurs enfants dans un contexte réel et actuel, et non pas en référence à une idéologie materno-centrée aujourd’hui dépassée.


    Il importe tout autant de se prémunir des idéologies individualistes et consuméristes prédominantes qui peuvent inspirer certains parents, lorsque tel ou tel d’entre eux entend mettre la structure au service de son enfant, sans considération des autres enfants et des dimensions éducatives et pédagogiques collectives de cette structure. Ces tendances risquent de reproduire par la suite leurs effets délétères en milieu scolaire.


    C’est dire au total, et de nouveau, l'importance de promouvoir un accueil collectif structuré autour d'un projet éducatif et d’un projet social qui s'assument comme tels, et qui ne réduisent cet accueil collectif ni à un empilement d’accueils personnalisés, ni à des conceptions exclusivement psychologisantes de ce que ceux-ci nécessitent et recouvrent.



    L'accueil des parents dans les structures dédiées à la petite enfance


    C'est à la lumière de l'ensemble de ces considérations que doit être pensé l'accueil des parents, dans une perspective non seulement de confiance mais aussi de respect mutuels qui déterminent également le respect de la personne de l'enfant.


    L'accueil des parents ne se résume pas aux temps de remise et de reprise de l'enfant. Il ne s’exprime pas seulement, non plus, dans le cadre de « réunions de parents » :

    • organisées pour les informer et répondre à leurs questions, au motif qu’ils sont considérés ou se donnent à percevoir d'emblée comme ignorants, passifs et inquiets ;

    • et/ou animées par des médecins et des psychologues en référence à la vieille tradition du contrôle social hygiéniste, aujourd’hui renommé «soutien à la parentalité» ; la parentalité n'est pourtant pas une fonction a priori défaillante, encore moins une source ou une forme de maladie, même si l’on voit émerger ici ou là, dans des structures sanitaires, des « unités de parentologie » !).


    Pour autant, des temps et occasions spécifiques d'accueil s'imposent, et ceci en direction des deux parents :

    • phase de prise de contact, de rencontre de l'équipe, de visite des locaux (avec l'enfant) ;

    • phase de signature des documents d'admission, en veillant à une présence et une participation paritaire, surtout si les parents sont séparés ou en voie de séparation ;

    • phase d'adaptation, d'intégration, de séparation (cette phase n'étant pas à appréhender comme systématiquement difficile) ;

    • phases de résolution de problèmes particuliers intercurrents (à l'initiative éventuelle des parents), voire accueil d'urgence ;

    • phase d'information et de préparation lors de la transition vers l'école.


    Au-delà de ces temps et occasions spécifiques, l'accueil est une posture permanente, quotidienne, évolutive et nécessairement interactive, où chacun – professionnel et parent - doit pouvoir prendre en considération les contraintes et les difficultés mais aussi les ressources et les potentialités de tous les autres acteurs de la coéducation.


    La posture accueillante qui doit se manifester à l'intérieur de la structure, à la lumière et avec l'appui de son projet, peut aussi se manifester entre l'ensemble des équipements, services et professionnels extérieurs et de proximité dédiés à la petite enfance et à son accueil. Cela passe par une mise en réseau visible pour les parents et ouverte à leurs propres réseaux relationnels, par la recherche de coopérations plutôt que de simples juxtapositions ou, pire, de compétitions entre les différentes ressources locales ainsi mobilisées. La commune joue ici un rôle essentiel de pilote des échanges, de l'information et de la communication.


    L’ouverture sur l’environnement de la structure est aussi l’un des enjeux de ces formes approfondies de l’accueil des parents que représentent :

    • la participation des parents à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation de certains aspects du projet d’établissement ;

    • de leurs implications dans la dynamique des conseils d’établissement, quand ils existent.



    L'accueil des jeunes enfants par les assistant-e-s maternel-le-s


    Quelques remarques complémentaires peuvent être formulées s’agissant des spécificités des accueils assurés par des assistant-e-s maternel-le-s agréé-e-s.


    Leur «offre» d'accueil constitue une réalité quantitative, notamment en zones rurales et péri-urbaines éloignées du centre d'agglomération, où cette offre à la fois traditionnelle et de nature libérale dépasse souvent celle des structures collectives municipales ou associatives.


    La souplesse (théorique) des horaires d'accueil des assistant-e-s maternel-le-s et le caractère parfois perçu comme plus sécurisant de la relation personnalisée qu’elles/ils établissent avec les enfants et les parents séduisent les parents de milieux modestes ou contraints par leurs horaires de travail. Mais leur coût les rend moins accessibles aux parents à petits revenus que le coût des structures collectives.


    Les communes peuvent aider les assistant-e-s maternel-le-s à sortir de leur isolement, à travers notamment la création de RAM (avec le soutien des CAF) et leur recrutement dans le cadre de crèches familiales municipales ou associatives. Celles-ci peuvent notamment être dotées d’un projet d’établissement et d’un règlement intérieur, voire d’autres outils (réunions de parents, etc.) permettant de prévenir, gérer et résoudre les éventuelles difficultés entres parents et assistant-e-s maternel-le-s.


    Pour plus personnalisé qu’il soit, l’accueil des enfants par des assistant-e-s maternel-le-s, notamment libérales et salariées par les parents en position d’employeurs, peut comporter aux yeux de ceux-ci plus d’incertitudes sur la dynamique coéducative et parfois moins de perspectives de socialisation précoce des enfants. Cet accueil est aussi exposé à certains travers liés à la logique libérale du rapport «offre/demande» au plan local : plus la demande dépasse l’offre, plus les assistant-e-s maternel-le-s peuvent «sélectionner» les parents selon les horaires, les attentes et toutes autres caractéristiques dont ils font état. L’idée même de l’accueil s’en trouve profondément affectée.




    Tendances actuellement observées dans le champ de l’accueil de la petite enfance


    On observe de fait une ouverture progressive - mais pas nécessairement progressiste - de l’accueil de la petite enfance aux logiques du marché.


    Ainsi, au niveau des structures existantes :

    • l’aide publique aux structures collectives (et même au recours aux assistant-e-s maternel-le-s) tend à s’effacer devant la solvabilisation individuelle ou familiale de la demande ; ainsi, depuis sa création en 2004, le coût de la Prestation d'Accueil du Jeune Enfant – PAJE - et de ses différents compléments est-il passé de 8 à 11 milliards d’euros ;

    • le choix d’aider les familles plutôt que les structures est non seulement plus coûteux pour la collectivité, mais il accroît aussi les inégalités d’offres et d’accès.


    L'accent mis sur la satisfaction du «besoin individuel - ou familial - de service» d’accueil se traduit :

    • par l'apparition et l'implantation, recherchée ou encouragée par certaines municipalités, d'entreprises de crèche, qui font valoir leur logique concurrentielle sur le marché de l'accueil - plutôt que le projet d'établissement - comme facteur d'attraction (et de sélection) des parents ;

    • par la création de crèches d'entreprise, qui peuvent représenter une régression historique aux premiers âges du capitalisme industriel, mais aussi d'intéressantes évolutions si les Comités d'entreprise et donc les parents sont associés à leur conception, à leur gestion et à leur évaluation, et si la qualité d'accueil et le respect de la personne de l'enfant y restent prioritaires.


    On peut cependant imaginer ou conforter d'autres façons pour les entreprises de se montrer accueillantes envers les parents et respectueuses envers leurs enfants :

    • par une meilleure prise en compte des besoins spécifiques des parents (mères et pères), notamment par l'aménagement d'horaires de travail appropriées (comme certaines grosses entreprises commencent à le faire pour leur cadres) : conforter la condition parentale des salariés les rend d’ailleurs souvent plus concentrés, plus productifs, plus «présents» sur leurs lieux de travail (et moins sujets aux absences liées à leurs contraintes parentales) ;

    • par la participation accrue des entreprises, surtout depuis la refondation de la taxe professionnelle, au financement de la création et du fonctionnement des structures d'accueil, sous l'égide et avec l’appui des communes (au moyen par exemple de systèmes croisés de réservation de places pour leurs salariés, comme on le voit par exemple avec le secteur hospitalier).



    Bilans et perspectives en matière d’accueil de la petite enfance


    L'accueil de la petite enfance tend à (ou risque de) devenir une prestation de service, ouverte à différents types de concurrence, et non plus un enjeu éducatif et social local, garanti et soutenu par l'Etat et la CNAF, pour tous les enfants.


    Cependant, et même en France où la situation est meilleure que dans la plupart des pays européens, Scandinavie mise à part, le nombre d'enfants dépourvus de modes institutionnels d'accueil dépasse largement, on l’a vu, celui des enfants qui en disposent. Au 1er janvier 2009, les enfants de moins de 3 ans sont surtout gardés par leurs parents : 63 % passent la majeure partie de la semaine avec eux. En dehors des parents, l’accueil chez un-e assistant-e maternel-le agréé-e est le plus fréquent (18 %), devant celui dans une structure d’accueil collectif (10 %). Nombre de familles, et notamment de femmes, se résignent à cette réalité plutôt qu'elles ne la suscitent par leurs choix, si ces «choix» ne résultent que de contraintes.


    Certes, il revient en premier lieu et en première instance aux familles d'accueillir les enfants, leurs enfants. Mais, pas plus que l'enfant ne « fait » la famille - car elle lui préexiste - , l'enfant n'appartient à sa famille. Il appartient en revanche à tous les adultes que l'enfant côtoie - ceux qui peuplent ses espaces de vie et dont il reçoit matière à forger l'avenir - de contribuer à son accueil. Au sens large, comme au sens institutionnel, l'accueil du jeune enfant est donc une mission de service public, répartie en France entre plusieurs responsabilités légales, obligatoires ou facultatives : celles des communes, des départements, de l'État et des instances de sécurité sociale – CNAF et CAF notamment – qui contractualisent avec eux. Le développement quantitatif et qualitatif des structures multi-accueil illustre au mieux la souplesse et la réactivité de ces partenaires et le

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Son projet associatif s'inscrit dans le PAL ( prestation d'animation locale) et le PAL Vaux le Pénil est adhérent à la Fédération des Centres Sociaux 77
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