Après une intervention étonnante, pleine d'humour de la Ligue d'Improvisation de Seine et Marne, la parole est donnée à la salle
Voici deux témoignages
Bernard Roux, président départemental de la Croix Rouge :
Je voudrais rebondir sur ce qu’a dit l’administrateur de la CAF qui a parlé d’isolement, du non accès au droit et de la fracture numérique.
Je voudrais dire que la CAF a pris conscience du problème et qu’actuellement avec des administrateurs, nous avons créé un comité de pilotage avec le management de la CAF.
La CAF a essayé depuis 2 ans d’avoir des relais pour lutter contre la fracture numérique et la Croix Rouge au niveau national a souhaité que la Croix Rouge de Seine et Marne soit un département test pour lutter contre cette fracture numérique.
J’ai rencontré avec mon Etat-major, la Direction Générale de la CAF. Nous sommes tombés d’accord sur les grandes lignes et nous allons monter une opération d’envergure en Seine et Marne.
C’est en gestation, nous avons besoin de compétence. A la Croix Rouge nous distribuons de l’aide alimentaire, vestimentaire, de l’aide aux devoirs, nous touchons à tout. Mais aujourd’hui nous sommes obligés de recruter des profils différents capables de gérer cette partie informatique.
Nous orientons nos recherches sur des emplois civiques et des jeunes étudiants qui pourraient accompagner ce public.
Nous avons un public particulièrement défavorisé, la fracture numérique chez nous est très très importante. Nous avons des personnes qui viennent nous voir et qui sont totalement perdues. Nous sommes les champions de seine et marne de la photocopie car plus aucune administration n’assure ce service.
La directrice de la CAF a pris conscience du problème, elle a aussi ses obligations de mission de meilleur gestion comme toutes les entreprises aujourd’hui.
Nous sommes aussi investis dans l’accompagnement pour que ces personnes retrouvent leur dignité et la dignité ça passe par un travail.
Nous avons une filiale en seine et marne, qui accueille les personnes bénéficiaires du RSA et qui les accompagne en partenariat avec d’autres structures d’insertion pour une recherche de travail.
A Melun, dans le courant du 1er semestre 2017, nous allons créer un chantier d’insertion, et nous allons accompagner 10 jeunes vers le travail. Je ne sais pas encore où sera le siège de ce chantier.
Melun Val de Seine est un vaste territoire, mais une chose est certaine c’est que nous avons la volonté de lutter contre cette fracture.
BRIGITTE BERLAN du SPF
Moi je voulais intervenir au nom du Secours Populaire. Il y a un chiffre qui m’a frappé. Il nous a été dit que la MDS suivait 1453 familles de la Communauté. Au Secours Populaire nous suivons 958 familles sur ces 958 familles nous avons 230 familles sans ressources. Cela veut dire sans rien, ce sont essentiellement des personnes qui sont en cours de demande pour rester sur le territoire.
Les délais pour que le dossier de demande de titre de séjour soit traité est de 3, 4 voire 5 mois sans aucune ressource
Comme exemple absurde mais véridique : un monsieur d’origine syrienne qui venait d’obtenir ses papiers et pouvait toucher le RSA était sans ressource parce qu’on lui demandait un acte de naissance alors qu’il est né à ALEP, et au vu de la situation actuelle il est impossible d’avoir ce genre de document. Là la situation est bloquée
Ces personnes qui sont sans ressource sont aussi des personnes qui sont entre deux situations. Elles touchaient l’allocation de demandeur d’asile et doivent toucher le RSA. Elles touchaient un salaire, elles devraient toucher le chômage. Elles sont malades, elles devraient toucher des indemnités journalières. Mais en attendant que le mécanisme se mette en route ces personnes ne touchent rien.
Comme au démarrage on était sur des revenus de 800 euros par mois, rapidement les personnes tombent dans la précarité. Par contre ce qui marche ce sont les agios.
Donc très vite les personnes sont en surendettement et cette situation est alarmante.
L’autre chose qui nous tient à cœur, c’est la pauvreté infantile. Nous suivons sur l’agglomération 2660 personnes dont 1250 enfants. Alors bien sûr on parle du RSA, mais n’oublions pas que la tranche majoritaire des personnes aidées ce sont des enfants.
Ces enfants qui n’ont pas forcément accès à la cantine, pour qui il n’est pas question de faire du sport. Comment voulez-vous que des enfants se construisent sans haine, face à cette injustice totale.
Il y a quand même des hôtels sociaux, dans ces hôtels il y a beaucoup d’enfants qui y vivent pas seulement 15 jours. C’est pour 1 an voir 1 an ½
Quelques fois ils restent dans le même hôtel, mais quelques fois ils en changent pour aller à l’autre bout du département voir même à l’autre bout de l’Ile de France.
Dire aussi que nous faisons un travail d’accompagnement comme la Croix Rouge . Mais comme c’est difficile pour ces personnes de s’y retrouver dans les papiers qui leurs sont demandés. A chaque fois que ces personnes ont le droit aux allocations familiales, elles ne savent pas comment faire pour accéder au site de la CAF, elles ne savent pas envoyer un document scanné.
Je voudrais vous donner l’exemple d’une personne qui a 70 ans, elle est en France depuis 1999. Cette personne avait dû quitter le foyer familial rapidement avec ses 2 adolescents car elle était mal traitée.
Nous n’arrivons pas à débloquer son dossier pour qu’elle touche le minimum vieillesse. Il y a toujours un document qui manque.
Elle vit actuellement chez sa fille et touche 70 € de retraite. Sa fille doit partir en Normandie pour raison professionnelle, elle a fait une demande de logement et on lui a répondu : « avec vos revenus vous ferez le 115 »
Il faut mettre un peu de cohérence dans tout cela. Je n’incrimine pas les personnes qui accueillent ce public parce que je pense que la désorganisation des services est réfléchie.
C’est très compliqué d’être pauvre sur la communauté d’agglomération, il y a beaucoup de personnes en extrême précarité.
Concrètement la situation est extrêmement alarmante. Il y a une lutte à mener au niveau des enfants pour l’accès à la restauration scolaire, à l’école maternelle, primaire, au collège et au lycée
Faire au moins que ces enfants aient une vie digne
En Ile de France aujourd’hui la population d’origine émigrée seront les franciliens de demain. S’ils n’ont rien du tout, nous allons avoir plus qu’une fracture sociale, ce sera une hostilité des jeunes qui n’ont pas eu le droit à une vie normale. Et sur l’agglomération c’est très fort
Cela devient très difficile : les familles qui sont dehors, les enfants qui sont séparés de leur famille. Ce sont des situations beaucoup trop quotidiennes.
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